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en avoir sous lui la direction, qui donnoit des lettres à ceux qui étoient reçûs maîtres dans quelque science, & auxquels on donnoit pouvoir d’enseigner. Celui qui scelloit leurs lettres fut appellé chancelier à l’instar du chancelier de France, qui scelloit les lettres du roi.

L’institution du chancelier de l’église de Paris doit être fort ancienne, puisque dès le tems d’Imbert, évêque de Paris en 1030, un nommé Durand est qualifié cancellarius ecclesia Parisiensis. Raynald prenoit le même titre en 1032 ; & l’on connoît tous ceux qui ont depuis rempli cette place.

Lorsque les maîtres & régens des différentes écoles de Paris commencerent à former un corps, que l’on appella université, ce qui n’arriva qu’au commencement du xiij. siecle ; alors le chancelier de l’église de Paris prit aussi le titre de chancelier de l’université.

Innocent IV. par deux bulles, l’une datée de la seconde année de son pontificat (c’étoit en 1244), l’autre datée de sept ans après, mande au chancelier de l’église de Paris de faire taxer le loüage des maisons où demeuroient les régens.

Grégoire X. ordonna que le chancelier élû préteroit serment entre les mains de l’évêque & du chapitre.

Suivant une lettre de Nicolas III. qui est au second volume du répertoire des chartes de Paris, sol. 54. ce pape ayant cassé l’élection qui avoit été faite d’Odon de Saint-Denis, chanoine de Paris, pour évêque de la même église, conféra cet évêché à frere Jean de Allodio, de l’ordre des Freres-Prêcheurs, qui étoit alors chancelier de l’église de Paris ; lequel refusa cet évêché, voulant demeurer ferme dans l’état qu’il avoit embrassé.

La place de chancelier de l’université étoit regardée comme si importante, que Boniface VIII. dans le tems de ses démêlés avec Philippe-le-Bel, réserva pour lui-même cette place, afin d’avoir plus d’autorité dans l’université, & principalement sur les docteurs en Théologie, auxquels le chancelier de l’université donne le degré de docteur & la bénédiction, & commission de prêcher par tout le monde.

Mais après la mort de Boniface, l’université ayant desiré de ravoir cet office, Benoît XI. le lui rendit ; & l’on tient que ce fut pour éviter à l’avenir une semblable usurpation, que cet office fut attaché à un chanoine de l’église de Paris : ce que l’on induit d’une bulle de ce pape, qui est dans les registres de l’église de Paris, dans ceux de sainte Génevieve, & dans le livre du recteur, où il y a encore une autre bulle de Grégoire XI. à ce sujet.

Il est néanmoins certain que présentement il n’y a point de canonicat annexé à la dignité de chancelier ; il est membre de l’église sans être du chapitre, à moins qu’il ne fût déjà chanoine, ou qu’il ne le devienne dans la suite ; ce qui est assez ordinaire.

Comme il ne tenoit anciennement son pouvoir que de l’évêque, il ne donnoit la faculté d’exercer & d’enseigner que dans l’étendue de l’évêché. L’abbé de sainte Genevieve qui avoit la direction des écoles publiques du territoire particulier, dont il étoit seigneur spirituel & temporel, avoit son chancelier qui donnoit des licences pour toutes les facultés ; & comme il relevoit immédiatement du saint-siége, le pape lui accorda le privilége de donner à ceux qu’il licentieroit, la faculté d’enseigner par toute la terre. Le chancelier de Notre Dame obtint un semblable pouvoir de Benoît XI. dans le xjv. siecle.

Il étoit quelquefois du nombre de ceux que l’on nommoit pour tenir le parlement. On voit qu’il y étoit le 21 Mai 1375, lorsqu’on y publia l’ordonnance de Charles V. qui fixe la majorité des Rois à quatorze ans.

Le célebre Gerson, qui fut nommé chancelier de

l’université en 1395, fut l’un des plus grands hommes de son tems, & employé dans les négociations les plus importantes.

Le chancelier de l’université fut appellé à sa réformation par les cardinaux de Saint-Mars & de Saint-Martin-aux-Monts, & à celle que fit le cardinal d’Etouteville, légat en France, où il permit au chancelier de l’église de Paris d’absoudre du lien de l’excommunication à l’article de la mort.

Le ministere du chancelier devoit être purement gratuit ; tellement que le 6 Février 1529, l’université vint se plaindre au parlement de ce que son chancelier prenoit de l’argent pour faire des maîtres-ès-arts ou docteurs.

La dignité de chancelier est à la nomination du chapitre.

Le recteur de l’université assiste au chapitre de Notre-Dame à l’installation du chancelier.

Il donne présentement seul la bénédiction de licence dans les facultés de Théologie & de Medecine : par rapport au degré de maître-ès-arts, par un ancien accord fait entre le chancelier de Notre-Dame & celui de sainte Génevieve, les colléges sont divisés en deux lots, qu’on appelle premier & second lot. Le chancelier de Notre-Dame & celui de sainte Génevieve ont chacun leur lot, & chacun d’eux donne la licence aux bacheliers ès arts venans des colléges de son lot ; & comme ces lots ne se trouvent plus parfaitement égaux, à cause des révolutions arrivées dans quelques colléges, ils changent de lot tous les deux ans. Ils font entre eux bourse commune pour les droits de réception.

Lorsque la licence des théologiens & des étudians en Medecine est finie, ils sont présentés au chancelier de Notre-Dame en la salle de l’officialité ; & quelques jours après, il leur donne dans la chapelle de l’archevêché la bénédiction & la dimission ou licence d’enseigner. Il donne aussi en même tems le bonnet de docteur aux théologiens ; ce qui est précédé d’une these qu’on nomme aulique, parce qu’elle se soûtient dans la grande salle de l’archevêché. La cérémonie commence par un discours du chancelier à celui qui doit être reçû docteur : à la fin de ce discours, il lui donne le bonnet. Aussi-tôt le nouveau docteur préside à l’aulique où il argumente le premier, & ensuite le chancelier, &c. L’aulique étant finie, le chancelier & les docteurs accompagnés des bedeaux, menent le nouveau docteur à Notre-Dame, où il fait serment devant l’autel de saint Denis, autrefois de saint Sebastien, qu’il défendra la vérité jusqu’à l’effusion de son sang. Ce serment se fait à genoux ; la seule distinction que l’on observe pour les princes, est qu’on leur présente un carreau pour s’agenouiller.

A l’égard des licentiés en Medecine, après avoir reçu de lui la bénédiction de licence, ils reçoivent ensuite le bonnet de docteur dans leurs écoles, par les mains d’un medecin.

On trouve des lettres de Philippe VI. dit de Valois, du mois d’Août 1331, par lesquelles, en confirmant quelques usages observés de tems immémorial dans la faculté de Medecine, il ordonne que les écoliers en Medecine qui auront fait leur cours, & voudront être maîtres, seront présentés par les maîtres au chancelier de l’église de Paris, qui doit les examiner chacun à part ; & que s’ils se trouvent capables, ils soient licentiés.

Il intervint encore au mois de Juin 1540, un arrêt de reglement à leur sujet ; par lequel, faisant droit sur la requête des licentiandes en la faculté de Medecine, il fut dit que dorénavant, au tems de la mi-carême, la faculté de Medecine s’assembleroit en la salle de l’éveché de Paris, où l’on a accoûtumé de faire les docteurs en Théologie, que le chancelier l’université en l’église de Paris s’y trouvera comme