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point exposés à l’air comme les leurs : & parce que nous nous livrons à l’intempérance, & que nous corrompons la sensibilité de nos organes. Par rapport aux prédictions des barometres, M. Halley déja cité trouve que l’élévation du mercure présage le beau tems après la tempête, & que le vent soufflera de l’est ou du nord-est ; que son abaissement marque que ce seront les vents de sud ou d’ouest qui regneront avec la pluie, ou présage des vents de tempêtes, ou tous les deux ; que dans l’orage, si le mercure vient à s’élever, c’est une marque que la tempête passera bien-tôt.

M. Patrick remarque qu’en été l’abaissement du mercure annonce le tonnerre ; & que quand l’orage arrive immédiatement après la chûte du mercure, il est rarement de longue durée : la même chose s’observe du beau tems, s’il arrive immédiatement après l’élévation du mercure. Enfin Derham comparant avec ses observations celles que Scheuczer a faites à Zurich, sur les barometres, remarque que dans le cours de l’année le mercure varie plus à Zurich, quelquefois d’un & même de deux pouces ; & il conclud de-là que la situation de Zurich est de près du d’un mille d’Angleterre plus haute que celle d’Upminster. Il trouve d’ailleurs un accord remarquable entre les observations faites à Zurich & les siennes ; un des barometres suivant à peu près les mêmes variations que l’autre : cependant cet accord n’est pas si parfait que celui des barometres des endroits plus proches, comme ceux de Londres, de Paris, &c.

Causes des phénomenes du barometre. Les hypotheses par lesquelles on a voulu expliquer les phénomenes du barometre sont presque infinies. Il est vrai que le poids de l’atmosphere est généralement regardé comme la cause principale des mouvemens du barometre, & les altérations de l’air comme la cause accidentelle ; cependant cette opinion n’est pas suivie universellement. Un savant auteur, par exemple, regarde les changemens du barometre, comme étant causés par le froid & par la chaleur. Il dit avoir souvent remarqué que dans les orages, &c. quand le mercure est bas, il se divise & pousse en en-haut des particules, qu’il appelle des especes de pellicules ou d’écorchures ; & il soûtient que toutes les fois que le mercure descend, il est plus ou moins dégagé de ces pellicules : que dans ce mouvement les parties du mercure sont resserrées ensemble, & que c’est par cette raison qu’il descend ; que de plus il s’échappe alors de petites particules d’air, qui étoient renfermées dans le mercure, & qui s’élevant dans la partie supérieure du tuyau, forcent le mercure à descendre, les colonnes en étant raccourcies par la sortie de ces particules, & par leur position dans la partie supérieure du tuyau : c’est pourquoi, ajoûte-t-il, le mercure s’éleve dans le tems très-froid à la même hauteur que dans le tems très-chaud, entre les deux tropiques, parce qu’il est dans son état naturel ; & il baisse dans les degrés intermédiaires de chaud & de froid, parce qu’il est resserré, & que ses parties sont comme refoulées & comprimées ensemble. Mais ce sentiment ne rend pas de raison fort vraissemblable des phénomenes.

Les variations de l’atmosphere doivent être regardées comme la cause de celles du barometre : mais il n’est pas aisé de déterminer d’où viennent ces variations dans l’atmosphere, puisqu’il est difficile de trouver un seul principe dans la nature auquel on puisse rapporter des variations si grandes & si irrégulieres. Il est probable que les vents qui soufflent de tel ou tel endroit les occasionnent, de même que les vapeurs & les exhalaisons de la terre : les changemens d’air dans les régions voisines, & même le flux & le reflux que la lune occasionne dans l’air, peuvent y contribuer également.

Cette derniere cause doit certainement entrer parmi celles qui produisent les variations du barometre : mais son effet ne doit pas être fort considérable à cet égard ; quoique l’action de la lune éleve à une hauteur très-grande les eaux de l’Océan. Voici la raison de cette différence : supposons que l’eau s’éleve en pleine mer à la hauteur de 60 piés par l’action de la lune : qu’on mette à la place de l’Océan l’atmosphere ou tel autre fluide qu’on voudra, il est certain qu’il devra s’élever à peu près à la même hauteur ; car l’atmosphere ayant moins de parties que l’Océan, il y aura, à la vérité, une moindre masse à mouvoir, mais aussi la force qui agite cette masse en attirant chacune de ses parties, sera aussi plus petite en même raison. L’air s’élevera donc à la hauteur de 60 piés en montant, & descendra au-dessous de sa hauteur naturelle de l’espace de 60 piés, c’est-à-dire qu’il variera en hauteur de 120 piés en tout. Or le mercure étant 11000 fois plus pesant que l’air, une variation de 120 piés dans une colonne d’air, ne doit faire varier le mercure que d’environ deux lignes. C’est à peu près la quantité dont on trouve qu’il doit hausser sous l’équateur, dans la supposition que le vent d’est y fasse 8 piés par seconde. Or comme il y a une infinité d’autres causes qui font varier le barometre, il n’est pas surprenant que l’on n’ait pas distingué la petite variation que l’action du soleil & de la lune y peuvent produire en élevant ou en abaissant les colonnes de l’atmosphere. Cependant il seroit à souhaiter que les observateurs s’y rendissent attentifs dans la suite. Rech. sur les vents. Paris 1746.

Le savant Halley croit que les vents & les exhalaisons suffisent pour produire les variations du barometre ; & d’après cette opinion il en a donné une explication probable : nous allons donner la substance de son discours sur ce sujet. 1o. Ce sont, dit-il, les vents qui alterent le poids de l’air dans un pays particulier, & cela, soit en apportant ensemble & en accumulant une grande quantité d’air, & en chargeant ainsi l’atmosphere dans un endroit plus que dans l’autre, ce qui arrive lorsque deux vents soufflent en même tems de deux points opposés ; soit en enlevant une partie de l’air, & en déchargeant par-là l’atmosphere d’une partie de son poids, & lui donnant le moyen de s’étendre davantage ; soit enfin en diminuant & soûtenant, pour ainsi dire, une partie de la pression perpendiculaire de l’atmosphere, ce qui arrive toutes les fois qu’un seul vent souffle avec violence vers un seul côté ; puisqu’on a expérimenté qu’un souffle de vent violent, même artificiel, rend l’atmosphere plus légere, & conséquemment fait baisser le mercure dans le tube qui se trouve proche de l’endroit où se fait ce souffle, & même dans un tube qui en est à une certaine distance. Voyez Transactions Philosop. no. 292.

2o. Les parties nitreuses & froides, & même l’air condensé dans les pays du Nord, & chassé dans un autre endroit, chargent l’atmosphere & augmentent sa pression.

3o. Les exhalaisons seches & pesantes de la terre augmentent le poids de l’atmosphere & sa force élastique, de même que nous voyons la pesanteur spécifique des menstrues être augmentée par la dissolution des sels & des métaux.

4o. L’air étant rendu plus pesant & plus fort par les causes que nous venons de rapporter, devient plus capable de supporter des vapeurs, qui étant mêlées intimement avec lui & y surnageant, rendent le tems beau & serein ; au contraire l’air étant rendu plus léger par les causes opposées à celles que nous venons de dire, devient hors d’état de soûtenir les vapeurs dont il est chargé, lesquelles venant à se précipiter en-bas, se ramassent en nuages, qui par la suite se réunissent en gouttes de pluie. Cela étant