Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 3.djvu/545

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les assemblées générales du clergé sont de deux sortes ; les grandes, auxquelles chaque province ecclésiastique envoye deux députés du premier ordre & deux du second ; on les appelle les assemblées du contrat ; & les petites assemblées, auxquelles les provinces ne députent qu’un ecclésiastique du premier ordre & un du second ; on les nomme les assemblées des comptes. Celle qu’on appelle du contrat, ou les grandes assemblées, se tiennent tous les dix ans ; & cinq ans après la convocation de l’assemblée du contrat, on convoque une assemblée moins nombreuse, dans laquelle les comptes du receveur général sont examinés. Toutes les assemblées ordinaires sont indiquées dans l’usage au 25 de Mai ; mais elles ont été quelquefois avancées, & quelquefois remises, suivant les circonstances. L’art. 24. du reglement de 1625, porte que les grandes assemblées ne pourront durer plus de six mois, & les assemblées des comptes plus de trois mois. Le Roi fixe le lieu pour chaque assemblée, & pour l’ordinaire elles se tiennent à Paris, dans le couvent des grands Augustins. Il s’en est cependant tenu autrefois à Melun, à S. Germain-en-Laye, & ailleurs. Mém. du clergé, tome VIII. Les députés aux assemblées doivent être dans les ordres, & pourvûs d’un bénéfice dans la province qui les députe. Le rochet & le camail sont l’habit des députés du premier ordre ; & ceux du second y assistent en habit long & en bonnet quarré. Ces députés ont le privilége d’être tenus présens, pendant le tems de l’assemblée, à leurs bénéfices qui demandent résidence, & celui de faire surseoir aussi pendant le même tems les poursuites des procès & des différends intentés contre eux, avant la convocation ou pendant le tems de l’assemblée. Ils ont aussi une rétribution ou taxe pour leur séjour ou leur voyage, que leur paye la chambre ecclésiastique de leur province. Les présidens sont toûjours choisis dans le premier ordre, soit évêques, soit archevêques. L’assemblée nomme aussi des promoteurs & secrétaires tirés des députés du second ordre. Enfin. il est d’usage qu’au commencement & à la fin de chaque assemblée, on nomme une députation pour aller complimenter le Roi. Voyez les mémoires du clergé, tome VIII.

On distingue encore dans le clergé des assemblées extraordinaires, & il y en a de deux sortes ; les unes sont générales, & sont convoquées dans la forme usitée pour la convocation des assemblées ordinaires ; les autres, qu’on peut appeller des assemblées extraordinaires particulieres, se font sans solennités ; les provinces n’y envoyent point leurs députés, & les prélats qui les composent n’ont souvent ni l’ordre ni la permission du Roi de s’assembler. La convocation des assemblées extraordinaires particulieres se fait dans cette forme : lorsqu’il se présente quelque cas extraordinaire qui intéresse l’Eglise, les agens en donnent avis aux évêques qui sont à Paris ou en cour ; le plus ancien des archevêques, ou évêques, s’il ne s’y trouve point d’archevêque, donne ses ordres aux agens d’envoyer des billets de convocation à tous ces prélats. Cette forme est expliquée dans le procès verbal de l’assemblée de 1650. Celle de 1655 a reglé que les évêques in partibus ne seroient point appellés à ces sortes d’assemblées, mais seulement les coadjuteurs d’évêques, & les anciens évêques qui se sont démis. Elles peuvent faire des députations au Roi, & être d’une très-grande utilité, quoiqu’elles ne puissent pas statuer sur bien des choses avec la même autorité ni la même plénitude de pouvoir que les assemblées ordinaires du clergé. Voy. Agens du Clergé. Voyez aussi les mém. du clergé, tome VIII. Et M. Fleury, mém. des affaires du clergé de France, inséré à la suite de l’instit. au droit ecclés. tome II. p. 264. & suiv. (G)

Réflexions tirées de l’esprit des lois sur la puissance ecclésiastique. 1. Autant le pouvoir du clergé est dangereux dans une république, autant est-il convenable dans une monarchie, sur-tout si elle tend au despotisme. Où en seroient l’Espagne & le Portugal depuis la perte de leurs lois, sans ce pouvoir qui arrête seul la puissance arbitraire ? barriere toûjours bonne quand il n’y en a point d’autres : car comme le despotisme cause à la nature des maux effroyables, le mal même qui le limiteroit seroit un bien.

2. Dès les commencemens de la premiere race, on voit les chefs de l’Eglise arbitres des jugemens ; ils assistent aux assemblées de la nation ; ils influent puissamment sur les résolutions des rois ; on leur avoit accordé des priviléges ; ils étoient comblés de biens. L’auteur que nous citons rend raison de cette autorité.

3. Le clergé a tant reçû pendant les trois races, qu’on a été jusqu’à dire qu’on lui a donné la valeur de tous les biens du royaume : mais si la nation lui donna trop alors, elle trouva depuis les moyens de lui reprendre. Le clergé a toûjours acquis ; il a toûjours rendu ; il acquiert encore. Voyez l’esprit des lois.

Clergés, (Jurispr.) dans quelques anciennes ordonnances, signifie les gens de justice, comme en l’ordonnance de Charles V. de l’an 1356, art. 1. On les appelloit ainsi comme étant gens lettrés ; car anciennement les clercs ou ecclésiastiques étant presque les seuls qui eussent quelque connoissance des lettres, on appelloit clerc tout homme de lettres, & la science se nommoit clergie. (A)

CLERGIE, (Jurisprud.) anciennement signifioit science, à cause que les clercs étoient alors les seuls qui fussent savans : & comme toute écriture étoit considérée comme une science, & que ceux qui écrivoient étoient la plûpart clercs ou qualifiés tels, & singulierement ceux qui faisoient la fonction de greffiers ; on appella aussi clergies les greffes des jurisdictions. C’est ainsi qu’ils sont nommés dans les anciennes ordonnances. Philippe de Valois, par des lettres du 10 Septembre 1331, rappelle une ordonnance précédente, portant que les écritures, clergies, & notairies de toutes les sénéchaussées, bailliages & prevôtés, seroient réunies à son domaine, & vendues par cris & subhastations, c’est-à-dire données à ferme au plus offrant, comme les autres fermes du domaine. Le même prince ordonna, par un mandement du 13 Mai 1347, que les clergies des bailliages & les prévôtés royales seroient données en garde, & que les clergies des prévôtés seroient ajoûtées aux prevôtés, & données aux prevôts en diminution de leurs gages. Charles V. étant régent du royaume, fit une ordonnance au mois de Mars 1356. portant entre autres choses que les clergies ne seroient plus vendues ni données à ferme comme par le passé, parce que les fermiers commettoient des exactions sur le peuple, mais qu’elles seroient données à garde, par le conseil des gens du pays & des environs. Cet article ne fut pas long-tems observé, car le même prince ordonna le 4 Septembre 1357 aux gens des comptes, d’affermer les prevôtés, écritures, & tabellionages ; or ces termes écritures étoient synonymes de clergies ou greffes. Il est dit qu’on les donnera au plus offrant, mais néanmoins à des personnes idoines. On pratiquoit encore la même chose en 1370, même pour les greffes de villes, suivant une autre ordonnance de Charles V. du 6 Février, portant que les échevins de Tournai donneront les offices de la ville en la forme usitée anciennement, excepté la clergie des échevins, qui sera donnée à ferme au profit de la ville. Le greffe de la ville