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pour reconnoître tout d’un coup les sources où Campanella a puisé la plûpart des idées que nous venons d’exposer. Je ne parle point ici des absurdités qui remplissent les ouvrages de notre Dominiquain : sottise pour sottise, il me semble que les anciennes sont aussi bonnes que les modernes ; & il étoit assez inutile d’étourdir le monde savant par des projets de réforme, lorsqu’on n’avoit que des chimeres à proposer. Voyez Aristotelisme.

Comme le livre où Campanella donne du sentiment aux êtres les plus insensibles, fit beaucoup de bruit dans le tems, on sera peut-être bien aise d’en voir ici l’extrait, d’autant plus que cet ouvrage est extrèmement rare. Il est intitulé de sensu rerum.

1. On ne donne point ce qu’on n’a point ; par conséquent tout ce qui est dans un effet, est aussi dans sa cause : or comme les animaux ont du sentiment, & que le sentiment ne sort point du néant, il faut conclurre que les élémens qui sont les principes des animaux, ont aussi du sentiment ; donc le ciel & la terre sentent.

2. Le sentiment n’est pas seulement une passion : mais il est souvent accompagné d’un raisonnement si prompt, qu’il n’est pas possible de s’en appercevoir.

3. Si le sentiment est une passion, & si les élémens & les êtres qui en sont composés ont des passions, tous les êtres ont donc du sentiment.

4. Sans le sentiment, le monde ne seroit qu’un chaos.

5. L’instinct est une impulsion de la nature, laquelle éprouve quelque sentiment : donc ceux qui prétendent que tous les êtres agissent par instinct, doivent par conséquent supposer qu’ils agissent par sentiment ; car ils accordent que tous les êtres naturels agissent pour une fin : il faut donc qu’ils la connoissent cette fin ; donc l’instinct est une impulsion qui suppose de la connoissance dans la nature.

6. Tous les êtres ont horreur du vuide ; donc ils ont du sentiment, & on peut regarder le monde comme un animal.

7. Il seroit ridicule de dire que le monde n’a point de sentiment, parce qu’il n’a ni piés ni mains, ni nez, ni oreilles, &c. Les mains du monde sont les rayons de lumiere ; ses yeux sont les étoiles, & ses piés ne sont autre chose que la figure ronde qui le rend propre au mouvement.

8. Il paroît par l’origine des animaux, que l’ame est un esprit subtil, chaud, mobile, propre à recevoir des passions, & par conséquent à sentir.

9. Tous les êtres ont une ame, comme on peut s’en convaincre par les choses qui naissent d’elles-mêmes, & qui ont toûjours quelque degré de chaleur.

10. Les choses les plus dures ont un peu de sentiment : les plantes en ont davantage, & les liqueurs encore plus. Le vent & l’air sentent facilement : mais la lumiere & la chaleur sont les êtres qui ont le plus de sentiment, &c.

En voilà assez, ce me semble, pour mettre le lecteur au fait des sentimens de Campanella ; nous finirons cet article en rapportant le jugement que Descartes portoit de cet auteur. « Il y a 15 ans (écrivoit-il au P. Mersenne) que j’ai lu le livre de sensu rerum de Campanella, avec quelques autres traités : mais j’avois trouvé dès-lors si peu de solidité dans ses écrits, que je n’en avois rien gardé dans ma mémoire. Je ne saurois maintenant en dire autre chose, sinon que ceux qui s’égarent en affectant de suivre des chemins extraordinaires, me paroissent beaucoup moins excusables que ceux qui ne s’égarent qu’en compagnie & en suivant les traces de beaucoup d’autres ». (C)

CAMPANULE, s. f. campanula, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur monopétale, faite en forme de cloche, & découpée ; le calice devient un fruit

membraneux partagé en trois loges ou plus, au milieu desquelles il y a un pivot chargé de trois placenta qui soûtiennent plusieurs semences menues ; dans quelques especes, ovales, applaties ; & pour ainsi dire entourées d’un anneau dans quelques autres. Ces semences s’échappent par un trou qui se trouve dans chaque loge. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

La campanule est vivace, & demande une terre à potager avec peu d’eau, beaucoup de soleil, & une culture ordinaire ; elle fleurit en été, & se seme en Septembre & Octobre ; on la soûtient ordinairement par de petites baguettes.

Quelques Botanistes, comme Lemery, l’appellent gantelée ou gants notre-dame ; Bradley dans son calendrier des jardiniers l’appelle miroir de Venus. (K)

La campanula esculenta rapunculus officin. campanula radice esulentâ flore cæruleo, Tournefort, Inst. III. est d’usage en medecine. La semence en est bonne pour les yeux ; son suc est bon pour les maux d’oreille ; la racine se mange dans les salades du printems ; on prétend que prise avec du poivre long, elle fait venir le lait.

La gantelée est une autre campanule d’usage. Voyez Gantelée.

La campanule jaune, bulbocodium vulgatius, J. B. est une espece de narcisse, dont la racine contient beaucoup d’huile & de sel essentiel ; elle est purgative & apéritive, à la dose de deux gros en infusion.

On prétend qu’elle ne vaut rien pour les nerfs ; mais qu’appliquée extérieurement, elle est bonne pour les brûlures, les blessures, & les hernies.

Clusius & Lobel prétendent que toutes les racines de toutes les especes de narcisse excitent le vomissement. (N)

CAMPECHE, ou S. FRANCISCO, (Géog.) ville de l’Amérique septentrionale, dans la nouvelle Espagne, sur la côte orientale de la baie de Campeche. Long. 287. lat. 19. 20.

CAMPEN, (Géog.) ville forte des Provinces-unies des Pays-bas, dans la province d’Overissel. Long. 23. 28. lat. 52. 38.

CAMPER pour uriner, (se) Maréchalerie, est un signe de convalescence dans de certaines maladies où le cheval n’avoit pas la force de se mettre dans la situation ordinaire de chevaux qui urinent. (V)

CAMPER, (Géog) petit royaume d’Asie, dans l’île de Sumatra.

CAMPERCHE, s. f. (Tapissier.) barre de bois, ainsi appellée par les basse-lissiers ou ouvriers en tapisseries de basse-lisse, qui traverse leur métier d’une roine à l’autre, & qui soûtient les sautriaux où sont attachées les cordes des lames. Voyez Basse-lisse.

CAMPESTRE ou CAMPESTE s. f. (Hist. anc.) c’étoit chez les Romains une espece de culotte, ou d’habillement semblable à ce qu’on appelloit autrefois parmi nous tonnelet, bas de soie tourné en rond, ou haut-de-chausses, tels qu’on en voit sur des tableaux du regne d’Henri II. Charles IX. Henri III. ou tels qu’en portent encore aujourd’hui les danseurs de corde. Cette partie de l’habillement que nos ancêtres avoient convertie en parure par sa forme, d’étoffe précieuse garnie de galons & de rubans, n’étoit chez les anciens qu’un tablier destiné à se couvrir dans les exercices du champ de Mars, & qui prenant depuis le nombril jusqu’au milieu des cuisses, laissoit tout le reste du corps à nud ; ou l’on en avoit de faits exprès comme des caleçons, ou on les formoit au besoin avec la tunique. (G)

CAMPHRE, s. m. (Hist. nat. bot. & Chimie.) en Latin camphora ou caphura. C’est une substance blanche, transparente, solide, seche, friable, très-volatile, très-inflammable, d’une odeur très-pénétrante,