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toutes ces proportions : de sorte que tout le monde pourra faire un électrometre qui s’élevera de la même quantité pour la même force électrique. Propriété qui me paroît une des plus remarquables de cet instrument, & qui est une de celles qui y est le plus à desirer, comme je l’ai remarqué au commencement de cet article.

On objectera peut-être, que la différente densité de l’eau dans les différens climats, formera un obstacle à cette universalité. Il est clair cependant que toutes les fois que l’on fera une verge qui descendra de 4 pouces pour 8 grains, on aura un électrometre qui indiquera à très-peu-près les mêmes degrés de la force électrique que le nôtre ; car quoique dans un pays chaud une pareille verge fût un peu plus repoussée, puisqu’elle seroit plus grosse que la nôtre, ce seroit d’une quantité si peu considérable, que cette répulsion ne pourroit entrer en comparaison avec celle de la plaque.

Enfin on pourra alléguer encore, que les différentes positions de l’électrometre par rapport au cadre & à la lanterne, changeront ses élévations apparentes, mais il est toûjours facile d’avoir le rapport de ces élévations par la méthode suivante. Ayant placé l’électrometre, & arrangé le tout comme pour faire des expériences ; chargez la petite plaque de cet instrument de 8 grains par exemple, & voyez de combien de degrés son ombre descend en conséquence sur le cadre ; la somme de ces degrés comparée à celle qu’un même poids aura fait parcourir à l’ombre d’un autre électrometre sur lequel on aura fait la même expérience, donnera le rapport précis de leurs élévations.

D’après cette description de l’électrometre, & de la maniere de s’en servir, il pourra paroître à quelques personnes d’un usage peu commode, par les diverses attentions qu’il exige, & par la nécessité où l’on est d’obscurcir le lieu où l’on fait ces expériences, pour pouvoir juger de ses élévations & de ses abaissemens : mais si l’on fait attention à la nature de l’électricité, & à l’impossibilité d’observer de près, comme je l’ai dit, les divers mouvemens des corps électriques ; on verra que si cet instrument a quelque chose d’embarrassant dans son usage, c’est en quelque façon une suite nécessaire de la nature de la force électrique qu’il doit mesurer.

J’ai fait voir au commencement de cet article, que de tous les phénomenes des corps électriques la répulsion étoit le seul qui fournît un moyen sûr & général de mesurer la force de l’électricité. Cependant comme il y a des cas où l’on est indispensablement obligé d’employer les étincelles, tels que ceux, par exemple, où l’on veut, par leurs différentes grandeurs, juger des densités respectives du fluide électrique dans les corps entre lesquels ces étincelles partent ; je crois devoir ajoûter ici la description d’une espece de spintherometre ou mesure-étincelles, dont je me sers, & au moyen duquel on peut être à très-peu près sûr, que les différentes grandeurs ou forces de ces étincelles naissent uniquement des différentes forces de l’électricité, ce qu’on ne peut faire en les tirant à la maniere ordinaire : car, selon cette maniere, on peut, quoique l’électricité reste toûjours la même, on peut, dis-je, faire partir ces étincelles de plus près ou de plus loin, comme je l’ai dit, non seulement en les tirant de corps de figures & de volumes différens, mais encore en les tirant de parties plus ou moins lisses de la surface d’un même corps. L’instrument dont je viens de parler, est construit de la maniere suivante.

Dans un tube de verre TT (fig. 77.) recouvert par les deux bouts de deux plaques PS, PI, se meut librement, mais sans jeu, une balle de métal B, adaptée à l’extrémité d’une verge de fer quarrée VV ;

cette verge passe à-travers un trou de la même forme, percé dans la plaque PS, dans lequel elle s’ajuste parfaitement. On voit par cette disposition, qu’on peut bien faire mouvoir la balle dans le tube d’un bout vers l’autre, mais qu’on ne peut lui faire prendre d’autre mouvement. Sur l’extrémité de la verge VV, qui déborde la plaque PS, sont marqués des degrés, afin qu’on puisse juger de la distance où la balle se trouve de la plaque PI : on pourroit pour une plus grande précision, en place de ces degrés, adapter à l’extrémité de la verge une vis qui feroit la fonction du micrometre.

D’après la description de cet instrument, il est facile de concevoir comment on s’en sert, & comment il remédie aux inconvéniens que j’ai spécifiés plus haut. On voit en premier lieu, qu’en le prenant par le tube, & le faisant toucher par la plaque PI sur le corps électrique dont on veut tirer une étincelle, cette plaque s’électrise au même degré que ce corps, & qu’au moyen de la verge VV, on approche graduellement de la même plaque la balle B (qu’on en tenoit auparavant fort éloignée) jusqu’à ce que l’étincelle parte. Or cet effet arrivant dans l’instant précis où cette balle se trouve à la distance requise pour qu’il ait lieu, on reconnoît cette distance par le nombre de degrés marqués sur cette verge. On voit, 2°. que ces distances ne peuvent venir ici que de la différence de la force électrique, parce que l’étincelle part toûjours entre les mêmes corps, la plaque PI, & la balle B ; & que c’est toûjours des mêmes points de la balle & de la plaque, puisque cette balle ne pouvant que s’en éloigner ou s’en approcher, les différens points de sa surface inférieure doivent toûjours regarder les mêmes points respectifs de cette plaque. (T)

ELECTUAIRE, s. m. (Pharm.) L’électuaire est une composition pharmaceutique, destinée à l’usage intérieur, formée en incorporant une ou plusieurs poudres avec du miel ou du sirop, des extraits, des pulpes, des gelées, des robs, des conserves, & quelquefois des vins doux.

Les électuaires sont solides ou mous. Les premiers sont plus connus sous le nom de tablettes, & il est même commode de les distinguer par ce nom des électuaires mous. Voyez Tablette. Les second doivent être d’une consistance moyenne entre le sirop & le bol, & fort approchante de celle des marmelades de fruits bien cuites : c’est de ceux-ci que nous allons parler dans cet article.

L’électuaire est une forme de médicament très-anciennement employée en Medecine. Galien en a décrit quelques-uns ; les hiera, les confections, la thériaque d’Andromaque, le fameux antidote attribué à Mithridate, tous remedes très-anciens, sont des électuaires.

Mais le nom même d’électuaire n’est pas de la même antiquité que l’usage du remede auquel nous le donnons aujourd’hui ; les Grecs & les Arabes l’ont toûjours appellé antidote, quelque vertu medicinale particuliere qu’il possédât, & ils en ont préparé assûrément de toutes les diverses vertus observées ou imaginées dans les remedes, de roborans, de cordiaux, de céphaliques, d’alexipharmaques, de cholagogues, d’hydragogues, de panchymagogues, d’emmenagogues, de narcotiques, &c.

Ælius Aurelianus a employé le mot d’électuaire, electarium ; mais c’est un remede de la nature de notre looch, qu’il a désigné par ce nom. V. Looch.

Le nombre des électuaires a été poussé jusqu’à un excès dont l’ignorance la plus profonde & la charlatannerie la plus impudente sont seuls capables. Le seul Myrepsus nous en a décrit jusqu’à cinq cents onze dans son antidotaire. Les disciples des Arabes ne firent qu’enchérir sur la prodigieuse fécondité de