Aller au contenu

Page:Diderot - Le Neveu de Rameau.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’une voix basse et sanglotante : « Pardon, madame ! pardon ! je suis un indigne, un infâme. Ce fut un malheureux instant, car vous savez que je ne suis pas sujet à avoir du sens commun, et je vous promets de n’en avoir de ma vie. »

(Ce qu’il y a de plaisant, c’est que, tandis que je lui tenais ce discours, il en exécutait la pantomime, et s’était prosterné ; il avait collé son visage contre terre, il paraissait tenir entre ses deux mains le bout d’une pantoufle, il pleurait, il sanglotait, il disait : « Oui, ma petite reine, oui, je le promets, je n’en aurai de ma vie, de ma vie… » Puis se relevant brusquement, il ajouta, d’un ton sérieux et réfléchi :)

LUI. — Oui, vous avez raison ; je vois que c’est le mieux. Elle est bonne ; M. Vieillard dit qu’elle est si bonne ! Moi je sais un peu qu’elle l’est : mais cependant aller s’humilier devant une g*****, crier miséricorde aux pieds d’une petite histrionne que les sifflets du parterre ne cessent de poursuivre ! Moi Rameau, fils de Rameau, apothicaire de Dijon, qui est un homme de bien, et qui n’a jamais fléchi le genou devant qui que ce soit ! Moi Rameau, qu’on voit se promener, droit et