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lief, & l’autre le fond mate & pareillement de relief, & imprimer sur du papier ce dessein en or & en argent moulu, avec les balles & le rouleau, comme on imprime les papiers de tapisserie. Voyez Papier de Tapisserie. Ces impressions étant seches, l’on collera le papier sur le carton, & aussitôt on le posera par l’endroit de la dorure & argenture sur une autre planche gravée comme en C, du même dessein que les autres planches, mais les fleurs creusées & en dépouille, & placées dans celle marquée B ; puis les langes rabattus sur le tout, on passera sous la presse, & l’on gaufrera le carton, que l’on retirera promptement pour le mettre sécher. Si l’on vouloit épargner, ne point employer d’or, & cependant avoir une gaufrure d’or & d’argent, il ne faudroit que passer sous la presse avec cette troisieme planche seulement, le carton sur lequel l’on auroit collé du papier d’argent fin d’Allemagne, le gaufrer ; & lorsqu’il seroit sec, mettre avec le pinceau sur les fleurs ou l’or, le fond qu’on voudroit qui parût or, une couche de vernis fait avec la terra merita, & l’argent paroîtra-là aussi beau & de la même couleur que l’or.

Pour des écrans gaufrés des deux côtés & d’un même tour de presse, voici comment M. Papillon pere s’y prenoit. Il gravoit deux planches en creux & de dépouille de desseins différens, faits néanmoins de façon que ce qui étoit de relief & mate à l’une de ces planches & servoit de fond, étoit opposé aux parties du dessein creusées dans l’autre planche, afin que les planches posées l’une sur l’autre bien juste, gravure contre gravure, & le carton entr’elles, elles pussent sans se nuire le gaufrer des deux côtés. Et sur une planche unie comme en B, fig. 2. il avoit percé des trous chantournés en forme d’écrou. Il plaçoit d’abord dans chaque trou une planche, fig. 6. la gravure en-dessus ; il en avoit quatre à cet effet pour creuser avec plus de célérité deux écrans à-la-fois ; ses cartons étoient chantournés de même forme, dorés & argentés ; il les colloit deux ensemble par l’envers, & tandis qu’ils étoient moites de cette collure, il les portoit sur ces planches gravées, déjà mises dans les trous ; & par-dessus il plaçoit les autres planches, la gravure du côté du carton ; & ces planches & les autres ne passoient pas la superficie & le plan de la grande planche troüée : alors les langes rabattus, il passoit le tout sous la presse comme ci-dessus, & le carton pressé entre deux planches se trouvoit gaufré des deux côtés ; il levoit promptement, crainte que l’or & l’argent ne se détachassent. Il faisoit sécher. Il ne restoit qu’à border au pinceau avec de l’or moulu, & mettre les bâtons. Il prenoit à cet effet des cartons bien minces ou à boutonnieres, afin que deux collés ensemble ne fussent pas trop durs à gaufrer.

Nous avons fait encore des écrans qui n’étoient gaufrés que d’un côté, mais avoient au milieu une estampe qui s’imprimoit du même tour de presse ou de rouleau, en même tems que la gaufrure se faisoit. Pour ce travail, les planches gravées, pour les gaufrer, étoient précisément de l’épaisseur de la grande planche B, fig. 5. & au milieu de ces planches il y avoit un creux fait exprès, à pouvoir mettre la planche de cuivre destinée à imprimer l’estampe ou passe-partout, comme en D, fig. 7. On encroit cette planche de cuivre, on l’essuyoit bien, & on la mettoit dans la planche de bois à gaufrer, placée dans la grande planche B, comme il est représenté en E, fig. 8. puis le carton humecté par l’envers & posé sur le tout ; la place de l’estampe non-dorée & laissée blanche, on passoit sous la presse, & la gaufrure & l’impression en taille-douce se faisoient en même tems & du même tour de moulinet ou croisée de la presse.

Ces manieres de gaufrer le carton sont plus expé-

ditives & beaucoup moins fatigantes que celles de le

gaufrer par le frottement avec la dent de loup ou de sanglier, sur le moule de corne, comme se poussent les couvertures d’almanachs dont l’on parlera bientôt. Pour ces couvertures il seroit facile en troüant & creusant à cet effet la planche à queue d’aronde B, d’y mettre demi-douzaine de moules, soit de bois ou de corne, lesquels gaufreroient autant de couvertures d’almanachs ou autre chose, comme boîtes, portefeuilles, &c.

Si l’on vouloit faire des éventails, écrans ou autre chose à fleurs d’or & fond de couleur comme les couvertures de livres, il faudroit que les planches fussent de cuivre jaune, épaisses de demi-pouce au moins, & évidées dans les champs, soit en y laissant mordre l’eau-forte, soit en échopant avec de forts & larges burins ; & que les mates de fleurs & de figures en relief fussent gravées & ombrées avec le burin : & pour accélérer l’ouvrage, il seroit à-propos d’en avoir deux, afin que tandis qu’une passeroit sous la presse avec la feuille d’éventail ou d’écran, &c. l’autre pût chauffer. En suivant cette manœuvre, l’on dore premierement à l’eau froide le papier que l’on veut gaufrer, appliquant les feuilles d’or en plein par tout, par dessus la couleur du papier ; & quand le papier est un peu sec ainsi que l’or, la planche de cuivre un peu chaude & placée dans la table entaillée en A, fig. prem. le papier mis sur cette planche du côté de la dorure, les langes rabattus dessus, & le tout passé sous la presse, l’impression de cette dorure est faite. Par-tout où le cuivre aura appuyé & marqué, l’or ou l’argent en feuille seront attachés au papier. Le verre séché peu après, s’épouste avec la patte de lievre, ou avec du coton, & quitte le papier ou le carton, ensorte qu’il ne reste dessus l’un ou l’autre que les fleurs & les figures, comme l’on voit aux papiers dorés d’Allemagne. Si l’on vouloit imprimer en même tems à ces sortes d’ouvrages, des estampes gravées à certains endroits, l’on creuseroit la planche de cuivre jaune, pour y placer celle de cuivre rouge & gravée au burm ; on l’encreroit, on l’essuyeroit, on le placeroit comme a été dit plus haut sur semblable opération, & l’on passeroit le tout ensemble sous la presse.

Quant à la maniere de gaufrer le carton avec les moules de corne, l’on fait graver de relief ou plûtôt ciseler le dessein, le plus proprement qu’il est possible : ayant amolli la corne, on tire avec cette corne le creux du dessein qu’on a fait ciseler, donnant environ demi-pouce d’épaisseur à ces moules ; puis aux quatre coins l’on met à force des pointes de laiton ou de fer, que l’on rive par dessous, comme il est représente fig. 9. pour servir de repaires ou de guides à tenir en respect le carton que l’on voudra gaufrer. Cela fait, le carton doré ou argenté, coupé & préparé de la grandeur un peu excédante du moule, on le place de maniere que les pointes du moule le fixent en le traversant ; l’endroit est tourné sur le moule, & tout de suite avec la dent pointue, emmanchée à pouvoir être commodément remuée, l’on frotte fermement le carton par-tout, appuyant & repassant souvent la dent où l’on voit que le carton fléchit & entre dans les creux du moule ; après quoi on le retire d’entre les pointes. Si par hasard l’on remarque quelques endroits de la gaufrure manqués, ou peu marqués, on replace le carton dans les pointes, aux endroits déjà troüés, on le refrotte où il est nécessaire, on le retire, & l’on en pousse un autre si l’on veut. C’est ainsi communément que se font les couvertures d’almanachs de carton doré & argenté, qui se vendent à Paris, que l’on enjolive, qu’on découpe, & auxquels on donne des fonds de couleur : si on les a gaufré en blanc, on peut les peindre à volonté, & les vernir ensuite. Pour faire quelque chose de plus riche, j’a-