Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/714

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tres gens de lettres, dont Lucques est la patrie. (D. J.)

LUCQUOIS, le, (Géog.) ou l’état de la république de Lucques, en italien il Luchese, pays d’Italie, sur la mer de Toscane, d’environ 31 milles de long sur 25 au moins de large. C’est un petit état souverain, dont le gouvernement aristocratique, sous la protection de l’empereur, paroît très-sage & très-bien entendu.

Le chef est nommé gonfalonnier ; il porte un bonnet ducal, de couleur cramoisi, bordé d’une frange d’or ; le terroir que possede la république a du vin, mais il abonde principalement en olives, lupins, phaseoles, chataignes, millet, lin & soie. Les Lucquois vendent de ce dernier article, tous les ans, pour trois à quatre cent mille écus.

Leur mont de Piété, ou leur office d’abondance, comme ils l’appellent (établissement admirable dans tout pays de commerce) prend de l’argent à cinq pour cent des particuliers, & le négocie en toutes sortes de marchandises avec les pays étrangers, en Flandres, Hollande, Angleterre, ce qui rapporte un grand profit à l’état. Il prête aussi du blé aux habitans qui en ont besoin, & s’en indemnise peu-à-peu. Tous les fours sont à la république, qui oblige d’y cuire tout le pain qui se mange, & c’est une idée fort censée : la ville de Lucques est la capitale de cet état, également économe & industrieux. (D. J.)

LUCRATIF, adj. (Jurisprud.) se dit de ce qui emporte le gain de quelque chose comme un titre lucratif, ou une cause lucrative : les donations, les legs sont des titres lucratifs : deux causes lucratives ne peuvent pas concourir pour la même personne sur un même objet, c’est-à-dire, qu’elle ne peut pas avoir deux fois la même chose. Voyez Titre lucratif & Titre onéreux. (A)

LUCRE, s. m. (Gram.) c’est le gain, le profit, le produit des actions, des professions qui ont pour objet l’intérêt & non l’honneur ; dans les professions les plus honorées, si le profit devient considérable, il dégénere en lucre, & la profession s’avilit.

LUCRETILE, (Géog. anc.) Lucretilis, montagne de la Sabine, en Italie, dans le canton de Bandusie, peu loin de la rive droite de la Currèze. Horace avoit sa maison de campagne sur un côteau de ce mont, & je trouve qu’elle étoit mal placée pour un poëte qui ne haissoit pas le bon vin ; car les vignobles de tout le pays, & particulierement du mont Lucretile, étoient fort décriés ; mais il avoit tant d’autres agremens, qu’Horace n’a pu s’empêcher de le célébrer & d’y inviter Tyndaride : « Faune, lui dit-il, ne fait pas toûjours sa démeure sur le Lycée ; souvent il lui préfere les délices de Lucretile ; c’est-là qu’il garantit mes troupeaux contre les vents pluvieux, & contre les chaleurs brûlantes de l’été. Il ne tiendra qu’à vous de venir dans ce riant séjour ».

Velox amœnum sæpè Lucretilem
Mutat Lycæo Faunus, & igneam
Defendit ætatem capellis
Usque meis, pluviosque ventos, &c.

Ode xv ij. liv. I.


(D. J.)

LUCRIN le, (Géog. anc.) Lucrinus lacus, lac d’Italie, qui étoit sur les côtes de la Campanie, entre le promontoire de Misène & les villes de Bayes & de Pouzzoles, au fond du golphe Tyrrhénien.

Il communiquoit avec le lac Averne, par le moyen d’un canal qu’Agrippa fit ouvrir l’an 717 de Rome. Il construisit dans cet endroit un magnifique port, le port de Jules, portus Julius, en l’honneur d’Auguste, qui s’appelloit alors seulement Julius Octavianus ;

la flatterie ne lui avoit pas encore décerné d’autre titre.

Outre Pline & Pomponius Méla, nous avons Horace, qui parle plus d’une fois du lac Lucrin ; tantôt ce sont les huitres de ce lac qu’il vante, à l’imitation de ses compatriotes : non me Lucrina juverint conchilia, Ode xj. liv. V. « Non, les huitres du lac Lucrin ne me feroient pas faire une meilleure chere ». En effet, les Romains donnerent longtems la préférence aux huitres de ce lac ; ils s’en régaloient dans les festins de nôces, nuptiæ videbant ostreas lucrinas, dit Varron ; ils les regardoient comme les plus délicates, concha Lucrini delicatior stagni, disoit Martial de son tems : ensuite ils aimerent mieux celles de Brindes & de Tarente ; enfin ils ne purent plus souffrir que celles de l’Océan atlantique.

Horace portant ses réflexions sur les progrès du luxe dit, qu’il avoit formé de grands viviers & de vastes étangs dans les maisons de plaisance, des étangs même d’une plus grande étendue que le lac Lucrin.

. . . . . Undique latius
Extincta visentur Lucrino
Stagna lacu.

Ode xv. liv. II.

Mais nous ne pouvons plus juger de la grandeur de ce lac, ni du mérite de ses coquillages. En 1538, le 29 Septembre, le lac Lucrin fut presque entierement comblé ; la terre, après plusieurs secousses, s’ouvrit, jetta des flammes & des pierres brûlées en si grande quantité, qu’en vingt-quatre heures de tems il s’éleva du fond une nouvelle montagne qu’on nomma Monte nuovo di Cinere, & que Jules-César Capaccio a décrite dans ses antiquités de Pouzzoles, historia Puteolana, cap xx. Ce qui reste de l’ancien lac, autour de cette montagne, sur laquelle il ne croît point d’herbes, n’est plus qu’un marais qu’on appelle lago di Licola. Voyez Licola, (Géog.) (D. J.)

LUCULLEUM MARMOR, (Hist. nat.) nom que les anciens donnoient à un marbre noir sans veines, très-dur, & qui prenoit un très-beau poli : lorsqu’il étoit cassé on remarquoit dans l’endroit de la fracture des petits points luisans comme du sable. Son nom lui a été donné, parce que Lucullus fut le premier qui en introduisit l’usage à Rome, & l’apporta d’Egypte. On en trouve en Italie, en Allemagne, en Flandres, & dans le comté de Namur. Les Italiens le nomment nero antiquo, noir antique : on le nomme aussi marbre de Namur.

LUCULLIENS jeux, (Littér.) ludi luculliani, jeux publics, que la province d’Asie décerna à Lucullus, en mémoire de ses bienfaits.

Ce général romain célebre par son éloquence, par ses victoires, & par ses richesses, après avoir chassé Mithridate du Pont, & soumis presque tout le reste de ce royaume, employa près d’un an à réformer les abus que les exactions des traitans y avoient introduits. Il remédia à tous les desordres, & gagna si fort l’estime & le cœur de toute la province, qu’elle institua, l’an 70 avant Jesus-Christ, des jeux publics en son honneur, qui furent nommés luculliens, & qui durerent assez long-tems ; on les célébroit tous les ans avec un nouveau plaisir ; mais les partisans voyant leurs grosses fortunes détruites par les reglemens de Lucullus, vinrent cabaler fortement à Rome contre lui, & firent si bien par leur argent & leurs intrigues, qu’on le rappella & qu’on lui donna un successeur qui recueillit les lauriers dûs à ses victoires. (D. J.)

LUCUMA, s. m. (Botan. exot.) arbre qui vient en plein vent dans le Pérou : il a de grandes racines ; son tronc est de la grosseur d’un homme ; l’é-