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fruit d’Afrique de la grosseur du limon, semblable à la courge, & renfermant des semences, dures, noires, & arcuées par les bouts ; il a la pulpe de la courge, rouge, humide, & d’une acidité agréable, quand elle est récente. Il est bon à manger ; & dans l’Ethiopie on en corrige l’acidité avec le sucre ; il rafraîchit & desaltere : les Ethiopiens le prennent dans toutes les maladies de chaleur, les fievres putrides, & les affections pestilentielles ; alors ou l’on mange sa pulpe avec du sucre, ou l’on boit le suc qu’on en tire par expression, tempéré par le sucre ; ou l’on en fait un sirop dont on prend une dose convenable. Au grand Caire, où l’on ne peut l’avoir dans sa fraîcheur, on réduit sa pulpe en une poudre qui ressemble à de la terre rougeâtre, astringente, & d’un goût qui n’est pas éloigné de celui de la terre de Lemnos. On use de cette poudre dans les fievres pestilentielles, le crachement de sang, les lienteries, les dyssenteries, le flux hépatique, & l’excès des regles : on ordonne alors une dragme de cette terre dans l’eau de plantain ; d’autres la font prendre dans des décoctions ou des infusions appropriées. Prosper Alpin, qui fait mention du fruit, dit avoir vû l’arbre, & l’avoir trouvé assez ressemblant à l’oranger par la grosseur, les feuilles, & le reste de son aspect.

* BAPAUME, (Géog.) ville de France dans l’Artois. Long. 20. 30. 52. lat. 50. 6. 12.

BAPTÊME, s. m. (Théol.) sacrement par lequel on est fait enfant de Dieu & de l’Eglise, & qui a la vertu d’effacer le péché originel dans les enfans, & les péchés actuels dans les adultes.

Le mot baptême en général signifie lotion, immersion, du mot Grec βάπτω, ou βαπτίζω, je lave, je plonge ; & c’est en ce sens que les Juifs appelloient baptême certaines purifications légales qu’ils pratiquoient sur leurs prosélytes après la circoncision. On donne le même nom à celle que pratiquoit S. Jean dans le desert à l’égard des Juifs, comme une disposition de pénitence pour les préparer, soit à la venue de J. C. soit à la réception du baptême que le Messie devoit instituer, & dont le baptême de S. Jean étoit absolument différent, par sa nature, sa forme, son efficace, & sa nécessité, comme le prouvent les Théologiens, contre la prétention des Luthériens & des Calvinistes.

Le baptême de l’Eglise chrétienne est appellé dans les Peres de plusieurs noms relatifs à ses effets spirituels, comme adoption, renaissance, régénération, remission des péchés, renouvellement de l’esprit, vie éternelle, indulgence, absolution ; & par les Grecs, tantôt παλιγγενεσια ψυχῆς, régénération de l’ame, & tantôt χρῖσμα, onction ; soit à cause de celles qu’on y pratique, soit parce qu’il nous consacre à J. C. quelquefois φωτίσμα, & φωτίσμος, illumination, σφραγὶς, signe ou marque ; & par les Latins salut, mystere, sacrement. Cyprian. Augustin. Tertull. Cyrill. Justin. Chrysost. Clem. Alex. Euseb. Ambros. &c.

La définition que nous avons donnée au commencement de cet article ne convient donc au baptême, qu’entant qu’il est le premier des sacreméns de la loi nouvelle : sa matiere éloignée est l’eau naturelle, comme de riviere, de fontaine, de pluie, &c. par conséquent toute autre liqueur, soit artificielle, soit même naturelle, telle que le vin, ne peut être employée comme matiere dans ce sacrement ; & les exemples qu’on cite au contraire, ou sont apocryphes, ou partoient d’une ignorance grossiere, justement condamnée par l’Eglise. Voyez Matiere.

Sa forme dans l’Eglise Greque consiste en ces paroles : baptisatur servus vel serva Dei N in nomine Patris, & Filii, & Spiritus sancti ; & dans l’Eglise Latine, le prêtre en versant de l’eau naturelle sur la tête de la personne qu’il baptise, la nomme d’abord par le nom que lui ont donné ses parrein & marrei-

ne, & prononce ces mots : ego te baptiso, in nomine Patris, & Filii, & Spiritus sancti, amen. Cette forme

étant pleinement exprimée dans les Ecritures, Mat. ch. xxviij. vers. 19. & attestée par les écrits des plus anciens Auteurs ecclésiastiques, il s’ensuit que tout baptême conféré sans une appellation ou invocation expresse des trois personnes de la sainte Trinité, est invalide. La doctrine des conciles y est formelle, sur-tout celle du premier concile d’Arles tenu en 314 ; & l’Eglise a mis une grande distinction entre les hérétiques, qui dans leur baptême conservoient ou corrompoient cette forme ; se contentant à l’égard des premiers, lorsqu’ils revenoient dans son sein, de les recevoir par la cérémonie de l’imposition des mains, & réitérant aux autres le baptême, ou plûtôt leur donnant le sacrement qu’ils n’avoient jamais reçû. Voyez Rebaptisans.

Le baptême a été rejetté totalement par plusieurs anciens hérétiques des premiers siecles, tels que les Ascodrutes, les Marcosiens, les Valentiniens, les Quintilliens, qui pensoient tous que la grace qui est un don spirituel, ne pouvoit être communiquée ni exprimée par des signes sensibles. Les Archontiques le rejettoient comme une mauvaise invention du Dieu Sebahoth, c’est-à-dire, du Dieu des Juifs, qu’ils regardoient comme un mauvais principe. Les Seleuciens & les Hermiens ne vouloient pas qu’on le donnât avec de l’eau : mais ils y employoient le feu, sous prétexte que S. Jean-Baptiste avoit assûré que le Christ baptiseroit ses disciples dans le feu. Les Manichéens & les Pauliciens le rejettoient également, aussi bien que les Massaliens. Le nombre des hérétiques qui ont altéré ou corrompu la forme du baptême, n’est pas moindre : Menandre baptisoit en son propre nom : les Eluséens y invoquoient les démons ; les Montanistes y joignoient le nom de Montan leur chef, & de Priscille leur prophétesse, aux noms sacrés du Pere & du Fils. Les Sabelliens, les Marcosiens, les disciples de Paul de Samosate, les Eunomiens, & quelques autres hérétiques ennemis de la Trinité, ne baptisoient point au nom des trois Personnes divines ; c’est pourquoi l’Eglise rejettoit leur baptême : mais, comme nous l’avons dit, elle admettoit celui des autres hérétiques, pourvû qu’ils n’altérassent point la forme prescrite, quelles que fussent d’ailleurs leurs erreurs sur le fond des mysteres.

La discipline de l’Eglise sur la maniere d’administrer ce sacrement, n’a pas toûjours été la même : autrefois on le donnoit par une triple immersion ; & cet usage a duré jusqu’au xiie siecle. Il est vrai que dans le vie quelques Catholiques d’Espagne s’en tenoient à une seule immersion, de peur, disoient-ils, que les Ariens n’imaginassent que par la triple immersion ils divisoient la Trinité à l’exemple de ces hérétiques : mais cette raison frivole ne changea généralement rien à l’ancien usage. Celui de baptiser par infusion, ou en versant l’eau sur la tête, commença, selon quelques-uns, dans les pays septentrionaux, & s’introduisit en Angleterre vers le ixe siecle. Le concile de Calchut ou de Celchyth, tenu en 816, ordonna que le prêtre ne se contenteroit pas de verser de l’eau sur la tête de l’enfant, mais qu’il la plongeroit dans les fonts baptismaux.

Les Ecrivains ecclésiastiques parlent de plusieurs cérémonies qu’on pratiquoit au baptême, qui sont aujourd’hui abolies, ou dont il ne reste que de légeres traces ; comme de donner aux nouveaux baptisés du lait & du miel dans l’Eglise d’orient ; & dans celle d’occident, du miel & du vin, de les revêtir d’une robe blanche, &c. de ne baptiser qu’à jeûn, de donner immédiatement après le baptême la confirmation & l’eucharistie, &c.

Les Théologiens distinguent trois sortes de baptême ; le baptême d’eau, dont nous venons de parler ;