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mise pour exercer la justice en la cour des aides de Rouen. Par l’édit de Mars 1717, portant suppression de la chambre de justice, & par les lettres patentes du 29 Mai suivant, le Roi a renvoyé en la premiere chambre de la cour des aides, les saisies réelles ou mobiliaires faites ou à faire en exécution des rôles & des condamnations prononcées en la chambre de justice ; ensemble les adjudications & discussions qui pourroient être faites en conséquence ; & les appellations & exécutions des sentences rendues par les subdélégués de la chambre de justice ; & des saisies faites à la requête des substituts du procureur général de cette chambre.

Cette cour a le droit, ainsi que les autres cours souveraines, de faire des réglemens pour l’exercice & manutention de la justice, ainsi que pour l’exécution & interprétation des lois & ordonnances dans toute l’étendue de son ressort : elle vérifie les ordonnances, édits, déclarations, & lettres patentes, qui forment le droit général du royaume. Beaucoup de traités de paix y ont été enregistrés. Elle enregistre aussi les provisions des chanceliers ; & c’est à ses grandes audiences qu’elle en fait faire la publication, dans la même forme que cela se pratique au parlement.

Par l’édit de Mars 1551, portant création de la seconde chambre, & par celui de Juin 1636, qui confirme la troisieme chambre, cette cour a le même privilége que le parlement, de pouvoir seule juger les officiers qui la composent lorsqu’ils sont poursuivis extraordinairement pour crimes ; ce qui a été entr’autres confirmé sous Louis XIV. par le renvoi fait à la cour des aides du procès de M. le président de Maridor, qui avoit commencé à lui être fait en la chambre de justice de l’année 1661.

Suivant toutes les anciennes ordonnances elle a toute jurisdiction & correction, non-seulement sur les officiers des siéges de son ressort, mais aussi sur les thrésoriers, receveurs, collecteurs, & leurs commis, dans ce qui regarde les fonctions de leurs charges, offices ; & commissions.

La cour des aides a pour cet effet son pilori ou poteau dans la cour du palais, au bas de l’escalier de la sainte-Chapelle, comme le parlement a le sien au bas de l’escalier du mai ; & ses jugemens portant condamnation de mort ou autres peines, s’exécutent aussi, tant à Paris que dans toutes les autres villes & lieux de son ressort, dans les places où l’on a coûtume de faire les autres exécutions.

Outre le privilége qu’ont les officiers de cette cour, de ne pouvoir être jugés ailleurs en matiere criminelle, les présidens, conseillers, gens du Roi, greffiers en chef, secrétaires du Roi près la cour, & premier huissier, joüissent de la noblesse au premier degré : sur quoi il faut observer qu’en 1645 le Roi ayant accordé la noblesse, tant à la cour des aides, qu’au parlement, à la chambre des comptes, & au grand-conseil, ce privilége qui avoit été renouvellé en 1659, fut révoqué par l’édit de Juillet 1669, portant réglement pour les offices de judicature du royaume, & fut depuis rétabli ; savoir, pour le parlement, par édit de Novembre 1690 ; pour la cour des aides, par édit de Mars 1691 ; pour la chambre des comptes, par celui d’Avril 1704 ; & pour le grand-conseil, par celui d’Août 1717.

Les mêmes officiers de la cour des aides joüissent encore, suivant l’édit de Mars 1691, de l’exemption des droits seigneuriaux dans la mouvance du Roi, tant en achetant qu’en vendant.

La noblesse n’a été accordée aux substituts du procureur général de la cour des aides, que par l’édit de Novembre 1704.

Les officiers de la cour des aides joüissent du franc-salé ; ils sont commensaux de la maison du Roi, & c’est à ce titre qu’ils ont droit de deuil à la mort des

Rois, & qu’ils assistent à leur enterrement en robes noires, à la différence du parlement qui y assiste en robes rouges.

Les présidens, conseillers, avocats, & procureurs généraux de la cour des aides, doivent nécessairement, suivant l’ordonnance donnée à Fontainebleau au mois de Juin 1549, être interrogés & subir pareil examen sur la loi donnée que ceux des parlemens, attendu, dit cette ordonnance, qu’elle est cour souveraine, & juge en dernier ressort de toutes les causes dont la connoissance lui est attribuée, & de si long-tems qu’il n’est mémoire du contraire. Et par la déclaration du 27 Avril 1627, registrée en parlement le 20 Décembre 1635, ils ont le privilége d’être reçûs sans subir nouvel examen, lorsqu’ils sont pourvûs d’offices du parlement ou de maîtres des requêtes.

L’habit de cérémonie de MM. de la cour des aides est, pour M. le premier président & pour les autres présidens, la robe de velours noir, avec le chaperon de la même étoffe fourré d’hermine. Les conseillers, gens du Roi, & greffiers en chef, portent la robe rouge ; & suivant l’ancien usage, ils doivent porter sur la robe rouge un chaperon noir à longue cornette, ainsi que cela fut réglé par Henri II. le 7 Janvier 1552. Ce chaperon, quoique noir, n’est pas une marque de deuil ; & l’on ne doit pas croire que la couleur du chaperon en diminue la dignité, parce que cela vient de ce que MM. de la cour des aides ont toûjours conservé l’ancien usage, & porté la robe rouge avec le chaperon noir, comme on la portoit vers le milieu du xvj. siecle. En effet, l’on voit sur d’anciennes vitres plusieurs conseillers au parlement qui sont ainsi représentés, c’est-à-dire en robes rouges avec le chaperon noir. Dans l’église de Champigni sur Marne, l’on y voit un Bochart ainsi habillé ; & à S. Benoît à Paris, au bas d’un retable d’autel d’une chapelle, deux conseillers au parlement que l’on a découverts par leurs armes se nommer d’Origni, sont aussi en robes rouges avec un chaperon noir fourré d’hermine. Cela se pratiquoit ainsi, parce que le chaperon étant alors la couverture de la tête & des épaules, on ne vouloit pas exposer à la pluie de l’écarlate ; & c’est de-là que le premier président du parlement étant réputé venir de son hôtel, qui avant M. de Harlai n’étoit pas dans l’enclos du palais, porte le chaperon noir sans hermine sur sa robe rouge aux petites audiences qui se donnent avant le rôle. Présentement les conseillers de la cour des aides portent la robe rouge sans chaperon ; & ce qui est remarquable par rapport à leur habillement de cérémonie, c’est qu’aux pompes funebres des Rois & des Reines ils y assistent en robes noires & de deuil, quoique le parlement y soit en robes rouges ; ce qui vient de ce que MM. de la cour des aides ont en cette occasion droit de deuil, comme commensaux de la maison du Roi. Il survint à ce sujet un incident en 1683, pour l’enterrement de la Reine épouse de Louis XIV. la lettre de cachet adressée à la cour des aides pour y assister, portoit que ce seroit en robes rouges : mais cette cour ayant remontré au Roi que ce n’étoit pas l’usage, le Roi déclara que son intention n’étoit pas d’innover, & en conséquence cette cour assista aux services à S. Denis & à Notre-Dame en robes noires de deuil.

Pour ce qui est des autres cérémonies, comme aux entrées des Rois & Reines, aux Te Deum, processions, & autres cérémonies publiques, les présidens & conseillers y assistent avec les robes de cérémonie telles qu’elles sont marquées ci-dessus.

Il y a par an deux cérémonies ordinaires auxquelles la cour des aides assiste : la premiere le 22 Mars, à la messe qui se célebre en l’église des grands Augustins, en actions de graces de la réduction de la ville de Paris à l’obéissance de Henri IV. en 1594 ; & la