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resout par ce calcul, comme l’invention des maxima & minima, des points d’inflexion & de rebroussement, &c. Voyez ces mots.

Qu’est-ce en effet que trouver un maximum ou un minimum ? C’est, dit-on, faire la différence de dy égale à zéro ou à l’infini ; mais pour parler plus exactement, c’est chercher la quantité qui exprime la limite du rapport de dy fini à dx fini, & faire ensuite cette quantité nulle ou infinie. Voilà tout le mystere expliqué. Ce n’est point dy qu’on fait = à l’infini : cela seroit absurde ; car dy étant prise pour infiniment petite, ne peut être infinie ; c’est  : c’est-à-dire qu’on cherche la valeur de x qui rend infinie la limite du rapport de dy fini à dx fini.

On a vû plus haut qu’il n’y a point proprement de quantités infiniment petites du premier ordre dans le calcul différentiel ; que les quantités qu’on nomme ainsi y sont censées divisées par d’autres quantités censées infiniment petites, & que dans cet état elles marquent non des quantités infiniment petites, ni même des fractions, dont le numérateur & le dénominateur sont infiniment petits, mais la limite d’un rapport de deux quantités finies. Il en est de même des différences secondes, & des autres d’un ordre plus élevé. Il n’y a point en Géométrie de ddy véritable ; mais lorsque ddy se rencontre dans une équation, il est censé divisé par une quantité , ou autre du même ordre : en cet état qu’est-ce que  ? c’est la limite du rapport , divisée par dx ; ou ce qui sera plus clair encore, c’est, en faisant la quantité finie , la limite de .

Le calcul differentio-différentiel est la méthode de différentier les grandeurs différentielles ; & on appelle quantité differentio-différentielle la différentielle d’une différentielle.

Comme le caractere d’une différentielle est la lettre d, celui de la différentielle de dx est ddx ; & la différentielle de ddx est dddx, ou d2x, d3x, &c. ou , &c. au lieu de ddx, d3x, &c.

La différentielle d’une quantité finie ordinaire s’appelle une différentielle du premier degré ou du premier ordre, comme dx.

Différentielle du second degré ou du second ordre, qu’on appelle aussi, comme on vient de le voir, quantité differentio-différentielle, est la partie infiniment petite d’une quantité différentielle du premier degré, comme ddx, dxdx, ou dx2, dxdy, &c.

Différentielle du troisieme degre, est la partie infiniment petite d’une quantité différentielle du second degré, comme dddx, dx3, dxdydz, & ainsi de suite.

Les différentielles du premier ordre s’appellent encore différences premieres ; celles du second, différences secondes ; celles du troisieme, différences troisiemes.

La puissance seconde dx2 d’une différentielle du premier ordre, est une quantité infiniment petite du second ordre ; car dx2 : dx ∷ dx . 1 ; donc dx2 est censée infiniment petite par rapport à dx ; de même on trouvera que dx3 ou dx2dy, est infiniment petite du troisieme ordre, &c. Nous parlons ici de quantités infiniment petites, & nous en avons parlé plus haut dans cet article, pour nous conformer au langage ordinaire ; car par ce que nous avons déjà dit de la métaphysique du calcul différentiel, & par ce que nous allons encore en dire, on verra que cette façon de parler n’est qu’une expression abrégée & obscure en apparence, d’une chose très-claire & très-simple.

Les puissances différentielles, comme dx2, se différentient de la même maniere que les puissances des quantités ordinaires. Et comme les différentielles com-

posées se multiplient ou se divisent l’une l’autre, ou sont des puissances des différentielles du premier degré, ces différentielles se différentient de même que les grandeurs ordinaires. Ainsi la différence de dxm est , & ainsi des autres. C’est pourquoi le calcul differentio-différentiel est le même au fond que le calcul différentiel.

Un auteur célebre de nos jours dit dans la préface d’un ouvrage sur la Géométrie de l’infini, qu’il n’avoit point trouvé de géometre qui pût expliquer précisément ce que c’est que la différence de dy devenue égale à l’infini dans certains points d’inflexion. Rien n’est cependant plus simple ; au point d’inflexion la quantité est un maximum ou un minimum ; donc la différence divisée par dx est = 0 ou = à l’infini. Donc, en regardant dx comme constant, on a la quantité à zéro ou à l’infini ; cette quantité n’est point une quantité infiniment petite, c’est une quantité qui est nécessairement ou finie, ou infinie, ou zéro, parce que le numérateur ddy qui est infiniment petit du second ordre, est divisé par dx2, qui est aussi du second ordre. Pour abréger, on dit que ddy est = à l’infini ; mais ddy est censée multipliée par la quantité  ; ce qui fait disparoître tout le mystere. En général ddy = à l’infini ne signifie autre chose que l’infini ; or dans cette équation il n’entre point de différentielle ; par exemple soit  ; on aura & l’infini n’est autre chose que à l’infini, c’est-à-dire à l’infini, ce qui arrive quand x = a ; on voit qu’il n’entre point de différentielle dans la quantité , qui représente ou la limite de la limite de . On supprime le dx2 pour abréger ; mais il n’en est pas moins censé existant. C’est ainsi qu’on se sert souvent dans les Sciences de manieres de parler abrégées qui peuvent induire en erreur, quand on n’en entend pas le véritable sens. Voyez Elémens.

Il résulte de tout ce que nous avons dit, 1o. que dans le calcul différentiel les quantités qu’on néglige, sont négligées, non comme on le dit d’ordinaire, parce qu’elles sont infiniment petites par rapport à celles qu’on laisse subsister, ce qui ne produit qu’une erreur infiniment petite ou nulle ; mais parce qu’elles doivent être négligées pour l’exactitude rigoureuse. On a vû en effet ci-dessus que est la vraie & exacte valeur de  ; ainsi en différentiant ax = yy, c’est 2ydy, & non 2ydy + dy2 qu’il faut prendre pour la différentielle de y2, afin d’avoir, comme on le doit,  ; 2o. Il ne s’agit point, comme on le dit encore ordinairement, de quantités infiniment petites dans le calcul différentiel ; il s’agit uniquement de limites de quantités finies. Ainsi la métaphysique de l’infini & des quantités infiniment petites plus grandes ou plus petites les unes que les autres, est totalement inutile au calcul différentiel. On ne se sert du terme d’infiniment petit, que pour abréger les expressions. Nous ne dirons donc pas avec bien des géometres qu’une quantité est infiniment petite, non avant qu’elle s’évanoüisse, non après qu’elle est évanoüie, mais dans l’instant même où elle s’évanoüit ; car que veut dire une définition si fausse, cent fois plus obscure que ce qu’on veut définir ? Nous dirons qu’il n’y a point dans le calcul différentiel de quantités infiniment petites. Au reste nous parlerons plus au long à l’article