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les vertus mêmes des payens sont des crimes ; que nous ne sommes justes que par l’imputation des mérites & de la justice de Jesus-Christ. Il blâmoit le jeune & l’abstinence de la viande, les vœux monastiques & le célibat des personnes consacrées à Dieu.

Il est sorti du luthéranisme trente neuf sectes toutes différentes ; savoir les Confessionistes appellés Miricains, les Antinomiens, les Samosatenses, les Inferains, les Antidiaphoristes, les Antiswenkfeldiens, les Antosandrins, les Anticalvinistes, les Imposeurs des mains, les Bissacramentaux, les Trisacramentaux, les Confessionistes, les Mous-philosophes, les Maionistes, les Adiaphoristes, les Quadrisacramentaux, les Luthero-Calvinistes, les Anmétistes, les Mediosandrins, les Confessionistes opiniâtres & Récalcitrants, les Sufeldiens, les Onandrins, les Stanoanriens, les Antisancariens, les Zuingliens simples, les Zuingliens significatifs, les Carlostatiens, les Tropistes évargiques, les Arrabonaires, les Sucéfeldiens spirituels, les Servetiens, les Davitiques ou Davidi-Georgiens, & les Memnonites. Jovet, tome I. p. 475. Dictionn. de Trévoux.

LUTHÉRIEN, (Théol.) celui qui suit, qui professe le luthéranisme, les sentimens de Luther. Voyez Luthéranisme.

Les Luthériens sont aujourd’hui de tous les Protestans les moins éloignés de l’Eglise catholique ; ils sont divisés en plusieurs sectes, dont les principales se trouvent aux articles suivans, & à leur rang dans le cours de cet ouvrage.

Luthérien mitigé, celui qui a adouci la doctrine de Luther, ou qui suit la doctrine de Luther adoucie. Melanchthon est le premier des luthériens mitigés.

Luthérien relâché, c’est un des noms que l’on donna à ceux qui suivirent l’interim & qui firent trois partis différens, celui de Melanchthon, celui de Pacius ou Pefessinger, & de l’université de Léipsic, & celui des théologiens de Franconie. Voyez Interim & Adiaphoristes.

Luthérien rigide, celui qui soutient encore l’ancien luthéranisme de Luther & des premiers luthériens.

Il n’y a, principalement sur la prédestination & la grace, plus ou presque plus de luthériens rigides. Le chef des luthériens rigides fut Flaccius Illyricus. le premier des quatre auteurs de l’histoire ecclésiastique divisée en centuries, & connue sous le nom de centuries ou centuriateurs de Magdebourg. Il ne pouvoit souffrir que l’on apportât quelque changement à la doctrine de Luther.

Luthero-Calviniste, celui ou celle qui soutient les opinions de Luther conjointement avec celles de Calvin, autant qu’on peut les concilier, ce qui est impossible en quelques points, sur-tout sur la présence réelle.

Luthero-Osiandrien, celui ou celle qui fait un mélange de la doctrine de Luther & de Luc Osiander.

Luthero-Papiste, c’est le nom qu’on a donné aux luthériens qui se servoient d’excommunication contre les sacramentaires.

Luthero-Zuinglien, celui ou celle qui mêle les dogmes de Zuingle à ceux de Luther.

Les Luthero-Zuingliens eurent pour chef Martin Bucer, de Schelestadt en Alsace, où il naquit en 1491, & qui, de dominicain qu’il étoit, se fit, par une double apostasie, comme disent les Catholiques, luthérien.

Les Luthero-Zuingliens firent moins un mélange de la doctrine de Luther & de Zuingle, qu’une société de luthériens & de zuingliens qui se toléroient mutuellement, & convinrent ensemble de souffrir les dogmes les uns des autres. Dictionn. de Trévoux.

Luthérien, s. m. On appelle, en terme d’arts, luthérien un joueur de luth. Il n’y a jamais eu en cette partie d’homme plus fameux & plus distingué

qu’Anaxenor. Non-seulement les citoyens de Thiane lui rendirent des honneurs extraordinaires, mais Marc-Antoine, qui étoit enchanté des talens de cet artiste, lui donna des gardes & le revenu de quatre villes : enfin après sa mort on lui fit dresser une statue. Voyez pour preuve Strabon, liv. XXIV.

Jacob, connu sous le nom du Polonois, a été regardé comme le premier joueur de luth du xvij. siecle. Ballard imprima quantité de pieces de sa composition, parmi lesquelles les gaillardes sont celles que les Musiciens estiment davantage.

Les Gautiers marcherent sur les traces du Polonois, & ont été les derniers joueurs de luth de réputation. La difficulté de bien toucher cet instrument de musique à cordes, & son peu d’usage dans les concerts, l’ont fait abandonner. On lui a préféré le violon, qui est plus facile à manier, & qui produit d’ailleurs des sons plus agréables, plus cadencés & plus harmonieux. (D. J.)

LUTIN, s. m. (Hist. des superst.) Un lutin est, dans l’esprit des gens superstitieux, un esprit malin, inquiétant, nuisible, qui ne paroît que de nuit, pour tourmenter & faire du mal, du dégât, du désordre.

Les noms de lutin, de phantôme, de spectre, de revenant & autres semblables, abondent dans les pays à proportion de leur stupidité & de leur barbarie. C’est pour cela qu’autrefois il y avoit dans presque toutes les villes du royaume, des noms particuliers des lutins de chacune de ces villes, dont on se servoit encore plus malheureusement pour faire peur aux enfans. C’étoit le moine bouru à Paris, la mala-bestia à Toulouse, le mulet-odet à Orléans, le loup-garou à Blois, le roi Hugon à Tours, Fortépaule à Dijon, &c. On faisoit de ces noms ridicules l’épouventail des femmellettes, ainsi que le cannevas de mille fables absurdes ; & il faut bien que cela fût très-répandu, puisque M. de Thou n’a pas dédaigné d’en parler dans son histoire. Ce qui prouve que nous vivons dans des tems plus éclairés, c’est que tous ces noms ont disparu : rendons en grace à la Philosophie, aux études & aux gens de lettres. (D. J.)

LUTRIN, s. m. terme d’église, pupitre sur lequel on met les livres d’église, & auprès duquel les chantres s’assemblent ; mais ce mot est principalement consacré au pupitre, qui est placé au milieu du chœur. Nos peres l’ont appellé leteri, lettri, létrin, du mot grec λιοῦτρον, dit du Cange, parce que c’étoit le lieu où on lisoit l’évangile. Entre les beautés de détail dont est rempli le poëme du lutrin de M. Despréaux, on doit compter celle de la description du lutrin même. Le poëte, après avoir parlé du chœur de l’église, ajoute :

Sur ce rang d’ais serrés qui forment sa clôture,
Fut jadis un lutrin d’inégale structure,
Dont les flancs élargis de leur vaste contour
Ombrageoient pleinement tous les lieux d’alentour :
Derriere ce lutrin, ainsi qu’au fond d’un antre,
A peine sur son banc on discernoit le chantre ;
Tandis qu’à l’autre banc, le prélat radieux
Découvert au grand jour, attiroit tous les yeux, &c.

Boileau pouvoit se vanter d’avoir le talent d’annoblir en poésie les choses les plus communes, & c’est en cela, c’est dans le choix des termes & des tours que consiste son grand mérite. (D. J.)

LUTTE, s. f. (Art gymnastique.) combat de deux hommes corps à corps, pour éprouver leur force & voir qui terrassera son adversaire.

C’étoit un des plus illustres exercices palestriques des anciens. Les Grecs, qui l’ont cultivé avec le plus de soin & qui l’ont porté à la plus haute perfection, le nommoient πάλη, mot que nos Grammairiens modernes dérivent de πάλλειν, secouer, agiter, ou de πάλος, de la boue, à cause de la poussiere dont