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Le bois le plus leger est le plus propre à faire des baguettes ; celles des fusées de dix-huit lignes & au-dessous, doivent être de sapin de sciage ; quant à celles d’au-dessous, le coudre, le saule, & l’orme, fournissent abondamment des baguettes qui leur sont propres.

Il faut leur donner au moins huit fois la longueur du moule. Son épaisseur en quarré par l’un des bouts doit être d’un demi-diametre extérieur de la fusée ; & depuis le bout auquel on attache la fusée, elle doit aller en diminuant jusqu’à l’autre extrémité, qui se termine à un huitieme du même diametre.

Plus les baguettes ont de longueur, plus les fusées montent droit ; elles ne sauroient en avoir trop, pourvû que n’ayant en tête que la grosseur ci-dessus, elles se trouvent en équilibre à une certaine distance, lorsque les fusées y sont attachées : cette distance se regle par le diametre extérieur de la fusée ; on en donne deux & demi aux plus petites fusées, jusque & compris celles de 12 lignes ; pour celles d’au-dessus, jusque & compris celles de 2 pouces 2 diametres, & à celles par-delà, un diametre & demi ; suivant lesquelles proportions, la baguette d’une fusée d’un pouce doit être en équilibre à deux pouces & demi de la gorge. On cherche l’équilibre avec un couteau, sur le tranchant duquel on pose la baguette ; si elle est trop legere, il faut en changer ; lorsqu’il y va de peu de chose, on peut attacher la fusée d’un pouce ou deux plus haut ; cela donne plus de longueur & de poids à la baguette : si elle est trop pesante, il faut en ôter, soit en retranchant de sa longueur, si elle a plus de huit fois celle du moule, soit en ôtant de son épaisseur.

On fait une cannelure aux baguettes de sapin, dans l’endroit où la fusée doit être attachée, pour qu’elle soit plus stable. A l’égard des baguettes de branchages, il suffit d’unir avec un couteau & de rendre plane la surface du même endroit : l’extrémité du gros bout doit être coupée en talus, tant pour la propreté, que pour faire moins de résistance dans l’air.

La fusée étant placée dans la cannelure, jusque & non compris la ligature du pot, qui doit excéder la baguette, il faut la lier dans deux endroits du nœud de l’artificier ; premierement, un peu au-dessous du talus qui termine la baguette ; & en second lieu, dans l’étranglement : on fait une entaille à la baguette à chacun de ces endroits, pour que la ficelle ne glisse point.

On a imaginé en Angleterre, pour éviter les accidens causés par la chûte des grosses baguettes, d’en composer avec de petits saucissons faits de cartes à joüer. On les arrange de maniere, qu’en débordant les uns sur les autres, & étant collés de colle forte, & recouverts de bandes de papier collées de colle de farine, ils puissent former une continuité unie & solide. Chacun de ces saucissons contient entre deux étranglemens, la petite quantité de poudre nécessaire pour le faire crever. Une étoupille qui tire son feu du pot de la fusée, & qui communique a tous ces petits saucissons garnis chacun d’une étoupille, leur donne feu dans l’instant que la fusée jette sa garniture ; & la baguette se divise en autant de petites parties qui font une agréable escopeterie : la cherté de ces baguettes ne permet guere d’en faire que pour essais : on croit cependant que si elles étoient fabriquées par des ouvriers qui ne fissent que cela, ils parviendroient en peu de tems à un point d’habileté qui les mettroient en état de les donner à un prix modique.

Le chevalet est un poteau que l’on plante en terre, ou qui est soûtenu sur terre par un pié en forme de croix : il est traversé en haut par une barre de fer

plate posée sur tranche, sur laquelle on place les fusées l’une après l’autre pour les tirer.

Il y en a de plusieurs formes ; mais le plus simple de tous, & qui est d’autant plus commode qu’on le transporte aisément où l’on veut, est une perche armée par l’un de ses bouts d’un fer pointu qui sert à la piquer dans terre. On visse dedans à la hauteur que l’on veut, une vrille un peu longue, sur laquelle on tire les fusées.

Il faut débonneter la fusée, en crevant le papier d’un coup d’ongle, dans l’instant qu’on la pose sur le chevalet ; on y donne feu avec une lance placée au bout d’un porte feu, qui est un leger bâton d’environ cinq piés, & qui est terminé par une espece de porte-crayon de fer, dans lequel entre la lance, & que l’on y retient en la serrant avec un anneau coulant.

Art. VIII. Des serpenteaux, pluie de feu, marrons, saucissons, & étoiles dont on garnit les fusées volantes. Les serpenteaux destinés à garnir les fusées volantes & les pots à feu, sont faits de cartes à joüer : on donne à ceux d’une carte qu’on nomme vétille, trois lignes de diametre intérieur ; à deux cartes, trois lignes & demie ; & à trois cartes, quatre lignes : ceux d’un plus grand diametre doivent être faits en carton.

On charge ceux de trois lignes dans une espece de boisseau un peu moins haut de bord que les cartouches, de la maniere qui suit.

Les cartouches étant étranglés & liés, on les arrange tous droits dans le boîsseau, autant qu’il en peut tenir ; on frappe dans chacun un petit tampon de papier, pour boucher le trou de l’étranglement, & on y verse une mesure de poudre qui doit le remplir jusqu’à la moitié. Les ayant ainsi tous chargés en poudre, on répand dessus de la composition ; & on l’épanche avec une carte sur tous les cartouches. Lorsqu’ils en sont remplis, on prend la baguette à charger, & on les frappe avec un petit maillet, de huit coups chacun. On refait la même opération jusqu’à ce qu’ils soient remplis, à quatre lignes près, que l’on reserve pour les étrangler : on les retire ensuite du boisseau ; & après qu’ils sont étranglés, on ouvre leur gorge avec la pointe du culot, qui leur est propre ; on y place un bout d’étoupille, & on les amorce.

Les serpenteaux à deux & à trois cartes se chargent sur un culot qui porte une pointe dont la longueur est d’un diametre un quart de l’intérieur du cartouche, & la grosseur d’un tiers du même diametre ; on les frappe de dix coups à chaque charge. On commence par les charger jusqu’à moitié en composition : on met ensuite la poudre grainée & un tampon par-dessus ; puis on les étrangle & on les amorce, & ainsi qu’il vient d’être dit pour la vétille.

Lorsque l’on veut que les serpenteaux s’agitent beaucoup en l’air, on les charge sur une broche qui a de hauteur trois diametres & demi de l’intérieur du touche & un tiers d’épaisseur ; on les nomme alors serpenteaux brochetés. On en fait particulierement usage pour les pots à aigrettes.

Pour la pluie de feu, on moule de petits cartouches de papier sur une baguette de fer de deux lignes & demie de diametre ; on leur donne deux pouces & demi de longueur ; on ne les étrangle point : il suffit, ayant mis la baguette dedans, de tortiller le bout du cartouche, & de frapper dessus pour lui faire prendre son pli. On les remplit en les plongeant dans la composition : ils en prennent autant qu’il en faut pour chaque charge ; & après qu’ils sont chargés, on les amorce sans les étrangler. L’effet de cette garniture est de remplir l’air de feux ondoyans.