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la pomme de l’arbre du trépan ; on met le menton dans ce cerceau ; on prend avec les trois premiers doigts de la main droite le milieu de l’arbre pour tourner de droite à gauche & faire un trou au crâne, capable de loger la pyramide de la couronne. Voyez cette attitude, fig. 1. Pl. XVII.

Avant de relever le perforatif, il faut avoir l’attention de donner un demi-tour de gauche à droite sans appuyer avec le menton ; & de porter les doigts qui étoient appuyés sur la paumette de l’arbre, auprès du crâne, pour prendre l’instrument & l’ôter perpendiculairement du trou où il est engagé.

L’aide qui est chargé des instrumens, démonte le perforatif ; & met à sa place une couronne, pendant que l’opérateur ôte avec un petit linge ou une fausse tente, la sciûre que le perforatif a produite. Le chirurgien reçoit l’arbre sur lequel on a monté la couronne ; il porte la pyramide dans le trou fait par le perforatif ; il se met dans la même situation où il étoit en se servant de ce premier instrument ; & tournant de droite à gauche, il scie l’os circulairement. Si la couronne ne pose pas perpendiculairement, la circonférence de l’os n’est pas coupée également de tous les côtés : le chirurgien doit s’en appercevoir, parce qu’il s’éleve plus de sciûre d’un côté que de l’autre ; dans ce cas, il panche son instrument du côté où il y en a le moins, & il passe un peu plus légerement sur le côté opposé.

Quand le chemin de la couronne est bien frayé, on ôte le trépan, en donnant le demi-tour, & en portant la main droite à la base de la couronne, comme nous l’avons dit en parlant du perforatif. Pendant qu’un aide démonte la pyramide & nettoie les dents de la couronne avec une petite brosse de crin, le chirurgien opérateur porte un petit stilet plat & mousse dans l’impression faite par la couronne, & il ôte la sciûre avec une fausse tente : il reprend ensuite la couronne ; il continue de scier jusqu’à ce que la piece d’os soit vacillante, & qu’elle puisse être enlevée avec la feuille de myrthe. On a la précaution de relever plusieurs fois la couronne pour la nettoyer, & on examine à chaque fois si l’on scie l’os également : mais il faut avoir beaucoup d’égards à l’épaisseur des os ; & quand on a passé le diploé, on doit aller avec prudence pour ne pas enfoncer l’os sur la dure mere. On s’apperçoit qu’on a scié le diploé, à la résistance qui augmente & à la sciûre blanche que la table interne fournit après celle du diploé qui est rouge.

Toutes les fois que l’on sent de la difficulté & de la résistance à la couronne en tournant l’arbre du trépan, c’est une marque que les petites dents de la couronne s’enfoncent trop ; pour lors on donne un demi-tour de gauche à droite ; & on recommence de nouveau, mais un peu plus légerement.

Quand la piece d’os est enlevée, il faut emporter les inégalités de la circonférence interne du trou, par lesquelles la dure-mere pourroit être blessée dans ses battemens : on se sert à cet effet du couteau lenticulaire. Voyez Couteau lenticulaire.

Quand il y a du sang épanché sur la dure-mere, on recommande, pour en procurer la sortie, de faire faire une grande inspiration au malade, & de lui pincer le nez. Cette méthode n’est pas toujours praticable ; un malade, dans un assoupissement léthargique, n’est pas dans le cas de se prêter à ce qu’on se propose ; d’ailleurs les trépans doivent, autant que faire se peut, être pratiqués aux parties déclives, desorte que les fluides épanchés sortent facilement ; & lorsque cela n’est pas possible, l’expérience a fait voir qu’on étoit obligé d’avoir recours aux injections & aux contre-ouvertures. Voyez Contre-ouverture & injection.

Lorsque le trépan a été appliqué à l’occasion des

pieces d’os qui comprimoient la dure-mere ou qui perçoient les membranes & pénétroient dans le cerveau, il faut relever ces parties avec l’élévatoire. Voyez Elévatoire.

Le pansement de l’opération consiste dans l’application d’une petite piece de linge de la grandeur du trou. (Voyez Syndon) ; de la charpie, des compresses & un bandage convenable. Voyez Couvre-chef.

La matiere dont nous traitons, pourroit donner lieu à des dissertations aussi étendues qu’importantes : on peut consulter à ce sujet les differens traités de Chirurgie, & particulierement le premier volume de l’académie royale de Chirurgie, où l’on trouve plusieurs mémoires, dans lesquels M. Quesnay détermine par des observations très-intéressantes les cas où il faut multiplier les trépans ; les remedes qui conviennent le mieux pour la cure des plaies du cerveau ; les moyens dont on se sert pour hâter l’exfoliation des os du crâne ou pour l’éviter, &c. Nous allons rapporter, d’après le mémoire du trépan dans les cas douteux, les raisons qui peuvent en pareils cas déterminer à recourir au trépan, ou à éviter cette opération.

De tous les signes qui peuvent déterminer à trépaner, il n’y en a point de plus décisifs que les fractures & les enfoncemens du crâne. Cependant il y a des exemples de blessés qui ont guéri dans quelques-uns de ces cas, sans avoir été trépanés. Mais ces observations ne doivent point en imposer ; on doit se défier de toute observation où l’on ne rapporte que le succès, sans parler des indications qui peuvent y conduire : ces observations nous instruisent peu par la pratique, sur-tout quand elles sont contredites par d’autres qui l’emportent infiniment sur elles. Les observateurs éclairés ont remarqué qu’on ne pouvoit se dispenser de l’operation du trépan dans le cas de fracture, que lorsque les pieces des os fracturés étoient assez écartées l’une de l’autre, pour permettre la sortie du sang qui auroit pu s’épancher sur la dure-mere. Il y a des cas où l’écartement d’une suture voisine de la fracture, a dispensé de l’opération du trépan ; mais ces cas méritent une attention singuliere ; car l’épanchement peut se faire des deux côtés de la suture ; & alors l’évacuation ne peut ordinairement se faire que d’un côté, à cause que la dure-mere peut encore rester adhérente vers le bord d’un des os écartés, & retenir le sang qui seroit épanché sous la portion de l’os à laquelle la dure-mere seroit restée attachée. Il faudra donc appliquer le trépan de ce côté malgré l’écartement de la suture. Toute cette doctrine est appuyée sur des observations dont on sent toute la conséquence, & dont il résulte qu’on peut dans certains cas, s’écarter des regles les plus invariables de l’art, mais qu’on ne doit le faire qu’avec beaucoup de connoissance & de circonspection.

Il est un autre cas bien plus embarrassant, même pour les plus grands maîtres ; ce sont les coups à la tête sans lésion apparente aux os, souvent même sans plaie ni contusion aux chairs ni à la peau, lesquels sont suivis d’épanchement sous le crâne, & qui d’autres fois n’en causent point, quoiqu’ils soient accompagnés de circonstances ou d’accidens qui donnent lieu d’en soupçonner. Les accidens qui arrivent dans les blessures de la tête où il n’y a point de fractures, déterminent, lorsqu’ils sont graves, plusieurs praticiens à trépaner. D’autres se contentent de combattre ces accidens par les saignées & les autres remedes qui peuvent servir à les dissiper. Les uns & les autres réussissent souvent ; mais ils se trompent souvent aussi. M. Quesnay, par l’usage qu’il a sçu faire des différentes observations communiquées à l’académie, découvre, dans les succès même, les circonstances ou les particularités qui peuvent aider