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guere plus heureuse dans les moyens imaginés jusqu’à ce jour pour conserver aux fleurs une partie de leur beauté. Elles se gâtent tellement par la maniere ordinaire de les sécher, qu’elles quittent non seulement leurs premieres couleurs, mais les changent même, & se flétrissent au point de perdre leur forme & leur état naturel : la prime-rose & la primevere ne quittent pas seulement leur jaune, mais acquierent un verd foncé. Toutes les violettes perdent leur beau bleu, & deviennent d’un blanc pâle ; de sorte que dans les herbiers secs, il n’y a point de différence entre les violettes à fleurs bleues & les violettes à fleurs blanches.

Le chevalier Robert Southwell a bien voulu communiquer au public la meilleure méthode que je connoisse pour conserver les fleurs dans leur état naturel & dans leurs propres couleurs : voici cette méthode. On préparera deux plaques de fer longues de huit à dix pouces, ou davantage, larges à proportion, & d’une épaisseur suffisante pour n’être pas pliées : on percera ces plaques de fer à chaque coin, pour y mettre des écrous ou vis qui puissent les tenir serrées l’une contre l’autre à volonté. L’on cueillera sur le midi d’un jour bien sec la fleur qu’on voudra conserver ; l’on couchera cette fleur sur une feuille de papier pliée par la moitié, en étendant délicatement toutes les feuilles & les pétales : si la queue de la fleur est trop épaisse, on l’amincira, afin qu’elle puisse être applatie ; ensuite on posera quelques feuilles de papier dessus & dessous la fleur. On mettra par-dessus le tout l’une des deux plaques de fer, sans rien déranger ; on en serrera les écrous ; l’on portera les plaques ainsi serrées dans un four qui ne soit pas trop chaud, & on les y laissera pendant deux heures. Quand les fleurs sont grosses & épaisses, il faut couper adroitement les derrieres inutiles, & disposer les pétales dans leur ordre naturel.

Après avoir retiré vos plaques du four, faites un mélange de parties égales d’eau-forte & d’eau-de-vie ; ôtez vos fleurs de la presse des plaques, & frotez-les legerement avec un pinceau de poil de chameau trempé dans la liqueur dont on vient de parler : ensuite pressez délicatement vos fleurs avec un linge, pour en boire toute l’humidité : après cela, ayez en main une eau gommeuse composée d’un gros de sang-de-dragon dissous dans une pinte d’eau ; trempez un fin pinceau dans cette eau gommeuse ; frotez-en toute votre fleur, & couvrez-la de papier : enfin mettez-la de nouveau sous presse entre vos deux plaques, pour fixer votre eau gommeuse. Au bout de quelque tems, tirez votre fleur de la presse, & toute l’opération est finie.

Auteurs. On peut consulter sur la structure des fleurs, le Discours de Vaillant, imprimé à Leyden en 1718 in-4° ;.

Morlandi observationes de usu partibusque florum, dont j’ai lû l’extrait dans le Journal de Leipsic, année 1705. Janv. pag. 275. Voyez aussi Grew, Malpighi, & Ray. Mais ceux qui par curiosité & par amour pour la Botanique, les Arts, & le Dessein, veulent se former une belle bibliotheque en ce genre, doivent connoître ou se procurer les livres suivans, que je vais ranger par ordre alphabétique.

Boym (Michaël), jésuite, Flora sinensis ; Viennæ-Austriæ, 1656, in-fol.

Bry (Joh. Théod. de), Florilegium renovatum, pars I. Francof. anno 1612. II. anno 1614. III. anno 1518, fol. avec figures. Le même ouvrage a paru sous le nom de Anthologia magna ; Francof. 1626 & 1641, quatre tom. ordinairement reliés en un vol.

Besleri (Basilii) Hortus Eystettensis ; Norimbergæ, 1613, deux vol. in-fol. charta imp. fig.

Dillenii (Joh. Jac.) Hortus Elthamensis ; Lond. 1732. fol. mag. tab. aneæ 324.

Ferrari (Gio. Batt.) Flora overo cultura di fiori ; Romæ, 1633 in-4o ;. & 1638. Cest le même ouvrage intitulé, Ferrarius, de florum culturâ, imprimé à Amst. en 1646 & 1664. in-4° ;. avec fig.

Hortus Malabaricus ; Amstelod. ab anno 1678 ad annum 1693, douze tomes in-fol. avec fig.

Laurembergius (Petrus) de plantis bulbosis & tuberosis ; Francof. 1654. in-4o ;. avec figures.

Linnæi (Caroli) Hortus Cliffortianus ; Amstelodami, 1737, in-fol. fig.

Munting (Abraham) Phytographia curiosa ; Amst. 1711, in-fol. avec fig.

Passœus (Crispian), Hortus floridus ; Arnhemii, 1614, in-4o ;. oblong ; & à Utrecht, sous le titre de Jardin de fleurs, par Crispian de la Passe.

Parkinson (John.), A choice garden of all sorts of rarest flowers, &c. Lond. 1656. in-fol. avec fig.

Pontederæ (Julii) Anthologia ; Patavii, 1720, in-4o. cum fig.

Recueil de plantes orientales, occidentales, & autres, au nombre de 250 planches gravées par Robert, Châtillon, & Bosse ; ce recueil de fleurs est très-rare & d’un très-grand prix.

Rossi (Giovanus Domenicus), Nuova ricolta di fiori cavati di naturale ; in Roma, 1645, fol.

Sloane (Hans). Voyez son Voyage à la Jamaïque, en anglois ; London, 1707 & 1725, fig.

Swertius (Emmanuel), Florilegium ; Francof. 1612. Amstelod. 1647. in-fol. imp. Antuerp. 1651 & 1657, fol. avec figures qui sont d’une grande beauté.

Theatrum Floræ, in quo ex toto orbe venustiores flores æri incisi proferuntur ; Paris 1622, chez de Mathonniere, in-fol. On attribue ce recueil à Robert.

Toulouse (Guillaume), maître brodeur de Montpellier, Livre de fleurs, feuilles, & oiseaux, inventé & dessiné d’après le naturel ; à Montpellier, 1656, fol. fig.

Anonymes. Flower-garden displayd’ in above 400 curious representations of the most beautiful flowers, colour’d to the life ; London, 1735, fol.

J. H. Recueil de diverses fleurs mises au jour ; Paris, 1653, in-fol. Art. de M. le Chevalier de Jaucourt.

Fleur, (Agricult.) Les Jardiniers-Fleuristes restraignent le mot de fleur à quelques plantes qu’ils cultivent à cause de la beauté de leurs fleurs, & qui servent d’ornement & de décoration aux jardins ; tels sont les œillets, les tulipes, les renoncules, les anémones, les tubéreuses, &c. ce qu’il y a de singulier, c’est que nous n’avons point de belles fleurs, excepté les œillets, qui originairement ne viennent du Levant. Les renoncules, les anémones, les tubéreuses, plusieurs especes d’hyacinthes, de narcisses, de lys, en sont aussi venues ; mais on les a rectifiées en Europe par le secours d’un art éclairé. Il ne faut plus aller à Constantinople pour admirer ces fleurs ; c’est dans les jardins de nos curieux qu’il faut voir leur étalage successif, & en apprendre la culture.

Les fleurs ont des graines qui produisent des tiges ; & ces tiges sortent ou de racines ou d’oignons : ainsi on peut distinguer de deux sortes de fleurs ; celles qui viennent de racines, & celles qui viennent d’oignons : mais toutes ces fleurs peuvent se multiplier par des cayeux, par des boutures, par des tailles, & par des marcottes. Il seroit trop long de faire venir de toutes les fleurs par le moyen de leurs graines ; il est d’autres moyens dont nous parlerons : cependant comme il y a quelques fleurs qu’il faut élever de graines, nous commencerons par en indiquer la maniere.

De toutes les graines qui passent l’hyver, il y en a qu’on peut semer sur des couches, pour être replantées en d’autres lieux, & les autres ne se replantent que difficilement, ou point-du-tout. Les Jardiniers ordinaires sement toutes les graines des fleurs en quatre tems ; savoir, en Février, en Mars, en