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plus bas de terre & plus longs que les autres, de gorge effroyable. Ils heurlent sur la voie. Ils ont le nez dur, & le poil demi-barbets.

* BAUCIS & PHILEMON (Myth.) Il y eut autrefois dans une cabane de la Phrygie un mari & une femme qui s’aimoient. C’étoient Philémon & Baucis. Jupiter & Mercure parcourant la terre en habit de pélerins, arriverent dans la contrée de nos époux : il étoit tard ; & les dieux auroient passé la nuit exposés aux injures de l’air, si Philemon & Baucis n’avoient pas été plus humains que le reste des habitans. Jupiter touché de la piété de Philemon & de Baucis, & irrité de la dureté de leurs voisins, conduisit les époux sur le sommet d’une montagne, d’où ils virent le pays submergé, à l’exception de leur cabane qui devenoit un temple. Jupiter leur ordonna de faire un souhait, & leur jura qu’il seroit accompli sur le champ. Nous voudrions, dirent Philemon & Baucis, servir les dieux dans ce temple, nous aimer toûjours, & mourir en même tems. Ces souhaits méritoient bien d’être écoutés ; aussi le furent-ils. Philemon & Baucis servirent long-tems les dieux dans le temple ; ils s’aimerent jusque dans l’extrème vieillesse ; & un jour qu’ils s’entretenoient à la porte du temple, ils furent métamorphosés en arbre. La Fontaine, Prior, & le docteur Swift, ont mis en vers cette fable : la Fontaine a célébré Philemon & Baucis, d’un style simple & naif, sans presque rien changer au sujet. Prior & Swift en ont fait l’un & l’autre un poeme burlesque & satyrique ; la Fontaine s’est proposé de montrer, que la piété envers les dieux étoit toûjours récompensée : Prior, que nous n’étions pas assez éclairés pour faire un bon souhait ; & Swift, qu’il y a peut-être plus d’inconvénient à changer une cabane en un temple, qu’un temple en une cabane. Que d’instructions dans cette fable ! L’amour conjugal, la tranquillité, & le bonheur, refugiés dans une cabane ; la sensibilité que les indigens & les malheureux ne trouvent que chez les petits ; la cabane changée en temple, parce que les deux époux y rendoient par leur union le culte le plus pur aux dieux ; la simplicité de leurs souhaits, qui montre que le bonheur est dans la médiocrité & dans l’obscurité, & combien les hommes sont insensés de le chercher si loin d’eux-mêmes.

* BAUD, s. m. chasse, race de chiens-courans qui viennent de Barbarie. Ils chassent le cerf. Ils sont ordinairement tout blancs : on les appelle aussi chiens muets, parce qu’ils cessent d’aboyer, quand le cerf vient au change.

* BAUDEQUIN, s. m. (Comm.) petite monnoie, de la valeur de six deniers ou environ, ainsi appellée, à ce qu’on conjecture, d’un baldaquin ou dais sous lequel le roi y étoit représenté. Elle étoit en usage au commencement du quatorzieme siecle.

* BAUDET, s. m. c’est ainsi que les scieurs de planches appellent les treteaux ou chevalets, sur lesquels ils placent leurs pieces élevées pour travailler.

* Baudir les Chiens (chasse) c’est les exciter du cor & de la voix. On baudit aussi les oiseaux.

* BAUDOSE, s. f. espece d’instrument de Musique à plusieurs cordes, dont Aimery du Peyrat, abbé de Moisac, fait mention dans une vie de Charlemagne, manuscrite. Voyez n°. 1343, de la bibliotheque du Roi, quidam baudosam concordabant.

BAUDRIER, s. m. c’est chez les Ceinturiers, une bande de cuir large de quatre ou cinq doigts, le plus souvent enjolivée, qui prend depuis l’épaule droite & se vient rendre au côté gauche, & qui est composée de la bande & de deux pendans, au-travers desquels on passe l’épée.

Le Baudrier (Hist. anc.) est une partie de l’habillement des gens de guerre qui, sert à porter leur épée. Les militaires qui étoient admis aux festins de

l’empereur ou des généraux d’armées, avoient coûtume de quitter leurs baudriers ou ceinturons avant que de se mettre à table. Trebellius Pollion rapporte, que dans un repas que l’empereur Gallien donnoit à plusieurs officiers, le jeune Salonin, fils de ce prince, leur enleva leurs baudriers dorés & constellés, auratos constellatosque balteos. M. Baudelot dans les Mémoires de l’Académie des Belles-Lettres, croit que ces baudriers constellés étoient des ceinturons chargés de pierres précieuses & de lames d’or & d’argent, sur lesquelles étoient gravées quelques figures mystérieuses de signes célestes, suivant les idées superstitieuses de la théologie payenne, ou qui avoient été fabriquées sous l’aspect de quelques constellations. Tertullien en décrivant quelques ceintures semble vouloir parler de ces talismans, latent in cingulis smaragdi. Or Pline & Marcellus Empiricus attribuent beaucoup de vertus aux figures d’aigles & de scarabées qu’on gravoit sur ces pierres, smaragdi. Les gens de guerre aussi superstitieux que d’autres, pouvoient avoir d’autant plus de foi à ces pierres constellées, dont leurs baudriers étoient enrichis, qu’on croyoit communément que c’étoit par la vertu d’un semblable amulete que Milon de Crotone avoit été invincible dans les combats ; & que l’hématite autre espece de pierre précieuse, n’étoit pas moins salutaire pour repousser les ennemis & les vaincre ; recherches que cet académicien appuie des témoignages de plusieurs anciens auteurs. Sans prétendre diminuer le mérite de toutes ces découvertes ingénieuses, j’hasarderai que comme dans le passage de Trebellius Pollion, auratos balteos signifie des baudriers ornés ou enrichis de dorure ; constellatos y signifie tout simplement qu’ils étoient parsemés d’étoiles en broderie, & qu’apparemment Casaubon qui n’y a point entendu de mystere, a crû que ce sens se présentoit de lui-même & n’avoit pas besoin d’explication. (G)

BAUDROIE, rana piscatrix, s. f. (Hist. nat. Zoolog.) poisson de mer ainsi nommé ; parce que sa bouche est si grande qu’on l’a comparée à un baudrier : on lui a donné le nom de rana, parce qu’il ressemble au tétard ; & on a ajoûté celui de piscatrix, parce qu’il est bon pêcheur. La baudroie est plate & de couleur brune ou enfumée ; sa tête est grosse, ronde, applatie & garnie de plusieurs aiguillons ; l’ouverture de la bouche est au-devant de la tête & non pas en dessous ; la mâchoire inférieure & la langue sont plus longues que la mâchoire supérieure, c’est pourquoi la bouche est toûjours ouverte : chaque mâchoire a des dents longues, pointues & recourbées en dedans ; il s’en trouve sur le palais & sur la langue. Les yeux sont placés sur le dessus de la tête, dirigés de côté, & environnés d’aiguillons. Il y a au-devant des yeux deux barbillons, qui sont fort menus à leur naissance & plus gros à leur extrémité ; on prétend que par le moyen de ces barbillons, la baudroie est avertie de l’approche des petits poissons lorsqu’elle est dans le sable ou dans l’eau trouble. Elle a deux nageoires au milieu du corps, une de chaque côté, & une ouverture pour les ouies aussi de chaque côté, recouverte par une peau. La queue est épaisse, charnue, & terminée par une seule nageoire ; il s’en trouve une autre sur le dessus de la queue. Il y a de petits prolongemens charnus, qui pendent des deux côtés de la tête & de la queue, & qui sont placés à quelque distance les uns des autres. Ce poisson fait des œufs ; sa chair est de mauvais goût & de mauvaise odeur. Lorsqu’on a tiré les entrailles par la bouche & qu’on a étendu le corps, on voit le jour au-travers ; & si on met une chandelle au dedans, il paroît fort hideux : c’est pourquoi les Italiens l’ont nommée diavolo di mare. Rondelet. Voyez Poisson. (I)

BAUDROYER, v. act. vieux terme synonyme