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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 5.djvu/610

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nent très-bien s’ils sont anciens, & si l’on a la précaution de les étendre très-minces, & sur du gros linge presque neuf. Il faut aussi avoir soin que le linge soit coupé à droit fil.

La situation de la plaie & sa figure doivent déterminer la figure de ces emplâtres, & si un seul sera suffisant, ou s’il en faudra plusieurs. Les bandes emplastiques doivent être assez longues pour pouvoir soûtenir la peau de loin : trop courtes, elles contiendroient mal les levres de la plaie, sur-tout si elle avoit un peu de profondeur. Quand on est obligé par quelque raison que ce soit de lever ces emplâtres, il faut avoir la précaution de ramollir le médicament par l’application d’une serviette chaude, ou avec un peu d’huile chauffée à un degré convenable, afin de ne déranger l’ouvrage de la nature par aucun tiraillement. On a soin aussi de lever l’emplâtre directement dans toute son étendue ; d’abord par un côté, en le tirant vers la plaie, près de laquelle on s’arrête pour en faire autant du côté opposé, afin d’être en garde contre le déchirement d’une cicatrice récente, que le moindre effort opposé à la réunion pourroit rompre.

Les emplâtres purement contentifs ne servent aussi que par la qualité glutineuse du médicament ; on les applique sur les plumaceaux qui recouvrent les plaies ou les ulceres, afin de les maintenir. On abuse un peu de ce moyen, qui a des inconvéniens. L’adhérence de l’emplâtre aux environs de l’ulcere, bouche les pores, occasionne quelquefois un prurit érésypélateux, rend la suppuration plus abondante par rapport à la transpiration supprimée, & retient les matieres purulentes dans l’ulcere ou aux environs. Quoiqu’il soit démontré que rien n’est si sain que la propreté, cependant rien n’est si commun dans la plûpart des hôpitaux, sur-tout dans ceux où il y a un très grand nombre de malades ; rien, dis-je, n’y est si commun que de voir la circonférence des plaies & des ulceres fort mal-propres, par le peu l’attention des éleves auxquels les pansemens sont confiés, & par l’abus des emplâtres. Leur usage rend ces mêmes éleves plus négligens sur la meilleure maniere d’appliquer les bandes pour contenir l’appareil en situation d’un pansement à l’autre. Cette mal-propreté, contre laquelle on ne peut s’élever avec trop de force, contribue plus que toute chose à rendre les ulceres sordides & de difficile guérison, & peut-être même à les rendre par la suite tout-à-fait incurables, quoiqu’on eût pû avec un peu de propreté, les guérir par l’application des remedes les plus simples, tels que le vin miellé, &c. j’en ai fait plus d’une fois l’expérience. L’emplâtre de diapalme est celui dont on se sert le plus communément, comme contentif.

On peut couvrir d’un médicament emplastique le côté d’une compresse expulsive qui touche la partie, afin de la fixer invariablement sur le fond du sinus dont on veut faire sortir la matiere. On lit dans les observations communiquées par Formi célebre chirurgien de Montpellier, à Lazare Riviere doyen des professeurs royaux de Medecine en l’université de cette ville, qu’un abcès considérable sur le sternum avoit été ouvert sans méthode à la partie supérieure. Suivant les regles de l’art, l’incision auroit dû être faite à la partie déclive (voyez Abcès, Compresse, Compression, Contre-ouverture) ; mais pour éviter une seconde opération, Formi conseilla l’application d’une compresse épaisse & agglutinative, sur laquelle un bandage serré convenablement procura le recollement des parois du sac, en déterminant le pus à sortir par l’ouverture supérieure.

Il peut y avoir des indications qui exigent que la compresse expulsive soit enduite d’un médicament approprié au cas. Je me suis servi avec le plus grand

succès d’une compresse expulsive maintenue par un mélange d’emplâtre de cigue & de vigo, sur un sinus accompagné de dureté & de callosités dans un ulcere scrophuleux.

Les emplâtres les plus efficaces contre la teigne n’agissent que par la qualité agglutinative ; & l’on a la précaution de les étendre sur de la toile neuve, pour qu’ils adherent plus fortement, afin d’arracher les cheveux jusqu’à leurs racines. Voyez Teigne.

Eu égard à la vertu des médicamens dont les emplâtres sont composés, il y en a d’émolliens, comme ceux de mucilages & de mélilot. D’autres sont résolutifs & fondans ; tels sont les emplâtres de savon, de ciguë, de diabotanum, de vigo, &c. Les premiers sont plus émolliens & discussifs ; ceux-ci sont plus stimulans. L’effet des emplâtres est relatif aux dispositions des fluides & des solides. Si l’humeur qui est en stagnation dans la tumeur qu’on veut résoudre est fort épaisse, si les émolliens ne l’ont pas préparée à la résolution, les remedes résolutifs procureront une plus forte induration. Si au contraire il y a un commencement de chaleur dans la tumeur, les résolutifs, par leur qualité stimulante, accéléreront le jeu des vaisseaux, & la tumeur suppurera avec des résolutifs, qui deviennent alors les meilleurs maturatifs & attractifs dont on puisse se servir. On n’est guere trompé dans son attente lorsqu’on procede par principes & par raison, c’est-à-dire par une expérience réfléchie & raisonnée, bien différente de l’empirisme que le vulgaire honore du nom d’expérience, & qui n’est qu’une routine aveugle.

Le diachilon gommé est un des meilleurs emplâtres maturatifs dans les furoncles, les clous, & autres tumeurs de cette nature qui ont de la disposition à suppurer. Pour mondifier & déterger, l’emplâtre divin est fort recommandé ; & ceux de céruse, de minium, de Nuremberg, & principalement celui de pierre calaminaire, ont la vertu de dessécher & de cicatriser.

Il y a des préparations emplastiques destinées particulierement à certaines maladies & à certaines parties. L’emplâtre de bétoine est céphalique, & consacré pour la guérison des plaies de tête. Mais ne mondifieroit-il pas également les plaies des autres parties ? Les mêmes pharmacopées qui en vantent les propriétés pour les plaies de tête, ajoûtent qu’on s’en sert aussi pour ramollir les cors des piés.

L’emplâtre de blanc de baleine, dans lequel entre la gomme ammoniaque dissoute dans du vinaigre, est un bon remede pour les mammelles des femmes qui ne peuvent ou ne veulent pas alaiter leurs enfans ; il dissipe le lait, appaise les douleurs qui en proviennent, & en résout les grumeaux & les duretés qui en résultent. Je ne crois pas qu’on puisse penser aussi favorablement des effets que peut produire l’application de l’emplâtre de nicotiane & de ciguë dans les indurations & les skirrhes du foie & de la rate. Suivant les auteurs de la pharmacopée d’Ausbourg, Montanus & Bellacattus, célebres medecins de Padoue, faisoient un grand usage d’un emplâtre contre l’hydropisie, & l’on assûre qu’il n’est pas sans efficacité. Il est composé de fiente de pigeon, de suc d’hyeble, de miel, de soufre vif, de nitre, de poudre d’iris, d’énula, de baies de laurier, d’aneth, de fleurs de camomille, de semence de cresson, de farine de feve, de suif de cerf, de terebenthine, & d’une suffisante quantité de cire. Quand on connoît la nature de l’hydropisie, & les différentes causes qui peuvent donner lieu à cette maladie, comment peut-on imaginer qu’on puisse la guérir par des applications extérieures ? Nous osons faire la même réflexion sur l’emplâtre fébrifuge, fait avec des araignées vivantes & leurs toiles, mêlées dans de la terebenthine avec du sel armoniac, &c. pour être appliqué