Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 2.djvu/773

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

grand espace, & écarteront beaucoup moins. Cet avantage est beaucoup plus grand qu’on ne pense ; car lorsqu’il en peut tomber une plus grande quantité dans un logement, dans une batterie, dans les sapes, dans un ouvrage, & dans un chemin couvert, quel desordre ! quelle exécution ces sortes de machines ne feront-elles pas ? En jettant si juste, soit des pierres ou des bombes, il n’y a point de batterie qui ne puisse être démontée, ni de logement qu’une grêle de caillous ne fasse abandonner ». Folard, Traité de l’Attaque des Places des anciens. (Q)

CATAFALQUE, sub. m. (Hist. mod. & Peint.) échaffaud ou élevation : c’est une décoration d’Architecture, de Peinture, & de Sculpture, établie sur une bâtisse de charpente, pour l’appareil & la représentation d’un tombeau que l’on éleve pour les pompes funebres des princes & des rois. Ce mot vient de l’Italien catafalco, qui signifie proprement un échaffaud, & se trouve absolument consacré à l’usage que nous venons de rapporter. (R)

* CATAPPAS, (Hist. nat. bot.) c’est le nom d’une espece d’amandier qui croît communément aux Indes orientales, & sur-tout dans l’île de Java. Comme ses feuilles sont très-grandes, & fournissent beaucoup d’ombrage, les habitans du pays ont soin d’en planter autour de leurs jardins, pour les mettre à couvert des gros vents & des rayons brûlans du soleil. Cet arbre donne une fleur d’un blanc tirant sur le jaune ; son fruit est verd au commencement, & contient un noyau oblong, d’une couleur blanche, qui ressemble à une grosse amande.

* CATARACTAIRES, s. m. plur. (Hist. anc.) il paroît que c’est ainsi qu’on appelloit anciennement les geoliers ou gardes-portes des prisons, & les gardes des prisonniers.

CATARACTE D’EAU, (Physiq.) chûte ou précipice dans le canal ou lit d’une riviere, qui a pour cause des rochers ou autre chose qui arrête le courant, & fait tomber l’eau avec bruit & une grande impétuosité.

Ce mot vient du Grec καταῤῥάσσω, cum impetu decido, je tombe avec impétuosité ; lequel est composé de κατὰ, en en-bas, & de ῥάσσω, dejicio, je jette en-bas.

M. de Maupertuis, dans la relation curieuse & intéressante de son voyage au Nord, parle des cataractes du fleuve de Torneao, & de la maniere dont les gens du pays les franchissent dans des nacelles fort minces. On peut voir aussi dans le tome I. de l’histoire ancienne de M. Rollin, la description abrégée des cataractes du Nil, & de l’intrépidité avec laquelle les peuples du pays s’y exposent.

Strabon appelle aussi cataractes, ce qu’on appelle aujourd’hui cascade ; & ce que nous appellons présentement cataracte, les anciens l’appelloient catadupes. Voyez Cascade & Catadupes.

Dans presque tous les fleuves, dit M. de Buffon, la pente va en diminuant jusqu’à leur embouchûre d’une maniere assez insensible : mais il y en a dont la pente est très-brusque dans certains endroits, ce qui forme ce qu’on appelle une cataracte, qui n’est autre chose qu’une chûte d’eau plus vive que le courant ordinaire du fleuve. Le Rhin, par exemple, a deux cataractes ; l’une à Bilefeld, & l’autre auprès de Schaffouse. Le Nil en a plusieurs, & entr’autres deux qui sont très-violentes & qui tombent de fort haut entre deux montagnes : la riviere Vologda, en Moscovie, a aussi deux cataractes auprès de Ladoga : le Zaïre, fleuve de Congo, commence par une forte cataracte qui tombe du haut d’une montagne : mais la plus fameuse cataracte est celle de la riviere Niagara, en Canada ; elle tombe de cent cinquante-six piés de hauteur perpendiculaire comme un torrent prodigieux, & elle a plus d’un quart de lieue de largeur ;

la brume ou le brouillard que l’eau fait en tombant se voit de cinq lieues, & s’éleve jusqu’aux nues ; il s’y forme un très-bel arc-en-ciel lorsque le soleil donne dessus. Au-dessous de cette cataracte il y a des tournoyemens d’eau si terribles, qu’on ne peut y naviger jusqu’à six milles de distance ; & au-dessus de la cataracte la riviere est beaucoup plus étroite qu’elle ne l’est dans les terres supérieures. Voyez Transact. philosoph. abr. vol. VI. part. II. pag. 119. Voici la description qu’en donne le Pere Charlevoix : « Mon premier soin fut de visiter la plus belle cascade qui soit peut-être dans la nature : mais je reconnus d’abord que le baron de la Hontan s’étoit trompé sur sa hauteur & sur sa figure, de maniere à faire juger qu’il ne l’avoit point vûe.

» Il est certain que si on mesure sa hauteur par les trois montagnes qu’il faut franchir d’abord, il n’y a pas beaucoup à rabattre des six cents piés que lui donne la carte de M. de l’Isle, qui sans doute n’a avancé ce paradoxe que sur la foi du baron de la Hontan & du P. Hennepin : mais après que je fus arrivé au sommet de la troisieme montagne, j’observai que dans l’espace de trois lieues que je fis ensuite jusqu’à cette chûte d’eau, quoiqu’il faille quelquefois monter, il faut encore plus descendre, & c’est à quoi ces voyageurs paroissent n’avoir pas fait assez d’attention. Comme on ne peut approcher la cascade que de côté, ni la voir que de profil, il n’est pas aise d’en mesurer la hauteur avec les instrumens : on a voulu le faire avec une longue corde attachée à une longue perche, & après avoir souvent réiteré cette maniere, on n’a trouvé que cent quinze ou cent vingt piés de profondeur : mais il n’est pas possible de s’assûrer si la perche n’a pas été arrêtée par quelque rocher qui avançoit ; car quoiqu’on l’eût-toûjours retirée mouillée aussi-bien qu’un bout de la corde à quoi elle étoit attachée, cela ne prouve rien, puisque l’eau qui se précipite de la montagne réjaillit fort haut en écumant. Pour moi, après l’avoir considérée de tous les endroits d’où on peut l’examiner à son aise, j’estime qu’on ne sauroit lui donner moins de cent quarante ou cent cinquante piés.

» Quant à sa figure, elle est en fer à cheval, & elle a environ quatre cents pas de circonférence, mais précisément dans son milieu elle est partagée en deux par une île fort étroite & d’un demi-quart de lieue de long, qui y aboutit. Il est vrai que ces deux parties ne tardent pas à se rejoindre ; celle qui étoit de mon côté, & qu’on ne voyoit que de profil, a plusieurs pointes qui avancent : mais celle que je découvrois en face me parut fort unie. Le baron de la Hontan y ajoûte un torrent qui vient de l’ouest : il faut que dans la fonte des neiges les eaux sauvages viennent se décharger là par quelque ravine, &c. ». pag. 332. &c. tom. III.

Il y a, continue M. de Buffon, une cataracte à trois lieues d’Albanie, dans la nouvelle Yorck, qui a environ cinquante piés de hauteur ; & de cette chûte d’eau il s’éleve aussi un brouillard dans lequel on apperçoit un léger arc-en-ciel, qui change de place à mesure qu’on s’en éloigne ou qu’on s’en approche. Voyez Trans. phil. abr. vol. VI. pag. 119.

En général dans tous les pays où le nombre d’hommes n’est pas assez considérable pour former des sociétés policées, les terrains sont plus irréguliers & le lit des fleuves plus étendu, moins égal, & rempli de cataractes. Il a fallu des siecles pour rendre le Rhône & la Loire navigables ; c’est en contenant les eaux, en les dirigeant & en nettoyant le fond des fleuves qu’on leur donne un cours assûré. Dans toutes les terres où il y a peu d’habitans, la nature est brute & quelquefois difforme. Hist. nat. de MM. de Buffon & Daubenton, tom. I.