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Propriétés médicinales. Le cerf contient dans toutes ses parties beaucoup de sel volatil & d’huile : les meules & cornes nouvelles prises en gelée facilitent l’accouchement : ses grandes cornes se rapent ; cette rapure entre dans les tisannes, les gelées, les bouillons & plusieurs poudres & électuaires ; elle est bonne pour arrêter le cours de ventre & le flux hémorrhoïdal ; elle fortifie & restaure : on la distille & on en tire un sel & une huile volatile. On la prépare philosophiquement.

L’os ou cartilage du cœur a passé pour un cordial aléxitere & bon dans les crachemens de sang. On employe la moelle de cerf en liniment dans les rhumatismes, la goutte sciatique, & les fractures. Sa graisse est émolliente, nervale, & résolutive : son sang est sudorifique : on le donne desséché & en poudre à la dose d’un demi-scrupule. Le priape excite, dit-on, la semence & soulage dans la dissenterie ; on l’ordonne dans l’un & l’autre cas depuis un demi-scrupule jusqu’à une drachme. La vessie appliquée guérit la teigne. Au reste, si ces remedes ont quelque efficacité, elle dépend uniquement du sel volatil & de l’huile.

L’huile volatile de corne de cerf est fétide : on la rectifie par plusieurs cohobations ; & lorsqu’elle est claire & sans mauvaise odeur, on l’employe dans les affections nerveuses, les foulures, les paralysies, en liniment sur l’épine & l’origine des nerfs. On fait entrer le sel volatil dans les potions cordiales, sudorifiques, & anti-épileptiques, à la dose d’un scrupule. Il passe pour antispasmodique, & on l’applique sous le nez dans la catalepsie, le carus, & autres maladies, tant soporeuses que convulsives.

Ettmuller & Ludovic vantent l’esprit volatil de corne de cerf comme un grand alexipharmaque, & le recommandent dans les affections malignes.

Usages de quelques parties du cerf dans les Arts. On travaille sa peau ; & au sortir des mains du Chamoiseur & du Mégissier, après qu’elle a été passée en huile, on en fait des gants, des ceinturons, &c. Les Fourreurs en font aussi des manchons. Les Selliers se servent de sa bourre ou du poil que les Mégissiers & Chamoiseurs ont fait tomber de sa peau, pour en rembourrer en partie des selles & des bâts. Les Couteliers refendent sa corne à la scie, & en tirent des manches de couteau. On fait beaucoup plus de cas du bois de cerf enlevé de dessus la tête de cet animal tué, que de celui qu’il met bas quand il est vivant, & qu’on ramasse sur la terre.

On trouve dans les forêts de Bohème des cerfs qui ont au cou de longues touffes ou floccons noirs : ils passent pour plus vigoureux que les autres.

On dit qu’il ne se trouve point de fiel à son foie ; & l’on présume à la couleur & à l’amertume de sa queue, que c’est-là qu’il le porte.

Il y a un si grand nombre de cerfs au royaume de Siam, qu’on en tue plus de cent cinquante mille par an, dont on envoye les peaux au Japon.

Il y a aux Indes occidentales des troupeaux de cerfs privés, que des bergers menent paître dans les champs comme des moutons. Les habitans de ces contrées font des fromages de lait de biche.

Il y a plusieurs especes de cerf. Celle qui mérite le plus d’être remarquée à cause de sa petitesse, est désignée chez les Naturalistes par ces mots, cervus perpusillus, juvencus, Guineensis, & se trouve en Guinée ainsi que la phrase l’indique. Voyez Seba, tom. I. pag. 70. & nos Planches d’Histoire Naturelle, Planc. VII. fig. 3. Voyez aussi sa corne en A, même Planch. Il n’a pas plus d’un demi-pié de hauteur, prise depuis l’extrémité de son pié de devant jusqu’au-dessus de sa tête. Cette hauteur prise du pié de derriere jusqu’au-dessus de la croupe, n’a guere plus de quatre pouces ; & il n’en a pas cinq de la queue au poitrail. Il a la

tête fort grosse & les oreilles fort larges, relativement au reste de son corps ; ses jambes sont très-menues. Sa corne a plus de deux pouces de long sur un demi-pouce de large à la base : elle va toûjours en diminuant & se recourbant un peu. Elle paroît creuse, & porter cinq à six rainures circulaires placées les unes au-dessus des autres, qu’une longue gouttiere qui part presque du bout de la corne vient traverser. Il a l’œil grand, & à en juger par la figure de Seba, le poil un peu hérissé. Il a deux moustaches, & quelques poils de barbe sous la mâchoire inférieure. Voilà tout ce que sa figure indique, & l’histoire ne nous en apprend pas davantage. On voit dans Seba, la patte d’un cerf, plus petit encore que celui que nous venons de décrire.

Cerf de Canada, (Hist. nat. Zoolog.) celui qui a été décrit dans les Mém. de l’Acad. royale des Sc. étoit fort grand : il avoit quatre piés depuis le haut du dos jusqu’à terre. La longueur de son bois étoit de trois piés : les premieres branches que l’on appelle andouillers avoient un pié ; les secondes branches dix pouces, & les autres à proportion. Ces branches étoient au nombre de six à chaque bois, c’est-à-dire à chaque corne. Les cornes étoient recouvertes d’une peau fort dure & garnie d’un poil épais & court de couleur fauve un peu obscure, comme le poil du corps. Celui des cornes étoit détourné en forme d’épi en plusieurs endroits, & la peau avoit une grande quantité de veines & d’arteres remplies de beaucoup de sang ; & la corne étoit creusée en sillons, dans lesquels ces vaisseaux rampoient. On n’observa dans ce cerf de Canada rien de différent de nos cerfs ordinaires.

On a joint à cette description celle de deux biches de Sardaigne. Leur hauteur étoit de deux piés huit pouces depuis le haut du dos jusqu’à terre. Le cou avoit un pié de longueur ; la jambe de derriere depuis le genou jusqu’à l’extrémité du pié, deux piés de longueur, & un pié jusqu’au talon. Le poil étoit de quatre couleurs, fauve, blanc, noir, & gris : blanc sous le ventre & au-dedans des cuisses & des jambes ; fauve-brun sur le dos ; fauve-isabelle sur les flancs ; l’un & l’autre fauve au tronc du corps, étoit marqué de taches blanches de différentes figures. Il y avoit le long du dos deux rangs de ces taches en ligne droite ; les autres étoient parsemées sans ordre. On voyoit de chaque côté une ligne blanche sur les flancs. Le cou & la tête étoient gris. La queue étoit blanche par-dessous & noire par-dessus, le poil ayant six pouces de longueur. Tome III. Part. II. Voyez Quadrupede.

Cerf-volant, lucanus, (Hist. nat.) insecte du genre des scarabées. On lui a donné le nom de cerf-volant, parce qu’il a deux grosses cornes longues, branchues, & faites en quelque façon comme celles du cerf. On l’appelle aussi taureau volant, parce qu’il est très-gros en comparaison des autres insectes de son genre. Il est noir, ou d’un noir rougeâtre, principalement sur les fausses ailes & sur la poitrine. Ses deux cornes sont quelquefois aussi longues que le petit doigt ; elles sont égales, semblables l’une à l’autre, & mobiles ; leur extrémité est divisée en deux branches ; elles ont un rameau & des dentelures sur leur côté intérieur. Les yeux sont durs, prééminens, blanchâtres, & placés à côté des cornes : il y a entre-elles deux autres petites cornes ou antennes faites en forme de massue, & placées au milieu du front, & deux autres plus longues entre les grandes cornes & les yeux. Il a six pattes, dont les deux premieres sont les plus longues & les plus grosses. La tête est plus large que la poitrine. Ces insectes serrent assez fortement ce qu’ils ont saisi avec leurs grosses cornes. Ils vivent encore long-tems après qu’on a séparé la tête du reste du corps. Il y a d’au-