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pag. 1015, rapporte l’histoire de trois sujets qui avoient été baptisés & élevés pour filles, & dont les parties de l’homme se développerent à l’âge de puberté.

Quoiqu’il en soit, la verge de Marie-Anne Drouart, c’étoit son nom, recouverte de son prépuce, garnie d’un peu de poil à la racine, avoit son gland & deux corps caverneux ; mais le canal de l’urethre y manquoit pour le passage de l’urine ; le prépuce laissoit une ouverture, qui approchoit de la vulve d’une femme. Cette ouverture se terminoit en-bas par un repli assez semblable à la fourchette, avec un petit bouton, tel que celui qui se trouve dans les jeunes vierges. Au-dessus de ce bouton étoit le trou du canal de l’urethre, lequel canal étoit fort court. L’ouverture de la vulve étoit très-étroite, & admettoit avec peine l’intromission du petit doigt ; on n’y voyoit point de caroncules myrtiformes, ni d’apparence de testicules, soit dans les aînes, soit dans ce qui tient lieu de scrotum ; en un mot, ce sujet n’avoit & n’aura, s’il vit encore, la puissance d’aucun sexe.

Voilà les seuls faits autentiques de ma connoissance sur la maniere la plus étonnante, dont la nature se joue dans la conformation des parties de la génération. Je sai que plusieurs écrivains ont publié des traités exprès sur les hermaphrodites. Tel est Aldrovandus, dans son livre de Monstris, Bononiæ, 1642, fol. Caspar Bauhin, de Hermaphroditis ; Oppenheim, 1614, in-8°. Jacobus Mollerus, de Cornutis & Hermaphroditis, Berolini, 1708, in-4°. Duval, traité de l’Accouchement des femmes, & des Hermaphrodites, Rouen, 1612, in-8°.

J’ai parcouru tous ces écrits en pure perte, ainsi que les questions Medico-legales de Zacchias, Spondanus, ad annum 1478, num. 22. Bonaciolus, de conformatione fœtus ; les nouvelles littéraires de la mer Baltique, année 1704, par Loffhagen, & autres semblables, dont je ne conseille la lecture à personne. Je recommanderai seulement le discours de Riolan sur les hermaphrodites, dans lequel il prouve qu’il n’y en a point de vrais. Mais, ce qui vaut encore mieux, c’est l’ouvrage publié dernierement à Londres par M. Parsons, & qu’on auroit dû nous traduire en françois ; il est intitulé Parsons’s Mechanical, and Critical Enquiry into the nature of hermaphrodites, London, 1741, in-8o. L’auteur y démontre savamment & brievement, que l’existence des hermaphrodites n’est qu’une erreur populaire. (D. J.)

Hermaphrodite, (Mythol.) fils de Mercure & de Vénus, comme l’indique son nom. Ce jeune homme doué de toutes les graces de la nature, à ce que prétend l’histoire fabuleuse, fut éperduement aimé de la nymphe Salmacis, dont il méprisa la tendresse ; elle l’apperçut un jour qu’il se baignoit dans une fontaine de la Carie, & l’occasion lui parut favorable pour satisfaire son amour : mais le cœur de cet ingrat resta glacé ; & dans le désespoir où étoit la nymphe, de ne pouvoir faire passer jusqu’à lui une partie du feu qui la consumoit, elle invoqua les dieux, & leur demanda que du-moins leurs deux corps ne fussent jamais séparés ; sa priere fut écoutée, & par une étrange métamorphose, ils ne devinrent plus qu’une même personne. Ovide peint ce changement en ces mots,

Nec fæmina dici,
Nec puer ut possent, neutrumque, & utrumque videntur.

Le fils de Vénus obtint à son tour, que tous ceux qui se laveroient dans la même fontaine éprouveroient le même sort.

L’explication de cette fable n’est pas facile ; on sait seulement qu’il y avoit dans la Carie, près de la ville d’Halycarnasse, une fontaine célebre, où s’humaniserent quelques barbares qui étoient obli-

gés d’y venir puiser de l’eau aussi-bien que les Grecs.

Le commerce qu’ils eurent avec ceux-ci les rendit non-seulement plus polis, mais leur inspira le goût du luxe de cette nation voluptueuse ; & c’est peut-être, dit Vitruve, ce qui peut avoir donné à cette fontaine la réputation de faire changer de sexe. Au bout du compte, qu’importe la raison ? la fable est très-jolie. (D. J.)

HERMAPOLLON, s. m. (Antiq.) statue ou figure composée de Mercure & d’Apollon, représentant un jeune homme avec les symboles de l’une & de l’autre divinité, le pétase & le caducée, avec l’arc & la lyre. (D. J.)

HERMATHENE, s. f. (Antiq.) figure emblématique, représentant sur une même base, Mercure d’une part, & de l’autre Minerve, dont le nom grec est Athènes, suivant la remarque de Cicéron.

On connoît que des statues mises sur des piés quarrés représentent ces deux divinités dont nous parlons, par leurs attributs ; par exemple, le coq sous l’aigrette, les aîlerons sur le casque ; un sein d’homme, & la bourse, désignent Mercure ; le casque & l’égide, dévoilent Minerve. M. Spon a donné quelques représentations d’hermathenes, dans ses recherches d’antiquités. On y voit pag. 98, la forme d’un pié-d’estal, sur lequel est la figure de Pallas armée d’un casque, d’une pique & d’un bouclier.

Il étoit assez ordinaire de faire des fêtes, & des sacrifices communs à ces deux divinités, parce que l’une présidoit à l’éloquence, & l’autre à la science, & que l’éloquence sans érudition, n’est qu’un son infructueux, comme le savoir sans l’art de le mettre au jour, est un trésor souvent inutile. Il appartenoit aux Grecs d’avoir leurs lycées parés d’hermathenes ; il appartenoit à Cicéron d’en vouloir orner sa maison de Tusculum ; quidquid ejusdem generis habebis, écrivoit-il à Atticus, ne dubitaveris mittere… quod ad me de hermathenâ scribis, singulare insigne hujus gymnasii, per mihi gratum est, lui manda-t-il ensuite : enfin ayant reçu cette hermathene du choix d’Atticus, il en fut enchanté ; hermathena tua me valde delectat, lui écrivit-il pour l’en remercier.

Tristan dans son Comm. hist. tom. 1. a fait graver une médaille fort singuliere des Triumvirs, où sont d’un côté leurs trois têtes, & au revers une hermathene, devant laquelle est un autel entouré de serpens, qui s’élevent au-dessus, & derriere une aigle romaine ou légionaire ; mais Tristan ne s’est pas montré bien habile, en prenant le buste pour le dieu Terme, & en supposant conséquemment, qu’il se trouvoit ici trois divinités représentées.

Tout ce qu’on appelle hermathene, hermapollon, hermanubis, herméracle, herm’harpocrate, &c. sont des piés-d’estaux quarrés ou cubiques, portant l’embleme de Mercure, avec la tête d’une autre divinité seulement, & l’on en possede encore plusieurs pour preuve ; cependant je penserois volontiers avec M. Middleton, que les têtes des deux divinités ont été quelquefois jointes ensemble sur le même pilastre, & regardant de différens côtés, comme nous le voyons dans quelques figures antiques, que nous appellons toutes aujourd’hui indistinctement, du nom de janus. (D. J.)

* HERMÉE, s. m. (Chronolog.) le second mois de l’année des Thébains & des Béotiens. Il étoit de trente jours comme les autres, & répondoit à notre mois d’Octobre. C’étoit aussi le second de l’année thébaine, mais il répondoit à notre mois de Novembre.

Hermées, s. f. pl. (Antiq.) fêtes en l’honneur de Mercure, dont le nom grec étoit hermès ; on les célébroit avec différentes cérémonies, dans le Péloponnese, en Béotie, en Crete, & ailleurs. Pendant la célébration de ces fêtes dans l’isle de Crete, les