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partement, parce que ce météore procede du Soleil. Cet appartement étoit tout enrichi d’or, & sur les plaques de ce métal, on voyoit représentées au naturel avec toutes ses couleurs, dans l’une des faces du bâtiment, la figure de l’arc-en-ciel qui s’étendoit d’une muraille à l’autre.

Le cinquieme & dernier appartement du temple étoit celui du grand sacrificateur, & des autres prêtres qui assistoient au service du temple, & qui devoient être tous du sang royal des Yncas. Cet appartement enrichi d’or, comme les autres, depuis le haut jusqu’au bas, n’étoit destiné ni pour y manger, ni pour y dormir, mais servoit de salle pour y donner audiance, & y déliberer sur les sacrifices qu’il falloit faire, & sur toutes les autres choses qui concernoient le service du temple. (D. J.)

Temples, (Hist. des Arts.) après avoir parlé des temples en littérature, il faut terminer ce vaste sujet par considérer leur mérite & leurs défauts, du côté des beaux arts. Salomon fit construire dans la terre promise un temple magnifique, qui fut l’ornement & la consolation de Jérusalem. Depuis cette époque, le peuple choisi a toujours soupiré pour la montagne de Sion ; mais la décoration de cet édifice n’est pas assez connue, pour que nous puissions la faire entrer dans l’histoire des goûts.

On ne sauroit remonter en ce genre avec certitude, au-delà des Grecs ; l’ouvrage dogmatique le plus ancien que nous ayons dans cet art, est celui de Vitruve, qui vivoit sous Auguste, & qui ne dit presque rien des monumens qui avoient pû précéder ceux de la Grece.

Les Grecs n’ornerent jamais d’enjolivemens de sculpture l’intérieur de leurs temples ; les murs étoient élevés perpendiculairement, & voilà tout ; l’enceinte avoit la figure d’un parallélogramme régulier ; les portes & les frontons étoient sur les deux petits côtés opposés ; il n’y avoit presque que le seul temple de la Vertu qui n’eût point de porte de derriere.

Ces temples qui dans leur simplicité intérieure, pouvoient laisser à l’esprit, le recueillement qu’il doit apporter dans son humiliation ; ces temples, dis-je, étoient au-dehors d’une architecture magnifique. La plûpart étoient environnés de péristiles à plusieurs rangs de colonnes ; les deux petits côtés portoient des frontons ; sur le tympan de ces frontons, on représentoit en bas-relief des combats, & des sacrifices.

Toutes les colonnes étoient à une même hauteur, & on ne les plaça jamais les unes sur les autres ; les temples les plus simples n’avoient que quatre colonnes, c’est-à-dire, deux sur le devant, & deux sur le derriere ; les temples plus ornés étoient entourés de péristiles à un ou deux rangs de colonnes. La profondeur de ces péristiles ne pouvoit produire d’obscurité incommode ; car ces temples n’étoient point éclairés par les côtés ; ils recevoient le jour, ou parce qu’ils étoient découverts, ou par les portes, ou par des croisées pratiquées au-dessus de l’édifice. Quelquefois enfin, le temple étoit séparé des colonnes ; tel étoit à Athènes celui de Jupiter Olympien ; entre le péristile & le temple, il y avoit comme une cour.

Dans les temples de Jupiter, on employoit l’ordre dorique, qui pouvoit rendre la majestueuse simplicité du maître des dieux. On faisoit ceux de Junon d’ordre ionique, dont l’élégance pouvoit convenir à une déesse ; le temple de Diane d’Ephèse avoit un double péristile, & étoit selon quelques auteurs, de ce même ordre ionique, qui par sa légereté pouvoit avoir été choisi comme étant le plus convenable à la divinité des chasseurs. Enfin, on doit dire à la louange des Grecs, qu’ils furent toujours très attentifs dans la construction de leurs temples, à faire

choix des ordres qui convenoient le mieux aux différens caracteres des divinités.

Les Romains qui dans tous les arts, s’étoient efforcés de suivre les traces des Grecs, surent quelquefois égaler leurs maîtres dans l’Architecture. Les richesses immenses de l’empire laissoient aux artistes qui s’y rendoient de toutes parts, la facilité de se livrer à la beauté de leurs compositions, ou des modeles de la Grece, une sorte d’élévation d’ame, qui portoit les Romains à faire élever de superbes édifices ; une politique sage, qui encourageoit la vertu & les talens par des arcs de triomphe, ou par des statues ; en un mot, toutes ces vûes de grandeur, multiplierent étonnemment des monumens respectables, que le tems ni la barbarie n’ont pû détruire encore entierement.

Les temples romains, quoique plus grands & plus magnifiques que ceux de la Grece, avoient à-peu-près les mêmes décorations extérieures. Ceux de Jupiter foudroyant, du ciel, de la terre, & de la lune, étoient découverts. Pour les dieux champêtres, on construisoit des grottes dans le goût rustique. Au milieu de ces temples, on plaçoit la statue du dieu qu’on vouloit honorer ; au pié de la statue, étoit un autel pour les sacrifices ; les autels des dieux célestes étoient fort exhaussés ; ceux des dieux terrestres, étoient un peu plus bas ; & ceux des dieux infernaux, étoient enfoncés.

Les Romains eurent aussi des basiliques d’une belle architecture : c’étoient des lieux publics destinés à assembler le peuple, lorsque les rois ou les principaux rendoient la justice. Ces édifices étoient ornés intérieurement par plusieurs rangs de colonnes. Lorsqu’on eût commis à de petits magistrats le soin & l’emploi de juges, les marchands commencerent à fréquenter les basiliques ; enfin, ces édifices furent destinés à célébrer les mysteres des nouveaux chrétiens.

Dès que le Christianisme eut pris faveur, il abandonna les basiliques, pour decorer intérieurement les églises de son culte ; & ces ornemens intérieurs dont on les chargea, servirent de modele pour toutes celles qu’on fit construire dans la suite. On s’éloigna de la simplicité intérieure des temples antiques ; on n’eut plus d’attention à conserver dans des maisons d’adoration, une sorte de dignité majestueuse, de laquelle les idolâtres ne s’étoient jamais éloignés. Dans la Grece, il n’y avoit qu’un ou deux temples, dont l’intérieur fût orné par des colonnes ; mais ces temples n’étoient point fameux, & ne méritent pas de faire d’exception.

Un temple grec étoit dans la simplicité de quatre murs élevés perpendiculairement ; il étoit entouré de colonnes toutes égales, & qui soutenoient un même entablement. D’un premier regard, on ne disoit point comme dans le gothique, par quelle adresse étonnante a-t-on pû élever un édifice si peu soutenu, tout découpé à jour, & qui cependant dure depuis plusieurs siecles ? Mais plutôt l’esprit se reposant dans la solidité apparente & réelle de toutes les parties, s’occupoit agréablement à développer les sages ressources que l’art avoit su se faire, pour mettre un certain accord entre des beautés constantes, & qui à chaque fois qu’on les voyoit, savoient produire une nouvelle satisfaction.

Lors du renouvellement des arts & des sciences, le goût gothique se trouva généralement répandu dans l’Architecture ; les Artistes ne purent employer les beautés de l’antique, qu’en les rapprochant de la dégradation, que l’instinct habituel faisoit applaudir. Ainsi, en conservant le fond de l’architecture des Goths, on chercha à y introduire les plus belles proportions des anciens.

Dans la construction des églises modernes, on a