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On rompoit plus efficacement le ressort du poil de la laine, & l’on donnoit aux étoffes un lustre plus net & plus durable, autrefois qu’on étoit dans l’usage de les passer à la calandre ; mais on s’est apperçu que celles qui étoient foulées n’acquéroient point la fermeté qu’elles devoient avoir, en ne prenant point le cati ; ce qui a conduit à l’emploi de la presse. La presse aidée des plaques de fer ou de cuivre extrémement échauffées, donne la consistance qu’on exige.

Les ordonnances qui défendent de presser à chaud, sont des années 1508, 1560, 1601, & du 3 Décembre 1697 ; il faut s’y soumettre au moins pour les draps d’écarlate & rouge de garence, dont la chaleur éteint l’éclat. Mais pour éviter cet inconvénient, on tombe dans un autre, & ces étoffes non pressées à chaud, n’offrent jamais une qualité égale aux draps qui ont subi cette manœuvre.

Les fabriquans contraints d’opter, ont négligé les ordonnances sur la presse à chaud ; ils la donnent même aux couleurs qui la craignent, & ils n’en font pas mieux.

Les étamines & les serges, soit celles qui étant fort lisses ne vont pas à la foulerie, soit celles qui n’ont été que dégraissées ou battues à l’eau, soit celles qui ont été non-seulement dégraissées & dégorgées, mais foulées à sec pour être drapées, doivent toutes être rinsées & aérées. On les retire de la perche pour leur donner les derniers apprêts, dont le but principal est d’achever de détruire les causes de rétraction & de ressort qui troublent l’égalité du tissu, d’incliner d’un même sens tous les poils d’un côté, d’en former l’endroit, & d’établir ainsi une sorte d’harmonie dans l’étoffe entiere, par la suppression des dérangemens & tiraillemens des fibres extérieures, & l’uniformité de la réflexion de la lumiere au-dehors.

C’est ce que l’on observe en faisant passer au bruisage les étamines délicates, & au retendoir ou bien à la calandre, toutes les étoffes foulées.

Du bruisage. Bruir des pieces d’étoffes, c’est les étendre proprement chacune à part, sur un petit rouleau ; & coucher tous ces rouleaux ensemble dans une grande chaudiere de cuivre rouge & de forme quarrée, sur un plancher criblé de trous, & élevé à quelque distance du vrai fond de la chaudiere.

On remplit d’eau l’intervalle du vrai fond, ou faux fond percé de trous ; on fait chauffer, on tient la chaudiere bien couverte. La vapeur qui s’éleve & qui passe par les trous du faux fond, est renvoyée par le couvercle de toutes parts sur les étoffes, les pénetre peu-à-peu, & assouplit tout ce qui est de roide & d’élastique ; la presse acheve de détruire ce qui reste.

Du retendoir. Il en est de même du retendoir. Après avoir aspergé d’une eau gommée tout l’envers de l’étoffe, & l’avoir mise sur un grand rouleau, on en applanit plus efficacement encore tous les plis & toute l’inégalité des tensions, en dévidant lentement l’étoffe de dessus son rouleau, & la faisant passer sur une barre de fer poli, qui la tient en état au-dessus d’un grand brasier capable d’en agiter jusqu’aux moindres fibres, & en la portant de-là sur un autre rouleau qui l’entraîne uniment à l’aide d’une roue, d’une chevre ou d’un moulinet. L’étoffe va & vient de la sorte à diverses reprises d’un rouleau à l’autre ; c’est l’intelligence de l’appréteur qui regle la machine & la manœuvre.

Voyez figure 46. le retendoir. AAAA, le banc ; bb, le rouleau ; ccc, les traverses, dessus & dessous lesquelles passe l’étoffe ; ddd, l’étoffe ; ee, la poele à mettre un brasier, qu’on glisse sous l’étoffe près du rouleau.

Enfin l’étoffe soit bruisée, soit retendue, est plissée, feuilletée, mise à la presse, ou même calandrée, puis empointée, ou empaquetée avec des ficelles qui saisissent tous les plis par les lisieres.

Il y a encore quelques apprêts qui different des précédens ; telle est la gauffre. Voyez l’article Gauffrer.

Il y a des étoffes gauffrées & qui portent ce nom, parce qu’on y a imprimé des fleurons, ou compartimens avec des fers figurés. Il y a des serges peintes qui se fabriquent & s’impriment à Caudebec en Normandie. Le débit en est d’autant plus considérable, que tout dépend du bon goût du fabriquant, du dessein & de la beauté des couleurs.

Il y a des étoffes tabisées ou ondées comme le gros taffetas qu’on nomme tabis, parce qu’ayant été inégalement, & par des méthodes différentes de l’ordinaire, pressées sous la calandre, le cylindre quoique parfaitement uni, a plié une longue enfilade de poils en un sens, & une autre enfilade de poils sur une ligne ou pression différente ; ce qui donne à la soie ou la laine ces différens effets de lumiere ou sillons de lustre, qui semblent se succéder comme des ondes, & qui se conservent assez long-tems ; parce que ce sont les impressions d’un poids énorme, qui dans ses différentes allées & venues, a plutôt écrasé que plié les poils & le grain de l’étoffe.

On fit il y a plusieurs années à la manufacture de Saint-Denis des expériences sur une nouvelle méthode de fabriquer les étoffes de laine, sans les coller après qu’elles sont ourdies, comme c’est l’usage.

Il s’agit de préparer les fils d’une façon, qui leur donne toute la consistance nécessaire.

Nous ne savons ce que cela est devenu.

Nous finirons cet article en rassemblant sous un même point de vûe quelques arts assez différens, qui semblent avoir un but commun, & presque les mêmes manœuvres ; ces arts sont ceux du Chapelier, du Perruquier, du Tabletier-Cornetier, du Faiseur de tabatieres en écaille, & du Drapier. Ils emploient tous, les uns les poils des animaux, les autres l’écaille, les cheveux, & tous leurs procédés consistent à les amollir par la chaleur, à les appliquer fortement, & à les lier.

Laine hachée, Tapisserie en laine hachée, (Art méchan.) Comme nous ne fabriquons point ici de ces sortes d’ouvrages, voici ce que nous en avons pu recueillir.

1. Préparez un mélange d’huile de noix, de blanc de cérule & de litharge ; employez ce mélange chaud.

2. Que votre toile soit bien étendue sur un métier.

3. Prenez un pinceau ; répandez par-tout de votre laine hachée, & que cette laine soit de la couleur dont vous voulez que soit votre tapisserie.

4. Si vous voulez varier de dessein coloré votre tapisserie ; lorsque votre laine hachée tiendra à la toile, peignez toute sa surface comme on peint les toiles peintes : ayez des planches.

5. Si vous voulez qu’il y ait des parties enfoncées & des parties saillantes, & que le dessein soit exécuté par ces parties saillantes & enfoncées, ayez un rouleau gravé avec une presse, comme pour le gauffrer des velours. Un ouvrier enduira le rouleau de couleurs avec des balles ; un autre ouvrier tournera le moulinet ; l’étoffe passera sur le rouleau, sera pressée & mise en tapisserie.

LAINERIE, terme de, (Commerce, Manufact.) voici d’après Savary, Ricard & autres, l’explication de la plupart des termes de lainerie ou lainage, qui sont usités dans le Commerce & les Manufactures de France.

Laine d’agnelin, laine provenant des agneaux &