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des voitures par terre, de la confiscation du bœuf attaché du côté droit ; on trouve une semblable ordonnance de Pepin, dont l’année est incertaine, mais que l’on croit être de l’an 744.

Du tems de Philippe V. & même avant, les confiscations qui échéyoient au roi, devoient être employées à payer les aumônes dûes sur le thrésor. Il n’en pouvoit faire don à héritage, c’est-à-dire, à perpétuité, que dans son grand-conseil ; il fut même reglé depuis que l’on ne donneroit plus les biens confisqués, mais seulement une somme préfixe sur ces biens, lesquels seroient vendus. Le roi devoit mettre hors de sa main dans l’an & jour les biens confisqués dans les terres des seigneurs, & les remettre à des personnes qui pûssent s’acquitter des devoirs féodaux, ou en indemniser les seigneurs ; & quand il les indemnisoit, ses officiers faisoient hommage pour lui. La confiscation des monnoies étrangeres fut accordée aux seigneurs hauts-justiciers dans leurs terres, lorsque c’étoient leurs officiers qui avoient saisi : le roi s’en réserva seulement la moitié, déduction faite sur le total du quart accordé au dénonciateur. Le chancelier ne devoit sceller aucun don de confiscation qu’il n’eût déclaré au conseil ce que la chose donnée pouvoit valoir par an.

A Limoges la confiscation appartenoit au vicomte, à moins que quelques habitans ne fussent depuis 30 ans en possession de les percevoir.

A Ville-franche en Périgord, les biens d’un homicide condamné à mort appartenoient au roi, ses dettes préalablement payées ; mais lorsqu’un homme y étoit pendu pour vol, ses dettes payées, le roi prenoit dix francs sur ses biens, & le reste passoit à ses héritiers.

A Langres la veuve d’un homme exécuté à mort pour crime reprenoit ses biens & son doüaire, & partie dans les acquêts & dans les meubles, comme elle eût fait si son mari fût mort naturellement. Si c’étoit une femme qui fût exécutée à mort pour crime, l’evêque de Langres avoit par droit de confiscation la portion des biens du mari, que les héritiers de cette femme auroient eue si elle fût morte naturellement avant lui.

Lorsqu’un bourgeois ou habitant de Tournay blessoit ou tuoit un étranger qui l’avoit attaqué, il n’étoit point puni, & ses biens n’étoient point confisqués ; parce que les biens d’un étranger qui en se défendant auroit tué un bourgeois ou un habitant de Tournay n’auroient pas été confisqués, ainsi que cela est expliqué dans des lettres de Charles V. du 20 Janvier 1370.

A Avesnes où la seigneurie étoit partagée entre le dauphin & d’autres seigneurs, en cas de contravention par rapport au vin, l’amende étoit pour les seigneurs particuliers, & le vin étoit pour le dauphin.

Il y avoit aussi un usage singulier à Saint-Amand-en-Peule, diocèse de Tournay : anciennement les maisons des bourgeois qui étoient condamnés à mort étoient brûlées, au moyen dequoi leurs biens n’étoient pas confisqués ; mais il fut ordonné en 1366 que les maisons ne seroient plus brûlées, & que leurs héritiers ou ayans cause, pourroient les racheter payant dix livres pour une maison de pierre, & 60 sols pour une maison de bois ou d’autre matiere.

Les confiscations avoient été destinées pour les dépenses de l’ordre de l’Etoile, & pour les réparations du Palais ; mais en 1358 Charles V. lors régent du royaume, ordonna qu’elles seroient employées pour la rançon du roi Jean.

L’usage n’est pas encore uniforme dans tout le royaume.

Dans les pays de droit écrit, la confiscation n’a pas lieu, si ce n’est pour crime de lese-majesté divine & humaine. Il faut aussi en excepter le parlement de Toulouse, dans tout le ressort duquel la confiscation a lieu suivant le droit commun ; mais ce parlement reservoit autrefois la moitié des biens du condamné à ses enfans. Présentement il ne leur en accorde que le tiers : la femme du condamné est admise au partage de ce tiers avec les enfans ; & quand il n’y a point d’enfans, elle profite seule de ce tiers ; elle n’en perd pas même la propriété en se remariant.

A l’égard du pays coûtumier, on distingue les coûtumes en cinq classes, par rapport à la confiscation.

La premiere est composée de quelques coûtumes, qui ne l’admettent que dans le cas du crime de lese-majesté divine & humaine : telles sont les coûtumes de Berry, Touraine, Laudunois, la Rochelle, Angoumois, Calais, Boulenois, Lille, Tournay, Cambray, Bayonne, Saint-Sever.

La seconde est, des villes d’Arras, Lille & Saint-Omer, où par un privilege particulier la confiscation n’a lieu qu’en deux cas, sçavoir pour hérésie & lese-majesté.

La troisieme est des coûtumes qui admettent la confiscation pour les meubles seulement, & non pour les immeubles, telles que les coûtumes de Normandie, Bretagne, Anjou, Maine, Poitou, Ponthieu, le Perche.

La quatrieme comprend la coûtume de Paris, & les autres coûtumes semblables qui forment le plus grand nombre, lesquelles posent pour maxime que, qui confisque le corps confisque les biens.

La cinquieme classe enfin est composée des coûtumes qui n’ont point de disposition sur cette matiere, & dans lesquelles la confiscation n’a point lieu, à moins qu’elle ne soit prononcée dans les pays où la confiscation est admise : elle a lieu au profit du roi pour les biens situés dans l’étendue des justices royales, & au profit des seigneurs hauts-justiciers, pour les biens qui sont situés dans l’étendue de leur haute-justice, quand même la condamnation auroit été prononcée par le juge royal ; de maniere que les biens d’un condamné peuvent appartenir partie au roi, & partie à differens seigneurs, chacun d’eux n’ayant droit de prendre que ce qui est situé dans sa haute-justice ; mais sur les confiscations qui appartiennent aux seigneurs hauts-justiciers, on leve une amende au profit du roi, pour réparation du crime envers le public.

On préleve aussi les dettes du condamné sur les biens confisqués.

Lorsqu’un usufruitier jouit de la haute-justice, il a les confiscations, attendu qu’elles font partie des fruits.

Il est encore à remarquer que dans cette matiere, les dettes actives suivent le domicile du condamné : mais les meubles ne suivent pas la personne ni le domicile du condamné ; ils appartiennent au roi, ou autre seigneur dans la justice duquel ils se trouvent de sait ; desorte que s’il y en a dans plusieurs justices appartenantes à différens seigneurs, chacun ne prend que les meubles situés dans sa justice, comme cela se pratique pour les immeubles.

On trouve cependant une décision du conseil du premier Décembre 1742, qui adjugea au fermier du domaine de Paris tous les meubles d’un condamné domicilié à Paris, même ceux qu’il avoit à Versailles, à l’exclusion du fermier du domaine de Versailles ; mais cela fut sans doute fondé sur ce que le roi est également seigneur de Paris & de Versailles, ainsi cela ne détruit point le principe que l’on a posé, qui n’a lieu qu’entre deux seigneurs différens.

Il y a seulement une exception pour le crime de