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de mines attachées au-dessus du foyer ; 5o . de la qualité de la mine.

Dans le premier cas il n’y a point de remede, il faut mettre hors ; c’est arrêter le fourneau : dans le second, à force de rafraîchir d’arbue les parties attaquées du feu, on parvient à y faire fondre des parties qui remplissent les vuides ; c’est ce qu’on appelle plombage : dans le troisieme il n’y a pas à hésiter à rectifier la position des soufflets : dans le quatrieme il faut, avec de longs ringards du dessus de la bune, détacher les parties accrochées aux angles, & pendant quelques charges augmenter la castine & le vent. Ces morceaux seront aisément criblés par la fusion de la castine, & fondus par une augmentation de chaleur, sinon ils occasionneront un barbouillage, comme nous le dirons dans le cinquieme cas. Ou mêlez différentes mines, ou si vous ne pouvez, ajoûtez-y les parties d’arbue convenables. Ces accidens n’arrivent jamais sans faute. Dans le cas où la thuyere seroit bien endommagée du feu, il faut arrêter les soufflets, défaire le moins de maçonnerie qu’on pourra, y en substituer une nouvelle, & la réparer avec pierre & arbue le mieux que vous pourrez ; & du dessus mettant de l’arbue de ce côté-là, vous pouvez parvenir à la plomber & à continuer utilement votre ouvrage. Si c’est la tympe qui est brûlée, il faut arrêter les soufflets, boucher le feu avec de la terre, ouvrir le mur aux deux bouts, & y en mettre une autre, que vous maçonnerez avec pierre & arbue.

Comme avec l’alongement qu’on fait à la thuyere avec de l’arbue, on peut tourner le vent plus d’un côté que d’un autre, c’est à un fondeur à se servir de ce remede quand il voit quelques parties attaquées, jusqu’à ce qu’il soit parvenu à les plomber.

Les barbouillages viennent des mines mal nettoyées, mal mélangées, & en conséquence mal dirigées, tombant dans l’ouvrage quelquefois en gros volumes, provenans ou des morceaux détachés, comme nous l’avons dit, ou des mines gelées, ou trop humides, ou trop chargées d’arbue, ou des mines trop seches qui coulent à-travers les charbons, ou de la qualité des charbons, ou de l’inégalité des charges ou de trop de mines.

Dans tous ces cas, le remede est d’augmenter le vent, de soigner que les morceaux ne bouchent la thuyere, en les divisant à coups de ringard sans relâche : faites aider les ouvriers, multipliez-les ; le moindre retard est capable d’arrêter le vent : rectifiez vos charbons & les mines dans les charges qui suivent. Il est avantageux d’avoir des halles qui garantissent vos matériaux des gelées & de la pluie. Dans les grandes sécheresses on humecte les mines, pour les empêcher de couler trop vîte. Quand malgré le travail des ringards, qui doit principalement avoir la thuyere pour but, vous avez lieu de craindre que la quantité ou la qualité des matieres qui tombent dessus, n’infirment l’ouverture ; insinuez-y des charbons forts, qui entretiendront un degré de chaleur dans cette partie.

En général quand un dérangement viendra de manque de chaleur, gardez-vous bien de faire comme la plûpart des fondeurs qui diminuent la quantité de mines, au contraire entretenez le même degré tout-au-moins, mais choisissez celles qui fondent le mieux, ou joignez-y de la castine.

Ces accidens sont toûjours très-mauvais ; le moins est la perte de bien des matériaux, souvent d’une tympe, d’une thuyere, & la fin est quelquefois la mise-hors.

Un fourneau est vraiment un estomac qui veut être rempli avec égalité, uniformité & sans relâche ; sujet à des altérations par le défaut de nourriture, à des indigestions & crudités par la qualité ou

l’excès, & veut des remedes prompts. Vous connoissez le mal aux scories. Les mines chargées d’arbue les rendent si tenaces, qu’il faut les tirer avec les crochets, les vuider à la pelle ; de sorte qu’il en reste beaucoup qui n’ont pû se séparer de la fonte : le trop de castine les rend trop fluides, & dégraisse, pour ainsi parler, le métal. Les crasses des premieres sont boursoufflées, rapeuses, couleur de peau de crapaud ; les crasses des secondes sont blanchâtres & legeres. Les digestions loüables sont d’un beau noir poli, mêlé de verdâtre.

Il arrive encore qu’il s’attache dans l’ouvrage & le creuset même, des morceaux qu’il est difficile de détacher ; quand c’est du côté de la rustine, il n’y a rien à craindre : le travail du ringard, quand il y aura beaucoup de matiere en bain, en viendra à bout : si c’est devant la coulée, & que les ringards n’ayent pû les détacher, le plus expédient est de lever la pierre qui est sous le bouchage, qu’on nomme aussi coulée, & d’y en substituer une beaucoup plus élevée. Cette opération laissant au fond du creuset toûjours de la fonte en bain, ce qui est attaché se dissoudra, aidé de la pointe du ringard, sur-tout si, après avoir coulé, vous y jettez des crasses de forges pulvérisées, & y tournez le vent de la thuyere.

On entend que quand le fourneau est en feu, il faut qu’il soit servi nuit & jour & sans relâche, puisque le moindre refroidissement coagule les matieres en fusion : quand néanmoins il arrive quelque réparation à faire, comme aux soufflets, on prend le parti de le boucher. Quand les parois sont de brique, & l’ouvrage de grès, & qu’il n’y a rien d’endommagé, vous pouvez le vuider entierement, boucher le dessus avec une plaque de fonte garnie d’arbue, pour ôter la communication à l’air ; fermer la thuyere & le devant avec de l’arbue, achevant de couvrir le devant par une grande quantité de fasins secs. Quand les parois & l’ouvrage sont de pierre calcaire, que la moindre fraîcheur mettroit en dissolution, vous laissez fondre toute la mine qui est dans le fourneau, ne faisant les charges que de charbon, & vous bouchez exactement ; s’il ne prend point d’air, vous trouverez au bout de plusieurs jours le charbon à la même hauteur. En recommençant le travail, vous ne lui donnerez de la mine que par gradation. Un fourneau bien fermé peut attendre dix ou douze jours, quelquefois vingt à vingt-cinq : quand vous ne l’arrêtez que pour un jour ou deux, vous ne faites que trois charges sans mine ; & quand elles arriveront à l’ouvrage, vous coulez : nettoyez bien sur-tout le devant, & bouchez.

Quand l’ouvrage est bien dérangé par le feu, vous pouvez dans les mêmes parois de pierre calcaire en faire un autre : pour cela vous tiendrez tous vos matériaux prêts, nettoyerez bien le dedans, ferez souffler pour rafraîchir ; pendant que vous ouvrirez le devant & débarrasserez, garantissez les parois de l’humidité ; en deux ou trois jours un ouvrage peut & doit être en état de travailler. Comme l’humidité n’attaque pas la brique, il est avantageux sur-tout dans ces occasions, que les parois en soient construits.

Les éruptions sont pour les ouvriers & bâtimens voisins l’accident le plus terrible ; elles portent la mort au proche, & le feu au loin. C’est une explosion subite qui jette hors & très-loin toutes les matieres, fondues ou non, qui sont dans un fourneau ; c’est un volcan qui lance par toutes les ouvertures, & de toutes sortes de volumes, des morceaux enflammés : on a vû des charbons voler jusqu’à cinquante toises.

L’éruption, ou n’a lieu que dans le bas d’un fourneau, ou dans le dessus, ou elle est totale. Des morceaux attachés tombant tout-à-coup en gros volu-