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dans la philosophie de Pythagore, l’explication naturelle de son précepte ; & ces derniers me semblent approcher le plus près de la vérité. En effet Pythagore avoit enseigné que la feve étoit née en même tems que l’homme, & formée de la même corruption : or comme il trouvoit dans la feve je ne sai quelle ressemblance avec les corps animés, il ne doutoit point qu’elle n’eût aussi une ame sujette comme les autres aux vicissitudes de la transmigration, & par conséquent que quelques-uns de ses parens ne fussent devenus feves ; de-là le respect qu’il avoit pour ce légume, & l’interdiction de son usage à tous ses disciples.

Cette opinion de Pythagore que nous venons d’exposer, n’est point un sentiment qu’on lui prete ; elle se trouve détaillée dans la vie que Porphyre a faite de ce philosophe. Aussi Horace, qui long-tems avant Porphyre ne doutoit point que cette idée de transmigration ne fût celle de Pythagore, s’en est moqué plaisamment dans une de ses satyres :

O quando faba Pythagoræ cognata, simulque
Uncta satis pingui ponentur oluscula lardo ?

Sat. vj. lib. II. V. 63.

« Quand pourrai-je, dit-il, dans mes repas rustiques, en depit de Pythagore, me régaler d’un plat de feves, & manger à discrétion de mes légumes, nourries de petit-lard » ?

Au reste le lecteur est maître de consulter sur cette matiere Vossius, de Idolol. lib. III. cap. xxxv. l. IV. cap. xcvij. lib. V. cap. xj. xij. xxv. & xljx. & quelques auteurs qui ont développé le système de Pythagore. Voyez aussi Pythagoriciens. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Feve, (Manége, Maréchall.) maladie de la bouche ; elle est encore connue sous le nom de lampas. Elle consiste dans un tel degré d’épaisseur de la membrane qui tapisse intérieurement la mâchoire supérieure, & qui revêt le palais, que cette membrane excede considérablement la hauteur des pinces ; souvent aussi elle se propage de maniere qu’elle anticipe sur ces mêmes dents. Je ne sai pourquoi les auteurs qui ont traité de l’art vétérinaire, n’ont point parlé de ce dernier cas. Ce prolongement ou ce volume contre nature n’a rien qui doive étonner, lorsque l’on considere que la mucosité filtrée & séparée dans la membrane de Schucider, se répandant sur celle dont il s’agit, par les ouvertures que lui présentent les fentes incisives, l’humecte & l’abreuve sans cesse. C’est précisément dans le lieu de ces ouvertures qu’elle s’étend ou s’épaissit au point de rendre l’action de manger difficile à l’animal ; & celle de tirer le fourrage encore plus laborieuse & même impossible, vû la douleur qu’il ressent à chaque instant où se joignent les extrémités des dents antérieures, entre lesquelles cette membrane se trouve prise & serrée. Dans la pratique, on remédie par le moyen du cautere actuel à cette maladie. Le maréchal, après avoir mis un pas-d’âne dans la bouche du cheval, & s’être armé d’un fer chaud, tranchant & recourbé à l’une de ses extrémités (voyez Fer a Lampas), consume cette partie gonflée précisément entre les deux premiers de ces sillons transverses qui, très-évidens dans l’animal & fort obscurs dans l’homme, s’étendent d’un bord de la mâchoire à l’autre. On observe que le fer ne soit point trop brûlant, & ne porte atteinte à la portion osseuse de la voûte palatine ; ce qui nécessairement occasionneroit une exfoliation & de véritables accidens. Quelqu’ancienne, quelque commune que soit cette opération, je ne la crois point indispensable. S’il n’est question que du gonflement de la membrane, gonflement qui ne survient ordinairement que dans la bouche des jeunes chevaux, & qui souvent ne les incommode point,

il suffira, pour le dissiper, d’ouvrir la veine palatine avec la lancette ou avec la corne. Voyez Phlébotomie. Si la membrane s’est prolongée jusque sur les pinces, on pratiquera la même saignée, après avoir coupé avec des ciseaux ou avec un bistouri cette partie excédante ; & lorsque l’animal aura répandu une suffisante quantité de sang, on lui lavera la bouche avec du vinaigre, du poivre & du sel, & on lui fera manger ensuite du son sec. Ces précautions réussissent toûjours, ainsi on peut envisager l’application du cautere comme une ressource consacrée plûtôt par l’usage que par la nécessité. (e)

Feve, (Germe de) Manége, Maréchall c’est ainsi que nous nommons l’espece de tache ou de marque noire que nous observons dans le milieu des douze dents antérieures des poulains, jusqu’à un certain tems ; des chevaux, jusqu’à ce qu’ils ayent rasé ; & de ceux qui sont béguts ou faux-béguts, pendant toute leur vie. Voyez Faux-marqué. (e)

Feve, (Pêche.) Comme les feves procurent un des meilleurs appâts connus pour attraper le poisson, on peut indiquer ici la maniere dont les Anglois les préparent à ce dessein. Prenez un pot de terre neuf, vernissé en-dedans ; faites-y cuire dans de l’eau de riviere une certaine quantité de feves (supposons quatre litrons de feves), qui auront été auparavant macérées dans de l’eau chaude pendant six heures. Lorsqu’elles seront à demi-cuites, ajoûtez-y quatre onces de miel & quatre grains de musc ; donnez au tout encore quelques bouillons, & retirez votre pot du feu. Maintenant, pour employer votre amorce avec succès, choisissez un endroit clair, net & propre de la riviere, afin que le poisson puisse voir au fond de l’eau sa pâture : mettez dans cet endroit une douzaine de feves soir & matin pendant quelques jours. Dès que le poisson aura goûté de vos feves, il ne manquera pas d’accourir en foule dans le même lieu pour en rechercher de nouvelles, & pour lors il vous sera facile de prendre une grande quantité de ce poisson avec le filet qu’on nomme épervier. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

FEVERSHAM, (Géogr.) petite ville à marché d’Angleterre, avec titre de comté, dans la province de Kent, entre Cantorberi & Rochester, sur un petit golfe. Elle est remarquable dans l’histoire ecclésiastique d’Angleterre, par un monastere de l’abbaye de l’ordre de Clugny, que le roi Etienne y fonda, & où la reine sa femme, le prince Eustache son fils, & lui, furent inhumés. Voyez Rappin Thoyras, tome II. p. 140. Feversham est à 5 lieues E. de Rochester, 12 lieues de Londres. Longit. 18. 25. latit. 51. 19. (D. J.)

FEUILLAGE, (Jardinage.) est l’assemblage des branches & des feuilles que l’on voit sur les arbres, & qui donnent de l’ombre. Le châtaignier, par exemple, est dit avoir un beau feuillage qui porte une grande ombre.

FEUILLANS, s. m. pl. (Hist. ecclés.) ordre de religieux vêtus de blanc, qui vivent sous l’étroite observance de la regle de S. Bernard. Voyez Bernardins.

Ce nom est venu d’une réforme de cet ordre qui a été premierement faite dans l’abbaye de Feuillans, à cinq lieues de Toulouse, par le bienheureux Jean de la Barriere qui en étoit abbé commendataire ; & qui ayant pris l’habit de Cîteaux, travailla à la réforme, qu’il établit, après plusieurs contradictions, vers l’an 1580.

Le pape Sixte V. l’approuva, & les papes Clément VIII. & Paul V. lui accorderent des supérieurs particuliers. Le roi Henri III. fonda un couvent de cet ordre au fauxbourg de S. Honoré à Paris en 1587 : Jean de la Barriere vint lui-même s’y établir avec soixante de ses religieux. Les Feuillans ont plusieurs