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les sont l’urgente nécessité, l’âge avancé, l’infirmité habituelle, la maladie, les ordres du Roi qui retiennent l’évêque dans un autre endroit.

Les conciles provinciaux, suivant le canon v. du concile de Nicée, se tenoient deux fois tous les ans, une fois au printems, une fois à l’automne. Le premier devoit se tenir avant le carême, afin, dit le concile, que toute animosité étant effacée, on présente a Dieu une offrande pure. Ce canon a été long-tems en vigueur ; & il n’étoit pas difficile de l’observer, parce que le nombre des évêques étoit grand sous chaque métropolitain, ensorte qu’ils pouvoient venir tour-à-tour, leurs confreres résidans pendant ce tems-là, & prenans soin de l’église des absens. Les conciles furent négligés dans la suite : les évêques les moins zélés craignoient la fatigue & la dépense de ces fréquens voyages ; & vers le viij. siecle on se réduisit à les obliger de tenir au moins un concile par an ; c’est l’ordonnance du concile de Trulle, qui fut confirmée par le septieme & le huitieme concile œcuménique. En Occident les conciles provinciaux furent rares sous la seconde race de nos rois, tant à cause des assemblées d’état qui se tenoient deux fois par an, & où tous les évêques étoient obligés de se trouver, qu’à cause des guerres civiles, des incursions des Normands qui infesterent le royaume depuis Charles-le-Chauve, & de la division des petits seigneurs qui fut un nouvel obstacle. Ainsi dans le onzieme & douzieme siecle on ne tint presque pas de ces conciles. Néanmoins Innocent III. au concile de Latran renouvella la regle des conciles annuels, mais elle fut mal observée. Dans le siecle suivant un concile de Valence en Espagne les ordonna seulement tous les deux ans, jusqu’à ce qu’enfin le concile de Bâle réduisit à trois ans l’obligation de les tenir ; ce que le concile de Trente a confirmé sous les peines portées par les canons. En France l’édit de Melun, celui de 1610, & une déclaration de 1646, ont ordonné l’exécution du decret du concile de Trente. Des lois aussi sages ont été sans aucun fruit & n’ont pû faire revivre la coûtume de célébrer, sinon tous les trois ans, du moins fréquemment, des conciles provinciaux. De nos jours il ne s’en est point tenu d’autre que celui d’Embrun en 1728, où un des prélats les plus distingués parmi les appellans de la constitution Unigenitus, fut condamné, suspendu des fonctions d’évêque & de prêtre, & réduit à la communion laïque.

Les conciles diocésains, qu’on appelle proprement synodes, suivant l’usage moderne, sont ceux qui sont célébrés par chaque évêque, & composés des abbés, des prêtres, diacres, & autres clercs de son diocese. Le canon vj. du seizieme concile de Tolede nous apprend la raison pour laquelle on tient ces sortes de conciles ; c’est afin, dit-il, que l’évêque notifie à son clergé & à ses oüailles tout ce qui s’est passé & tout ce qui a été décidé au concile provincial ; & l’évêque qui manque à ce devoir est privé de la communion pendant deux mois. Mais quoique les conciles provinciaux ne soient plus en usage, néanmoins on tient encore les synodes, & on doit les célébrer tous les ans dans chaque diocese ; c’est là principalement que les prélats veillent à réformer ou à prévenir les abus.

Nous n’en dirons pas davantage sur les conciles particuliers. Au reste nous croyons n’avoir rien avancé dans tout cet article des conciles (telle a été du moins notre intention), qui ne soit conforme à l’esprit de la Religion, aux maximes du royaume, & qu’on ne puisse concilier avec le vrai respect dû au saint siége. Cet article est de M. Bouchaud, Docteur aggregé de la Faculté de Droit.

CONCILIABULE, (Jurisp.) diminutif de concile. Voyez Concile. Il se dit en général de petits con-

ciles tenus par des hérétiques, contre les regles & les formalités ordinaires de la discipline de l’Église.

* Conciliabule, s. m. (Hist. anc.) conciliabulum, endroit d’une province où les préteurs, proconsuls, propréteurs, faisoient assembler le peuple des pays adjacens pour leur rendre la justice. On y tenoit aussi des marchés indiqués par les mêmes magistrats, & on appelloit ces lieux conciliabula, & non fora. Par la suite ce droit fut reservé aux villes municipales.

* CONCLAMATION, s. f. (Hist. anc.) On appelloit ainsi le signal qu’on donnoit aux soldats Romains pour plier bagage & décamper, d’où l’on fit l’expression conclamare vasa : conclamari ad arma étoit au contraire le signal de se tenir prêts à donner ; les soldats répondoient par des cris à cette conclamation. Conclamen a encore une autre acception dans les anciens auteurs Latins : lorsque quelqu’un étoit mort, on l’appelloit trois fois par son nom ; & pour signifier qu’il n’avoit point répondu parce qu’il étoit décédé, on disoit, conclamatum est.

C’est dans ce sens, pris au figuré, que quelques auteurs ont dit, de republicâ Romanâ conclamatum est ; pour dire, la république Romaine n’est plus.

CONCLAVE, s. m. (Hist. mod. ecclés.) assemblée de tous les cardinaux qui sont à Rome pour faire l’élection du pape. Voyez Pape, Election, &c.

Le conclave n’a commencé qu’en 1270. Clément IV. étant mort à Viterbe en 1268, les difficultés qui survinrent à l’occasion de l’élection de son successeur, déterminerent les cardinaux à se séparer, & à abandonner Viterbe. Les habitans de cette ville ayant eu connoissance de cette résolution, fermerent les portes de la ville par le conseil de S. Ronaventure, enfermerent les cardinaux dans le palais, & leur firent savoir qu’ils n’en sortiroient point que l’élection ne fût faite. C’est de-là qu’est venu la coûtume de renfermer les cardinaux dans un seul palais pour l’élection d’un pape.

Le conclave est aussi le lieu où se fait l’élection du pape. C’est une partie du palais du vatican que l’on choisit, selon la diversité des saisons. Il est composé de salles, de chambres, & de corridors qui se rencontrent en cet endroit, & les salles & les chambres sont partagées en plusieurs petites cellules pour les cardinaux ; telle salle contiendra six chambres, & autant pour les conclavistes, & on en laisse quelques-unes de libres pour y faire du feu, de sorte que les chambres des cardinaux n’ont point de cheminée : elles sont toutes meublées fort modestement, d’une même serge verte ou violette : les armes sont sur la porte des chambres, qui sont presque toutes obscures à cause que toutes les fenêtres sont murées, à la reserve du panneau d’en-haut. Il y a plusieurs officiers, comme medecins, & chaque cardinal a deux conclavistes, ou trois s’il est malade & qu’il le demande. Ils font serment de ne point révéler les secrets du conclave. On les reconnoît le lendemain de la clôture. Il y a d’autres serviteurs avec une casaque violette pour les usages communs. Les conclavistes ont tous une robe de chambre conforme. Il y a un guichet à la porte du conclave que l’on ouvre pour donner audience. Il y a cinq maîtres de cérémonies qui joüissent de ce bienfait ; chaque cardinal leur donne tous les jours deux pistoles, outre quelque plat de régal. Relat. du conclave d’Alexandre VII.

Dans l’interregne, le sacré collége prétend qu’il lui est dû plus de respect qu’à la personne même du pape, parce qu’étant composé de toutes les nations Chrétiennes, il représente toute la hiérarchie de l’Église. C’est pour cette raison que les ambassadeurs allant à l’audience du collége mettent un genou en terre, & ne se levent qu’après que le cardinal doyen leur a fait signe.