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LOTISSAGE, (Métallurgie.) opération qui se pratique pour être plus sûr de la quantité de métal que contient une mine, dont on veut faire l’essai. Pour cet effet, quelque métal que contienne la mine, c’est-à-dire soit qu’elle soit une mine d’argent, de plomb, de cuivre, de fer, &c. on commence par la trier. Voyez Triage. Quand elle a été triée, on en fait un monceau ou un tas, & l’on enleve de la mine avec une petite pelle dans différens endroits du monceau, & même dans son intérieur ; on mêle tout ce qu’on a ainsi pris dans ce monceau, & on le met sur une place bien nette ; on le pulvérise pour rendre la mine plus menue qu’elle n’étoit d’abord ; on la mêle bien, & on en forme un tas arrondi, on partage ce tas en deux parties égales ; on prend une de ces parties qu’on réduit en une poudre encore plus fine ; on la mêle & on la divise encore en deux parties égales ; enfin, quand la mine a été bien mêlée, on la met dans un mortier de fer, ou on la pulvérise & on la tamise jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien sur le tamis. Quand la mine a été ainsi préparée, on en prend ce qu’il faut pour les essais, ou bien on en remplit autant de boîtes qu’il est nécessaire, & on les cachete.

Pour le lotissage des mines déja pilées, on prend indifféremment de cette mine avec un cueiller de fer, & l’on a soin de prendre aussi de la pierre ou du spath qui a été écrasé avec la mine, afin de connoître au juste le produit de la mine telle qu’elle est ; on la pulvérise, on la tamise de la maniere qui a été dite, & avec les mêmes précautions. On en use de même pour les mines lavées, après les avoir séchées.

Cette opération est d’une très-grande conséquence. En Allemagne, ceux qui sont chargés du lotissage des mines, sont des officiers publics qui ont prêté serment de choisir avec équité. Voyez le Traité de la fonte des mines de Schlutter.

LOTISSEMENT, s. m. (Comm.) est le partage qui se fait au sort d’une marchandise arrivante à un port, ou dans un marché, ou à un bureau de marchands, entre les différens marchands qui se présentent pour acheter ; c’est un très-bon expédient pour empêcher le monopole des riches marchands ou artisans, qui enleveroient toute la marchandise au préjudice de ceux de leurs confreres qui sont plus pauvres qu’eux. Voyez Eneau.

LOTISSEUR, s. m. (Commerce.) celui qui fait le partage & la division des lots. La plûpart des communautés qui font lotir les marchandises, ont des lotisseurs choisis d’entre les maîtres de la communauté ; quelques-unes, comme celle des courroyeurs, ont des lotisseurs en titre d’office. Dict. de commerce.

LOTOPHAGES, (Géogr. anc.) peuples d’Afrique, auprès du golfe de la Sidre, ainsi nommés, parce qu’ils se nourrissoient du fruit du lotus. Ptolomée, l. III. c. iv. place l’île des Lotophages, Lotophagites insula, dans le même golfe. On croit que c’est présentement l’île de Zerbi, que nous appellons l’île de Gerbes.

Ulysse, dit Homere, ayant été jetté par la tempête sur la côte des Lotophages, envoya deux de ses compagnons pour la reconnoître. Les habitans enchantés de l’abord de ces deux étrangers, ne songerent qu’à les retenir auprès d’eux, en leur donnant à goûter de leur lotus, ce fruit agréable qui faisoit oublier la patrie à tous ceux qui en mangeoient ; c’est qu’on l’oublie naturellement au milieu des plaisirs. (D. J.)

LOTUS, le, s. m. (Botan.) nom commun à plusieurs genres de plantes, & qui peut justifier que les Botanistes modernes ne sont pas toujours exempts des défauts d’homonimie qu’ils reprochent à leurs prédécesseurs.

Saumaise a perdu son tems & ses peines à vouloir découvrir quelles sont les diverses plantes, auxquelles les anciens ont donné le nom de lotus. Tout ce qu’il en dit, n’est qu’un étalage d’érudition qui ne répand aucune lumiere sur ce sujet. Il est clair qu’il ne faut pas espérer de rien apprendre par l’étymologie du nom, parce que ce nom est commun à beaucoup de plantes, & que Théophraste avoue qu’il y en a effectivement plusieurs qui le portent.

Cependant à force de recherches, il semble du moins que nous soyons parvenus à connoître aujourd’hui le lotus en particulier, dont parle le même Théophraste, le lotus, dis-je, qui croissoit en Egypre & au bord du Nil.

Le merveilleux qui se lit dans la description qu’en a donnée cet auteur, avoit tellement & si long-tems ébloui les Botanistes, que ne trouvant rien de plus commun dans les campagnes arrosées par le Nil que des nymphæa, ils ont été des siecles entiers à n’oser croire que c’en fût un.

Abanbitar, savant medecin de Malaga, est le premier qui l’ait reconnu pour tel, dans le voyage qu’il fit au Caire avec Saladin, au commencement du xiij. siecle. Prosper Alpin en est convenu depuis ; & de nos jours, M. Lippi, à qui l’amour de la Botanique fit entreprendre en 1704 le voyage de la haute Egypte, a confirmé cette notion dans les mémoires de ses découvertes, qu’il envoyoit à M. Fagon, premier medecin du feu roi.

La figure que nous en avons la plus conforme à la description de Théophraste, nous a été donnée d’après nature par l’auteur du recueil des plantes de Malabar ; les parties qui en sont représentées sur les monumens, s’y trouvent très-conformes. La fleur est de toutes ces parties celle qui s’y remarque le plus ordinairement en toutes sortes d’états ; ce qui vient du rapport que ces peuples croyoient qu’elle avoit avec le soleil, à l’apparition duquel elle se montroit d’abord sur la surface de l’eau, & s’y replongeoit dès qu’il étoit couché ; phénomene d’ailleurs très-commun à toutes les especes de nymphæa.

C’étoit-là l’origine de la consécration que les Egyptiens avoient faite de cette fleur à cet astre le premier & le plus grand des dieux qu’ils ayent adoré. De là vient la coûtume de la représenter sur la tête de leur Osiris, sur celle d’autres divinités, sur celle même des prêtres qui étoient à leur service. De tous tems & en tous pays les prêtres ont voulu partager les honneurs qu’on rend aux divinités qu’ils servent.

Les rois d’Egypte affectant les symboles de la divinité, se sont fait des couronnes de cette fleur. Elle est aussi représentée sur les monnoies, tantôt naissante, tantôt épanouie, & environnant son fruit. On la voit avec sa tige comme un sceptre royal dans la main de quelques idoles.

Le lotus de Théophraste est donc l’espece de nénuphar, nommée nymphæa alba, major, ægyptiaca, par quelques-uns de nos Botanistes, & que Prosper Alpin a si bien décrite dans son second livre des plantes d’Egypte, chap. xvj.

Sa tige ressemble à celle de la feve, & pousse quantité de fleurs blanches, comme celles du lis. Ses fleurs se resserrent, plongent la tête dans l’eau quand le soleil se couche, & se redressent quand il paroît sur l’horison. Il porte une tête & une graine comme le pavot, ou semblable au millet dont les Egyptiens faisoient autrefois du pain, ainsi que le témoignent Hérodote & Théophraste. Cette plante a une racine faite en pomme de pin, qui est bonne à manger crue & cuite.

Il y a une autre espece de lotus ou de nymphæa, dont Cluvius & Herman nous ont donné des figures,