d’ouvrages que la premiere, les ouvrages de bois & de stuc étant presque les seuls que l’on dore à la colle, encore faut-il qu’ils soient à couvert, cette dorure ne pouvant résister, ni à la pluie, ni aux impressions de l’air qui la gâtent & l’écaillent aisément.
La colle dont on se sert pour dorer, doit être faite de rognures de parchemin ou de gants, qu’on fait bouillir dans l’eau jusqu’à ce qu’elle s’épaississe en consistence de gelée. Voyez Colle.
Si c’est du bois qu’on veut dorer, on y met d’abord une couche de cette colle toute bouillante, ce qui s’appelle encoller le bois. Après cette premiere façon, & lorsque la colle est seche, on lui donne le blanc, c’est-à-dire qu’on l’imprime à plusieurs reprises d’une couleur blanche détrempée dans cette colle, qu’on rend plus foible ou plus forte avec de l’eau, suivant que l’ouvrage le demande.
Ce blanc est de plusieurs sortes : quelques doreurs le font de plâtre bien battu, bien broyé & bien tamisé ; d’autres y employent le blanc d’Espagne ou celui de Roüen. Il y en a qui se servent d’une espece de terre blanche qu’on tire des carrieres de Seve, près Paris, qui n’est pas mauvaise quand elle est affinée.
On se sert d’une brosse de poil de sanglier pour coucher le blanc. La maniere de le mettre & le nombre des couches sont différens, suivant l’espece des ouvrages. A ceux de sculpture il ne faut que sept ou huit couches ; aux ouvrages unis, il en faut jusqu’à douze. A ceux-ci elles se mettent en adoucissant, c’est-à-dire en traînant la brosse par-dessus ; aux autres, on les donne en tapant, c’est-à-dire en frappant plusieurs coups du bout de la brosse, pour faire entrer la couleur dans tous les creux de la sculpture.
L’ouvrage étant parfaitement sec, on l’adoucit ; ce qui se fait en le mouillant avec de l’eau nette, & & en le frottant avec quelques morceaux de grosse toile, s’il est uni ; & s’il est de sculpture, en se servant de legers bâtons de sapin, auxquels sont attachés quelques lambeaux de cette même toile, pour pouvoir plus aisément suivre tous les contours, & pénétrer dans tous les enfoncemens du relief.
Le blanc étant bien adouci, on y met le jaune ; mais si c’est un ouvrage de relief, avant de le jaunir, on le repare, on le recherche, on le coupe, & on le bretelle ; toutes façons qui se donnent avec de petits outils de fer, comme les fermoirs, les gouges, & les ciseaux, qui sont des instrumens de sculpteurs, ou d’autres qui sont propres aux doreurs ; tels que sont le fer quarré qui est plat, & le fer à retirer qui est crochu.
Le jaune qu’on employe est simplement de l’ocre commun bien broyé & bien tamisé, qu’on détrempe avec la même colle qui a servi au blanc, mais plus foible de la moitié. Cette couleur se couche toute chaude ; elle supplée dans les ouvrages de sculpture à l’or qu’on ne peut quelquefois porter jusque dans les creux & sur les revers des feuillages & des ornemens.
L’assiette se couche sur le jaune, en observant de n’en point mettre dans les creux des ouvrages de relief. On appelle assiette, la couleur ou composition sur laquelle doit se poser & s’asseoir l’or des doreurs. Elle est ordinairement composée de bol d’Arménie, de sanguine, de mine de plomb, & d’un peu de suif : quelques-uns y mettent du savon & de l’huile d’olive ; & d’autres du pain brûlé, du bistre, de l’antimoine, de l’étain de glace, du beurre, & du sucre candi. Toutes ces drogues ayant été broyées ensemble, on les détrempe dans de la colle de parchemin toute chaude, & raisonnablement forte ; & l’on en applique sur le jaune jusqu’à trois couches, les dernieres ne se donnant que lorsque les premieres sont parfaitement seches, La brosse pour coucher l’assiet-
se sert d’une autre brosse plus rude pour frotter tout l’ouvrage à sec, ce qui enleve les petits grains qui pourroient être restés, & facilite beaucoup le brunissement de l’or.
Lorsqu’on veut dorer, on a trois sortes de pinceaux ; des pinceaux à mouiller, des pinceaux à ramender, & des pinceaux à matter ; il faut aussi un coussinet de bois couvert de peau de veau ou de mouton, & rembourré de crin ou de bourre, pour étendre les feuilles d’or battu au sortir du livre ; un coûteau pour les couper, & une palette ou un bilboquet pour les placer sur l’assiette. Le bilboquet est un instrument de bois plat par-dessous, où est attaché un morceau d’étoffe, & rond par-dessus pour le prendre & manier plus aisément.
On se sert d’abord des pinceaux à mouiller pour donner de l’humidité à l’assiette, en l’humectant d’eau, afin qu’elle puisse aspirer & retenir l’or ; on met ensuite les feuilles d’or sur le coussinet qu’on prend avec la palette, si elles sont entieres, ou avec le bilboquet ou le coûteau même dont on s’est servi pour les couper, & on les pose & étend doucement sur les endroits de l’assiette que l’on vient de mouiller.
Lorsque l’or vient à se casser en l’appliquant, on le ramende en bouchant les cassures avec des petits morceaux d’or, qu’on prend au bout des pinceaux à ramender ; & avec les mêmes pinceaux ou de semblables, mais un peu plus gros, on l’unit par-tout, & on l’enfonce dans tous les creux de la sculpture où on le peut porter avec la palette ou avec le bilboquet.
L’or en cet état, après qu’on l’a laissé parfaitement se sécher, se brunit ou se matte.
Brunir l’or. C’est le polir & le lisser fortement avec le brunissoir, qui est ordinairement une dent de loup ou de chien, ou bien un de ces cailloux qu’on appelle pierre de sanguine, emmanché de bois, ce qui lui donne un brillant & un éclat extraordinaire. Voyez Brunir.
Matter l’or. C’est passer legerement de la colle ou détrempe, dans laquelle on délaye quelquefois un peu de vermillon sur les endroits qui n’ont pas été brunis ; on appelle aussi cela repasser ou donner couleur à l’or. Cette façon le conserve & l’empêche de s’écorcher, c’est-à-dire de s’enlever quand on le manie.
Enfin pour derniere façon, on couche le vermillon dans tous les creux des ornemens de sculpture, & l’on ramende les petits défauts & gersures avec de l’or en coquille, ce qui s’appelle boucher d’or moulu.
La composition à laquelle on donne le nom de vermeil, est faite de gomme gutte, de vermillon, & d’un peu de brun rouge, broyés ensemble, avec le vernis de Venise & l’huile de terebenthine. Quelques doreurs se contentent de laque fine ou de sang de dragon en détrempe, ou même à l’eau pure.
Quelquefois au lieu de brunir l’or, on brunit l’assiette, & l’on se contente de le repasser à la colle, comme on fait pour matter. On se sert ordinairement de cette maniere de dorer pour le visage, les mains, & les autres parties nues des figures de relief. Cet or n’est pas si brillant que l’or bruni ; mais il l’est beaucoup plus que celui qui n’est que simplement matté.
Quand on dore des ouvrages où l’on conserve des fonds blancs, on a coûtume de les recampir, c’est-à-dire de coucher du blanc de céruse détrempé avec une legere colle de poisson dans tous les endroits des fonds, sur lesquels le jaune ou l’assiette ont pû couler.
Maniere de dorer au feu. On dore au feu de trois