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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 6.djvu/503

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de ses mines, soit par les soins que l’on se donne pour le travail de ce métal.

On a été long-tems dans l’idée qu’il n’y avoit point de mines de fer en Amérique ; mais c’est une erreur dont on est revenu depuis long-tems ; & des observations plus exactes nous assûrent que cette partie du monde ne le cede on rien aux autres pour ses richesses en ce genre.

Les mines de fer varient & pour la figure & pour la couleur. Les principales sont :

1°. Le fer natif. On entend par-là du fer qui se trouve tout formé dans la nature, & qui est dégagé de toute matiere étrangere, au point de pouvoir être travaillé & traité au marteau sans avoir éprouvé l’action du feu. Les Minéralogistes ont été très-partagés sur l’existence du fer natif, que plusieurs d’entre eux ont absolument niée : mais cette question est aujourd’hui pleinement décidée. En effet M. Roüelle de l’académie royale des Sciences, a reçu par la voie de la compagnie des Indes, des morceaux de fer natif, apportés du Sénégal où il s’en trouve des masses & des roches très-considérables. Ce savant chimiste les a forgés, & il en a fait au marteau des barres sans qu’il ait été nécessaire de traiter ce fer par aucun travail préliminaire.

2°. La mine de fer crystallisée. Elle est d’une figure ou octahedre, ou cubique, ayant la couleur de fer même. La fameuse mine de fer de l’île d’Elbe, connue du tems des Romains, est de cette espece.

3°. La mine de fer blanche. Elle est en rameaux, ou elle est en crystaux, ou bien elle ressemble à du spath rhomboïdal, étant formée comme le lin d’un assemblage de feuillets ou de lames étroitement unies les unes aux autres. Celle d’Alvare en Dauphiné est de cette espece : au coup-d’œil on n’y soupçonneroit point de fer, cependant elle est très-riche, & fournit 70 à 80 livres de fer au quintal. Pour distinguer la mine de fer blanche du spath, il n’y a qu’à la faire rougir dans le feu ; si elle devient noire, ce sera une marque qui annoncera la présence du fer.

4°. La mine de fer noirâtre. Elle est très-riche, attirable par l’aimant, d’un tissu compact ; ou bien elle est parsemée de petits points brillans, ou formée par un assemblage de petits grains ou paillettes de différentes figures & grandeurs.

5°. La mine de fer d’un gris de cendre. Elle est un peu arsénicale, & n’est point attirable par l’aimant.

6°. La mine de fer bleue. Elle n’est point attirable par l’aimant ; sa couleur est d’un bleu plus ou moins foncé ; elle est ou en grains, ou en petites lames, &c.

7°. La mine de fer spéculaire. Elle est formée par un amas de lames ou de feuilles luisantes, d’un gris obscur ; l’aimant l’attire.

8°. L’hématite ou sanguine. Sa couleur est ou rouge, ou jaune, ou pourpre, ou ressemble à de l’acier poli, c’est-à-dire est d’un noir luisant ; elle varie aussi quant à la figure, étant ou sphérique, ou demi-sphérique, ou pyramidale, ou en mamellons. Quand on casse cette mine, on la trouve intérieurement striée. Quand on l’écrase, elle se réduit en une poudre ou rouge, ou jaune. Cette mine se trouve souvent en petits globules bruns ou jaunes, semblables à des pois, des feves, ou des noisettes. Il y a des pays où il s’en trouve des amas immenses : ce sont autant de petites hématites dont on peut tirer de très-bon fer.

9°. L’aimant. C’est une mine de fer qui est ou d’un tissu compact, ou composée de petits grains, ou parsemée de points brillans ; la couleur est ou rougeâtre, ou bleuâtre, c’est-à-dire de la couleur de l’ardoise ; elle a la propriété d’attirer le fer. Voyez l’article Aimant.

10°. La mine de fer sabloneuse. Il paroît que cette mine ne devroit point faire une espece particuliere ; en effet elle ne differe des autres qui précedent, que

par la petitesse de ses parties, qui sont détachées les unes des autres. C’est ordinairement dans un sable de cette espece que se trouve l’or en paillettes, ou l’or de lavage.

11°. La mine de fer limoneuse, (palustris). Elle est d’un brun plus ou moins foncé à l’extérieur, & d’un gris bleuâtre, ou d’un gris de fer à l’intérieur quand on la brise. C’est de toutes les mines de fer la plus ordinaire ; elle n’affecte point de figure déterminée, mais se trouve par couches & par lits dans le sein de la terre, ou au fond de quelques marais ou lacs.

12°. L’ochre. C’est une terre, ou plûtôt du fer décomposé par la nature ; il y en a de brune ; de jaune, & de rouge : c’est à la décomposition des pyrites & du vitriol, qu’on doit attribuer la formation de l’ochre.

Toutes ces mines de fer sont décrites en détail dans la Minéralogie de Wallerius, tom. I. pag. 459. & suiv. de la traduction françoise, que l’on pourra consulter, ainsi que l’Introduction à la Minéralogie de Henckel, pag. 151. & suiv. de la premiere partie dans la traduction.

Quelques auteurs ont parlé de mines d’acier ; mais ces mines ne doivent être regardées que comme des mines de fer qui donnent de l’acier dès la premiere fusion, parce qu’elles sont très-pures & dégagées de substances étrangeres nuisibles à la perfection du fer. Peut-être aussi que des voyageurs peu instruits ont appellé mines d’acier, des substances qui n’ont rien de commun avec l’acier qu’une ressemblance extérieure souvent trompeuse.

On voit par ce qui vient d’être dit, que parmi les mines de fer il y en a qui sont attirables par l’aimant, tandis que d’autres ne le sont point ; ce qui prouve que ce n’est pas à ce caractere seul qu’on peut reconnoître la présence du fer dans un morceau de mine. On verra même dans la suite de cet article, que le fer peut être allié avec une portion considérable d’autres substances métalliques, sans perdre pour cela la propriété d’être attiré par l’aimant. On a lieu de croire que cette propriété dépend du phlogistique. Voyez la Minéralogie de Wallerius, tom. I. pag. 493. & suiv.

M. Henckel pense que la division la plus commode des mines de fer, se fait en consultant leur couleur. Suivant ce principe, il les divise en blanches, en grises, en noires, en jaunes, en rouges, en brunes, &c. Voyez l’introduction à la Minéralogie, partie I. Il est certain que la couleur peut servir beaucoup à nous faire reconnoître les substances qui contiennent du fer ; mais ce signe seul ne peut toûjours suffire : il est donc à-propos pour plus de sûreté d’avoir recours à l’essai.

La meilleure maniere de faire l’essai d’une mine de fer, suivant M. Henckel, c’est de commencer par griller & pulvériser la mine, d’en prendre un quintal docimastique, deux quintaux de flux noir, un demi-quintal de verre, de borax, de sel ammoniac, & de charbon en poudre, de chacun un quart de quintal ; on fait fondre le tout à grand feu dans un creuset. Il ajoûte qu’il y a de l’avantage à y joindre de l’huile de lin. Voyez Introduction à la Minéralogie, partie II. liv. IX. chap. ij. sect. 7.

Les mines de fer que nous avons décrites, ne sont pas les seules substances qui contiennent ce métal ; il est si universellement répandu dans la nature, qu’il n’y a presque point de terres ou de pierres dans lesquelles il ne s’en trouve une portion plus ou moins grande, sans que pour cela on puisse l’en retirer avec avantage. Un grand nombre de pierres précieuses, telles que les rubis, les jaspes, l’amétiste, la cornaline, &c. lui doivent leurs couleurs, sinon en tout, du moins en grande partie. Presque toutes les pierres & terres colorées sont ferrugineuses, & il y en a très-peu qui