dre de S. François, & de deux principaux sénateurs qui sont assistans, & sans le consentement desquels toutes les procédures sont nulles, & les sentences hors d’état d’être mises à exécution.
L’hérésie est presque la seule matiere dont l’inquisition de Venise ait droit de connoître ; les désordres qui suivent l’hérésie, ou qui peuvent l’entretenir, ont des juges séculiers qui prennent connoissance de ces matieres. Tous ceux qui sont profession d’une autre religion que de la catholique, ne sont point soumis à l’inquisition ; & depuis le catalogue des livres défendus, qui fut dressé lorsque la république reçut l’inquisition, il n’est point permis au saint office d’en censurer d’autres que ceux que la république elle-même censure. Outre cela, le sénat entretient deux docteurs qu’on appelle consulteurs d’état, l’un religieux, & l’autre séculier, qui sont chargés d’examiner les bulles, les brefs & les excommunications qui viennent de Rome, & qu’on ne reçoit jamais sans l’approbation de ces deux docteurs.
Le college, le prégadi & le grand conseil font mouvoir l’état. Le college est composé du doge, de ses six conseillers, des trois chefs de la quarantie criminelle, des six sages-grands, de cinq sages de terre-ferme, & des cinq sages de, ordres, en tout vingt-six personnes. Voyez Doge, Quarantie, Sages-grands, &c.
Mais toute l’autorité de la république est partagée entre le sénat ou le prégadi (dont il faut consulter l’article en particulier) & le grand-conseil. Le premier regle souverainement les affaires d’état ; le second dispose absolument de toutes les magistratures. Il a droit de faire de nouvelles lois, d’élire les sénateurs, de confirmer les élections du sénat, de nommer à toutes les charges, de créer les procurateurs de S. Marc, les podestats & les gouverneurs qu’on envoie dans les provinces ; enfin le grand-conseil est l’assemblée générale des nobles, où tous ceux qui ont vingt-cinq ans, & qui ont pris la veste, entrent avec le droit de suffrage. De même tous les membres du college, ceux du conseil des dix, les quarante juges de la quarantie-criminelle, & tous les procurateurs de S. Marc entrent au prégadi, de sorte que son assemblée est d’environ 280 membres, dont une partie a voix délibérative, & le reste n’y est que pour écouter.
Le conseil des dix prend connoissance des affaires criminelles qui arrivent entre les nobles, tant dans la ville que dans le reste de l’état. Voyez Dix conseil des.
Le tribunal des inquisiteurs d’état est composé de trois membres, qui sont deux sénateurs du conseil des dix, & un des conseillers du doge. Ce tribunal fait frémir, & par sa puissance, & parce que les exécutions de ce tribunal sont aussi secretes que leur jugement. Voyez Inquisiteurs d’état.
Pour prévenir les désordres du luxe, le gouvernement de Venise a établi des magistrats appellés sopra-proveditori alle pompe. Ce sont des sénateurs du premier ordre, qui par des ordonnances severes ont réglé la table, le train & les habits de la noblesse vénitienne.
La république prend aussi connoissance des affaires générales & particulieres des religieux & des religieuses. Elle a établi à cet effet trois sénateurs avec une autorité fort étendue sur la discipline extérieure des couvens ; ces trois magistrats ont un capitaine de sbirres qui visite les parloirs, outre quantité d’espions gagés ; mais cette sévérité apparente est plutôt par montre d’un gouvernement exact, & pour empêcher les superieurs ecclésiastiques de s’en mêler, que pour guérir un mal qui ne leur paroît pas moins nécessaire que peu capable de remede, la jeune noblesse vénitienne faisant un de ses plus grands plaisirs du
La république gouverne les états de terre-ferme par des nobles qu’elle y envoie, avec les titres de podestats, provéditeurs, gouverneurs, &c. Elle envoie aussi quelquefois dans les provinces trois des premiers sénateurs, auxquels elle donne le nom d’inquisiteurs de terre-ferme, & qui sont chargés d’écouter les plaintes des sujets contre les gouverneurs, & de leur rendre justice ; mais tout cela n’est qu’une pure ostentation.
Il résulte de la connoissance du gouvernement de Venise, que c’est une aristocratie despotique, & que la liberté y regne moins que dans plusieurs monarchies. Ce sont toujours sous différens noms des magistrats d’un même corps, des magistrats qui ont les mêmes principes, les mêmes vues, la même autorité, exécuteurs des lois & législateurs en même tems. Il n’y a point de contrepoids à la puissance patricienne, point d’encouragement aux plébéïens, qui à proprement parler, sont sous le joug de la noblesse, sans espérance de pouvoir le secouer. (Le chevalier de Jaucourt.)
Venise, état de, (Géog. mod.) l’état de la république de Venise se partage en quatorze provinces, dont il y en a six vers le midi ; savoir le Dogado ou duché de Vemse, le Padouan, le Vicentin, le Véronoise, le Bressan & le Bergamasc. Le Crémasque est au midi du Bressan, & la Polésine de Rovigo est au sud du Crescentin. Les quatre suivantes sont à son nord du midi au septentrion : savoir la Marche Trévisane, le Feltrin, le Bellunèse & le Cadorin. A l’orient de celle-ci sont le Frioul, qui lui est contigu, & l’Istrie sur le golfe de Venise, presque vis-à-vis le Ferrarois. Le Dogado s’étend en long depuis l’embouchure du Lizouzo jusqu’à celle de l’Adige, & comprend les îles des Lagunes, de Venise, de Maran, & tout le quartier qui est vers la côte du golfe, depuis Carvazere jusqu’à Grado, ainsi que plusieurs îles qui sont aux environs de la capitale. (D. J.)
Venise terre de, (Hist. nat.) bolus veneta, nom d’une terre d’un beau rouge, qui s’emploie dans la peinture sous le nom de rouge de Venise. M. Hill observe que cette terre n’est point bolaire, mais une ochre très-fine, douce au toucher, d’un rouge presque aussi vif que celui du minium, & qui colore fortement les doigts. Cette terre est d’un goût astringent, & ne fait point effervescence avec les acides. On la tire de Carinthie d’où elle passe par les mains des Vénitiens qui la falsifient, & qui la débitent au reste de l’Europe pour la peinture. Voyez Hill’s, natural history of fossils.
Vénitiens Nobles, (Hist. mod.) c’est ainsi que l’on nomme à Venise les chefs de la république, parmi lesquels on choisit le doge, les procurateurs de S. Marc, les provéditeurs, les ambassadeurs, & tous ceux qui doivent remplir les fonctions les plus importantes de l’état. On divise les nobles vénitiens en trois classes : la premiere est celle des nobles qu’on nomme elettorali ; dans cette classe sont les douze plus anciennes familles de la république. La seconde classe est celle des familles qui ont été admises aux privileges de la noblesse depuis l’an 1380. Enfin la troisieme classe est celle des nobles qui ont acquis la noblesse pour de l’argent ; on dit qu’il en coute cent mille ducats pour obtenir cette distinction. On distingue à Venise les nobles de terre-ferme qui habitent la partie du continent qui est sujette à la république ; ces derniers ne sont point si considérés que les nobles de Venise qui sont en possession de la souveraineté.
VÉNITIENNE, s. f. (Soierie.) étoffe d’abord fabriquée à Venise, & ensuite imitée en France. Il y en a d’unies, de façonnées, avec de l’or & de l’argent, ou seulement avec de la soie ; c’est une espece de gros-de-tours, dont la tissure est extrémement fine.