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courte, il va de suite de l’une à l’autre ; & quand il veut passer son coup de liséré, pour lors il prend la marche plus courte avec la pointe du pié seulement & passe ensuite son coup de navette.

Armure de damas liséré & broché.

On voit clairement par la disposition de cette armure, que la premiere lisse du liséré est la quatrieme dans l’ordre des marches, & qu’elle fait baisser la même lisse de liage qui se rencontre sur la premiere marche de ce même liage ; que la seconde marche du liséré est la huitieme dans l’ordre des marches, & qu’elle fait baisser la même lisse qui se trouve sur la seconde marche ; que la troisieme marche du liseré est la seconde dans l’ordre des marches, & qu’elle fait baisser la même lisse qui se trouve sur la troisieme marche de liage ; que la quatrieme marche de liséré est la sixieme dans l’ordre des marches, & qu’elle fait baisser la même lisse qui se trouve sur la quatrieme marche de liage ; que la cinquieme marche de liséré est la sixieme dans l’ordre des marches, & qu’elle fait baisser la même lisse qui se trouve sur la cinquieme marche de liage : ce qui acheve le course.

Si les satins sont sur fil, ils se font comme les autres, & se trament seulement de fil au lieu de soie.

Observations sur le damas. Toutes les manufactures de damas qui sont en Europe, ne le fabriquent pas de même. La soie qu’elles y employent est différente, soit

en quantité, soit en qualité, sur-tout dans les chaînes. Nous allons entrer dans quelque détail là-dessus, & examiner notre main-d’œuvre & nos réglemens. Nous exhortons nos fabriquans à refléchir sur ce qui suit, & à achever de remporter sur l’étranger par la bonté de l’étoffe & la perfection du travail, un avantage qu’ils ont déjà obtenu par le goût du dessein.

Le réglement du 1 Octobre 1737 ordonne, article 68, que les damas ne pourront être faits à moins de 90 portées de chaîne, & chaque portée de 80 fils. Et l’article 1 du réglement du 8 Avril 1724, pour la manufacture de Turin, veut 1o . que les damas soient faits avec une chaîne de 96 portées, & chaque portée de 80 fils, dans un peigne de 24 portées, afin qu’il se trouve 8 fils par dent ; 2o . qu’il ne soit employé à l’ourdissage de ces étoffes que des organsins du poids de six octaves au moins chaque ras, étant teints : ce qui revient au poids d’une once & demie chaque aune de chaîne de ceux qui s’ourdissent en France.

D’où l’on voit que la quantité de soie ordonnée par notre réglement devroit être plus considérable, & que d’un autre côté on n’y parle point de la qualité qu’il n’étoit pas moins important de fixer que la qualité.

La fixation du poids seroit inutile, si le nombre des portées n’étoit pas désigné ; parce qu’on pourroit diminuer le nombre des portées, & augmenter la grosseur de l’organsin, si sa qualité n’étoit déterminée, afin que le poids se trouvât toûjours le même à la chaîne : ce qui donneroit lieu à un défaut d’autant plus considérable, que ce n’est ni le fil le plus gros ni le plus pesant qui fait la plus belle toile ; mais le plus fin & le plus leger, comme tout le monde sait ; la quantité nécessaire étant supposée complette. Les Piémontois ont eu l’attention de fixer & le nombre des portées, & la qualité de la soie, & le poids, & le peigne.

Les Génois font de 100 portées leurs moindres damas meubles. Leur peigne est de 25 portées, & ils ont 8 fils par dent ; ce qui doit donner une étoffe plus parfaite que si elle n’étoit que de 90 portées.

Si ces étrangers ont fixé le poids des chaînes, c’est qu’ils ont craint d’un autre côté qu’un organsin trop fin ne garnissant pas assez, la qualité de l’étoffe affamée, comme disent les ouvriers, ne fût altérée. Il faut que le filage de la matiere soit proportionné à la nature de l’ouvrage.

Les Génois ont encore des damas pour meubles de 120 portées, & faits avec 30 portées de peigne, pour avoir encore 8 fils par dent. On ne distingue ces damas des autres que par la lisiere ou cordon qu’ils appellent cimosse. Voyez l’art. Cimosse.

Cette lisiere est faite en gros-de-tours, non en taffetas, c’est-à-dire que les deux coups de la navette dont la trame sert à former l’étoffe & qui sont passés à chaque lac, passent aussi par le cordon sous un même pas, & font un parfait gros-de-tours, & une lisiere très-belle & très-particuliere. La façon de travailler cette lisiere ou cordon du damas en gros-de-tours, ainsi que la cordeline, est si ingénieuse qu’on peut assûrer que des dix mille fabriquans qui remplissent nos manufactures, il n’y en a peut-être pas dix qui pussent sur le champ en entendre & démontrer la manœuvre, peut-être même quand on leur laisseroit le tems de l’étudier : ce sont cependant des paysans très-grossiers qui en ont été les inventeurs, qui l’exécutent tous les jours, & qui font les plus beaux damas & les plus beaux velours.

Les chaînes des étoffes façonnées qui se fabriquent à Lyon ne reçoivent l’extension forte qu’elles doivent avoir pendant la fabrication, que d’une grosse corde qui est arrêtée par un bout au pié du métier ; fait trois ou quatre tours sur le rouleau qui porte la chaîne, & a son autre bout passé dans un valet ou