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Démonstration de l’armure d’un fond or à cinq lisses de fond & cinq lisses de poil.

Fond or à cinq lisses de satin & quatre de poil : les fonds or de cette espece sont les plus beaux, & ne peuvent se faire qu’en travaillant des deux piés : le satin est armé comme celui du damas, & les cinq marches de ce satin ne font mouvoir aucune lisse de poil. La chaîne est de quatre-vingts-dix portées à l’ordinaire, & le poil de quinze ; avec un peigne de quinze, il faut douze marches pour le poil, y compris les quatre marches de liage qui sont placées du côté gauche, & cinq pour le fond qui sont ordinairement du côté droit. Toutes ces étoffes pourroient cependant être faites du seul pié droit, en lardant les marches de liage, c’est-à-dire en plaçant par ordre chaque marche de cette espece, après celles qui sont destinées pour les coups de navette : mais dans cette étoffe, la chose est impossible, excepté qu’on ne voulût mettre trente-deux marches, parce qu’il faut vingt coups pour que le course des marches de poil se rencontre avec celui du fond. L’accompagnage est à l’ordinaire en ras de saint Maur, & le coup de fond à trois lisses de poil levées, la quatrieme en l’air, comme à la lustrine, s’il n’y a point de rebordure ; & s’il y en a une, on la fait baisser.

Démonstration d’un fond d’or à cinq lisses de satin & cinq lisses de poil.

Selon la disposition du métier & de l’armure, il faut marcher des deux piés chaque coup de fond ; les autres coups du pié gauche seulement. Le course ne peut se rencontrer fini de chaque côté que tous les vingt coups ; d’où il s’ensuit qu’il faut quatre courses du satin, & cinq du poil, ou des marches de l’un & de l’autre.

Tous les fonds d’or dont nous venons de parler, ont un fond dont la couleur est distinguée, soit cramoisi, soit ponceau, soit ratine, qui est un ponceau commun ; les Américains ne les veulent pas autrement : c’est aussi le goût de quelques pays du Nord. Mais il n’en est pas de même des brocards ; ils n’ont point de fond, ou s’ils ont quelques légeres découpures dans la dorure, elles ne paroissent pas. C’est pour cela que les fabriquans 1.o ne les font qu’en gros de Tours, pour éviter la quantité de trames, qui est moins considérable que dans les fonds satin, attendu le croisé qui se trouve à chaque coup ; 2.o mettent les chaînes de la couleur de la dorure pour éviter l’accompagnage. L’accompagnage passe sous les mêmes lacs de la dorure qui domine dans l’étoffe, & son emploi a deux objets ; l’un de cacher le fond de l’étoffe qui perceroit au-travers de la dorure, & la rendroit défectueuse, en prenant la place du fond ; l’autre de donner la liberté au fabriquant de brocher ou de passer une dorure plus fine, qui même se trouve relevée par l’accompagnage qui est dessous.

Tels sont les motifs qui ont fait inventer l’art d’accompagner la dorure, une des idées dans ce genre les plus belles & les plus heureuses. Le brocard ayant le fond de même couleur que la dorure, l’accompagnage devient inutile : il est vrai que dans les fonds or où il entre de l’argent, on ne peut pas accompagner l’un & l’autre : mais dans ce cas, comme c’est très-peu de chose que l’argent qui entre dans un fond or, & que d’ailleurs il n’est point accompagné, on a soin de brocher une dorure plus grosse, & dont la grosseur empêche le fond de percer au-travers. Voilà