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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 5.djvu/166

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que quoique celui-ci n’ait plus de propriété, il conserve néanmoins, tant qu’il vit, une sorte de droit d’inspection & de paternité sur son ouvrage ; qu’il doit pour sa gloire avoir la liberté, lorsqu’on le réimprime, d’y faire les corrections ou augmentations qu’il juge nécessaires à sa perfection. Cela est juste & raisonnable, & le libraire ne doit pas s’y refuser. Il pourroit arriver que les augmentations de l’auteur fussent si considérables, qu’elles deviendroient en quelque sorte un nouvel ouvrage : c’est alors à l’honnêteté des procédés à regler les nouvelles conventions à faire entre l’auteur & le libraire, si celui-là en exige ; mais s’il arrivoit qu’ils ne s’accordassent pas, l’auteur, s’il n’y avoit pas de conventions contraires, resteroit propriétaire de ses augmentations, & le libraire de ce qui lui auroit été précédemment cedé.

Il y auroit peut-être un moyen de prévenir les contestations qui pourroient s’élever encore dans la suite, entre les auteurs & les libraires pour raison des ouvrages littéraires que les uns vendent & que les autres achetent : ce seroit que l’auteur, quand c’est son intention, mît dans l’acte de cession qu’il fait au libraire, qu’il vend & cede pour toûjours son ouvrage & son droit de propriété, auquel il renonce sans aucune restriction ; si au contraire son intention est de ne vendre ou ceder que pour un tems, il faudroit spécifier le tems, comme la durée d’un privilége ou le cours d’une ou de plusieurs éditions, &c. Il conviendroit aussi de statuer sur le cas où l’auteur pourroit donner par la suite des augmentations, & alors il ne resteroit point d’obscurité qui pût donner lieu à des contestations ; car on ne présume pas que celles qui se sont quelquefois élévées, ayent jamais eu d’autre cause.

Les Libraires acquierent encore ce droit de propriété sur un ouvrage, lorsqu’ils en ont proposé l’exécution à un ou plusieurs hommes de lettres, qui se sont chargés gratuitement ou sous des conditions convenues, de le composer. Le libraire ne tient alors ce droit que de lui-même & de ses avances. On n’a pas connoissance que la propriété du libraire ait jamais été contestée dans ce cas-là ; mais s’il arrivoit un jour que des gens de lettres qui auroient contribué à un pareil ouvrage, prétendissent après l’entiere exécution avoir quelque droit à la propriété, leurs prétentions seroient aussi peu justes & aussi peu légitimes, que le seroient celles d’un architecte sur un bâtiment qu’il a construit. Il y a plusieurs ouvrages littéraires dans ce cas. Le plus considérable en ce genre est celui-ci. Par les soins qu’on a pris & les dépenses qu’on a faites, afin que cette Encyclopédie devînt un ouvrage nouveau, sinon pour le plan, du moins pour l’exécution ; il est certain qu’elle appartient à la France à plus juste titre que le Chambers n’appartient à l’Angleterre, puisque celui-ci n’est que la compilation de tous nos dictionnaires.

Il y a enfin une troisieme maniere dont un libraire peut acquérir ce droit de propriété sur un ouvrage littéraire, c’est en pensant le premier à l’imprimer dans son pays, quand il a pris naissance dans le pays étranger, & qu’il y a déjà été imprimé ; le libraire tient, comme dans le cas précédent, ce droit de son intelligence & de son industrie. En se procurant les avantages d’une entreprise utile, s’il réussit dans son choix, il sert l’état & ses compatriotes, en ce que d’une part il contribue à faire valoir les fabriques de son pays, & à empêcher l’argent que l’on mettroit à ce livre de passer chez l’étranger ; d’autre part en ce qu’il procure aux gens de lettres de sa nation, avec facilité & moins de frais, un ouvrage souvent utile & quelquefois nécessaire. Au reste, quoique ce droit soit légitime à certains égards, parce que les Libraires des différentes nations sont dans l’usage de se faire respectivement cette espece de tort, on doit cependant convenir qu’il est contre le droit des gens, puisqu’il nuit

nécessairement au premier entrepreneur. Il seroit à souhaiter que tous les libraires de l’Europe voulussent être assez équitables pour se respecter mutuellement dans leurs entreprises ; le public n’y perdroit rien, les livres passeroient d’un pays dans un autre par la voie des échanges. Mais il y a des pays où les productions littéraires ne sont pas assez abondantes & assez du goût des autres nations, pour procurer par échanges aux libraires qui les habitent, tous les livres qu’ils peuvent débiter. Ils trouvent plus d’avantage à imprimer quelques-uns de ces livres qu’à les acheter ; c’est ce qui s’est opposé jusqu’à présent, & ce qui s’opposera vraissemblablement toûjours à l’accord équitable qui seroit à desirer entre les Libraires des différens pays. Dans l’état où sont les choses, ce droit de propriété fondé sur celui de premier occupant, est aussi solide que celui des deux autres cas, & mérite de la part du souverain la même protection ; avec cette différence cependant que l’on interdit avec raison l’entrée & le débit des éditions étrangeres d’un livre dans le pays où il a pris naissance, & que l’on devroit autoriser l’introduction d’une édition étrangere d’un livre, quand il vient du pays où il a été originairement imprimé, quelque privilége qui ait été accordé pour l’impression du même livre dans le pays où il arrive. C’est un usage établi en Hollande, & peut-être ailleurs : les Etats généraux ne refusent point de privilége pour l’impression d’un livre originaire de France, mais ils n’interdisent point chez eux l’entrée & le débit des éditions du même livre faites en France-Cela devroit être réciproque & seroit juste ; ce seroit un moyen de diminuer le tort que l’on fait au premier entrepreneur, qui a seul couru tous les risques des évenemens. Cet article est de M. David, un des Libraires associés pour l’Encyclopédie.

Droit, adj. est synonyme à perpendiculaire, dans l’Architecture & la Coupe des pierres, & en ce sens il est opposé à incliné. On dit un arc droit, quoique cet arc soit courbe, pour dire un arc dont le plan est perpendiculaire à la direction du berceau. (D)

Droit, terme de Manege : on dit qu’un cheval est droit, pour dire qu’il ne boite point ; qu’on le garantit droit chaud & froid, c’est-à-dire lorsqu’il est échauffé ou refroidi, pour dire qu’il ne boite point, ni quand on le monte & après qu’il est échauffé, ni après qu’il a été monté & qu’il s’est refroidi. Un cheval droit sur ses boulets, c’est la même chose qu’un cheval bouleté (voyez Bouleté), excepté que le pié n’est pas si reculé en-arriere. Droit sur ses jambes, signifie que les jambes de devant du cheval tombent bien à plomb lorsqu’il est arrêté ; c’est la meilleure situation des jambes de devant : il y a des chevaux qui se postent de façon que leurs jambes de devant vont trop en-dessous, c’est-à-dire s’approchent trop de celles de derriere. Aller droit à la muraille, c’est changer de main, en termes de Manege, sans mener son cheval de côté. Aller par le droit, c’est mener son cheval par le milieu du manége sans s’approcher des murailles. Promener un cheval par le droit. Voy. Promener. Dictionn. de Garsault.

DROITURE, s. f. (Jurisp.) en Normandie signifie ligne directe. Art. 125. (A)

Droiture, (Marine.) aller en droiture ou faire sa route en droiture, c’est faire sa route pour l’endroit destiné, sans aucun relâche ni sans s’arrêter en aucun endroit. (Z)

DROITWICH, (Géog. mod.) ville à marché, dans le Worcestershire, en Angleterre. Long. 15. 26. lat. 52. 20.

DROMADAIRE. Voyez Chameau.

DROME, s. f. (Grosses Forges.) la piece de char-