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tempérées & exposées au soleil, & non dans des terres sablonneuses ou trop grasses.

On apporte beaucoup de soin & d’attention pour le thé de l’empereur de la Chine, comme pour celui de l’empereur du Japon, on fait un choix scrupuleux de ses feuilles dans la saison convenable. On cueille les premieres qui paroissent au sommet des plus tendres rameaux ; les autres feuilles sont d’un prix médiocre. On les seche toutes à l’ombre, & on les garde sous le nom de thé impérial ; parmi ces feuilles, on sépare encore celles qui sont plus petites de celles qui sont plus grandes ; car le prix varie selon la grandeur des feuilles, plus elles sont grandes, plus elles sont cheres.

Le thé roux, que l’on appelle thé bohéa, est celui qui a été plus froissé & plus rôti : c’est de-là que vient la diversité de la couleur & du goût.

Les Chinois, dont nous suivons la méthode, versent de l’eau bouillante sur les feuilles entieres de thé que l’on a mises dans un vaisseau destiné à cet usage, & ils en tirent la teinture ; ils y mêlent un peu d’eau claire pour en tempérer l’amertume & la rendre plus agréable, ils la boivent chaude. Le plus souvent en bûvant cette teinture, ils tiennent du sucre dans leur bouche, ce que font rarement les Japonois ; ensuite ils versent de l’eau une seconde fois, & ils en tirent une nouvelle teinture qui est plus foible que la premiere ; après cela ils jettent les feuilles.

Les Chinois & les Japonois attribuent au thé des vertus merveilleuses, comme il arrive à tous ceux qui ont éprouvé quelque soulagement ou quelque avantage d’un remede agréable ; il est du-moins sûr que dans nos pays, si l’on reçoit quelque utilité de cette boisson, on doit principalement la rapporter à l’eau chaude. Les parties volatiles du thé qui y sont répandues, peuvent encore contribuer à atténuer & résoudre la lymphe quand elle est trop épaisse, & à exciter davantage la transpiration ; mais en même tems l’usage immodéré de cette feuille infusée perpétuellement dans de l’eau chaude, relâche les fibres, affoiblit l’estomac, attaque les nerfs, & en produit le tremblement ; de sorte que le meilleur, pour la conservation de la santé, est d’en user en qualité de remede, & non de boisson agréable, parce qu’il est ensuite très-difficile de s’en priver. Il faut bien que cette difficulté soit grande, puisqu’il se débite actuellement en Europe par les diverses compagnies environ huit à dix millions de livres de thé par an, tant la consommation de cette feuille étrangere est considérable. (Le chevalier de Jaucourt.)

Thé des Antilles, (Botan.) plante de deux ou trois piés de hauteur extrèmement commune dans toutes les îles Antilles ; elle croît abondamment entre les fentes des rochers, sur les vieilles murailles, dans les savanes, sur les chemins, enfin par-tout ; ses branches sont chargées de petites feuilles d’un verd foncé, longues, étroites, terminées en pointe & dentelées sur les bords, comme celles du thé de la Chine ; à quoi cependant cette plante n’a aucun autre rapport, malgré l’opinion du R. P. Labat jacobin, qui, faute de connoissances en histoire naturelle, s’est fréquemment trompé dans ses décisions. Le prétendu thé des îles n’est d’aucun usage universellement connu dans le pays, on l’arrache comme une mauvaise herbe nuisible dans les savanes & dans les jardins. Article de M. le Romain.

THÉA, (Botan.) nom du genre de plante qui porte la feuille que nous nommons thé ; nous avons décrit l’arbrisseau au mot Thé, nous allons ici le caractériser d’après le système de M. Linnæus. Le calice est très-petit, permanent, divisé en six feuilles rondelettes & obtuses ; la fleur est composée de six pétales ronds & concaves ; les étamines sont des filets très-déliés, chevelus, plus courts que la fleur,

& si nombreux qu’on en compte ordinairement deux cens ; les bossettes sont simples ; le germe du pistil est sphérique & tricapsulaire ; le style finit en pointe, & à la longueur des étamines ; le stigma est simple ; le fruit est une capsule formée de trois corps globulaires croissant ensemble, il contient trois loges, & s’ouvre au sommet en trois parties ; les graines sont simples, rondes, & intérieurement angulaires. Linnæus, gen. plant. p. 233. (D. J.)

Théa, (Mythologie.) fille du Ciel & de la Terre, femme d’Hypérion, & mere du Soleil, de la Lune & de la belle Aurore, dit Hésiode. (D. J.)

THEACHI, ou THÉACO ou THIAKI, (Géog. mod.) île de la mer Ionienne. Cette île a presque autant de noms que d’auteurs qui l’ont décrite. Elle est appellée Haca par Strabon & par Pline, Nericia par Porcacchi, Val di Compagno par Niger. Les Grecs d’à-présent la nomment Thiachi, les Turcs Phiachi, & nos voyageurs écrivent les uns Théachi, d’autres Thiachi, & d’autres Théaco. Cette île regarde Céphalonie, dont elle est séparée par un canal de la longueur de vingt milles. On lui donne quarante milles de circuit. De tous ses ports, le meilleur est celui de Vathi. On prend communément cette île pour l’ancienne Ithaque, patrie d’Ulysse ; elle avoit autrefois une ville que Plutarque appelle Alalcomene, mais elle n’a présentement que quelques villages peuplés de dix à douze mille habitans. (D. J.)

THEAMEDES, s. f. (Hist. nat. Litholog.) espece d’aimant, à qui les anciens attribuoient la vertu de repousser le fer, au-lieu de l’attirer. Cette pierre nous est inconnue.

THÉANDRIQUE, adj. (Théolog.) terme dogmatique, dont on se sert quelquefois pour exprimer les opérations divines & humaines de Jesus-Christ.

Ce mot est formé du grec, Θεὸς, Dieu, & ἀνὴρ ou ἄνθρωπος, homme. Voyez Homme-Dieu, Dei-Virile.

S. Denis, évêque d’Athènes, fut le premier qui se servit du mot de théandrique, pour exprimer une opération double, ou deux opérations unies en Jesus-Christ, l’une divine & l’autre humaine.

Les Monophysites abuserent ensuite de ce terme, pour l’appliquer à une seule opération qu’ils admettoient en Jesus-Christ ; car ils soutenoient qu’il y a en lui un mêlange de la nature divine & de la nature humaine, d’où résultoit une troisieme nature qui étoit un composé de l’une & de l’autre, & dont les opérations tenoient de l’essence & des qualités du mélange, de sorte que ces opérations n’étoient ni divines, ni humaines, mais l’une & l’autre à-la-fois, ce qu’ils entendoient exprimer par le terme de théandrique. Voyez Opération & Monothélite.

L’opération théandrique ou Dei-Virile, dans le sens de S. Denis & de S. Jean Damascène, est expliquée par S. Athanase, qui en rapporte pour exemples la guérison de l’aveugle-né & la résurrection du Lazare : la salive que Jesus-Christ fit sortir de sa bouche étoit l’opération humaine, mais l’ouverture des yeux se fit par l’opération divine. De même en ressuscitant le Lazare, il l’appella comme homme, mais il l’éveilla du sommeil de la mort comme Dieu.

Le terme de théandrique & le dogme des opérations théandriques furent examinés avec des attentions infinies au concile de Latran tenu en 649, ou le pape Martin réfuta solidement la notion des opérations théandriques, & fit voir que le sens dans lequel S. Denis employa d’abord ce terme, étoit catholique, & très-éloigné du sens des Monophysites & Monothélites. Voyez Personne & Trinité.

THÉANTHROPE, s. m. (Théologie.) Homme-Dieu, terme dont on se sert quelquefois dans les écoles, pour désigner Jesus-Christ qui est Dieu & Homme, ou qui a deux natures dans une seule personne. Voyez Personne & Trinité.