Page:Diderot - Oeuvres completes, Garnier, T15-16.djvu/666

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108 MÉDITATION. Quelle que soit la justice d'un souverain, il fera des mécontents. On ne peut guère obliger un homme qu'en lui accordant la préférence sur beaucoup d'autres, dont on fait ordinairement autant de mécontents. 11 faut moins craindre de mécontenter que d'être partial. Les ouvriers sont presque tous des malheu- reux, qu'il y aurait de l'inhumanité à mécontenter en retenant une partie de leur salaire. 11 est difficile qu'un mécontentement qui n'est pas fondé puisse durer longtemps. Quand on s'est fait un caractère d'équité, on ne mécontente qu'en s'en écartant; quand, au contraire, on est sans caractère, on mécontente éga- lement en faisant bien ou mal. Les hommes n'ayant plus de règle que leur intérêt, à laquelle ils puissent rapporter votre conduite, ils se rappellent les injustices que vous avez com- mises; ils trouvent fort mauvais que vous vous avisiez d'être -équitable une fois à leurs dépens, et leurs murmures s'élèvent. MLDISANCE, s. f. [Monde.]. Médire, c'est donner atteinte à la réputation de quelqu'un, ou en révélant une faute qu'il a commise, ou en découvrant ses vices secrets; c'est une action de soi-même indifférente. Elle est permise et quelquefois même nécessaire, s'il en résulte un bien pour la personne qu'on accuse, ou pour celles devant qui on la dévoile : ce n'est pas là précisément médire. On entend communément par médisance une satire maligne lâchée contre un absent, dans la seule vue de le décrier ou de l'avilir. On peut étendre ce terme aux libelles diffamatoires, médisances d'autant plus criminelles, qu'elles font une impres- sion plus forte et plus durable. Aussi chez tous les peuples policés en a-t-on fait un crime d'État qu'on y punit sévèrement. On médit moins à présent dans les cercles qu'on ne faisait les siècles passés, parce qu'on y joue davantage. Les cartes ont plus sauvé de réputations que n'eût pu faire une légion de missionnaires attachés uniquement à prêcher contre la médi- sance; mais enfin on ne joue pas toujours, et par conséquent on médit quelquefois. Une trop grande sensibilité à la médisance entretient la malignité, qui ne cherche qu'à affliger. MÉDITATION, s. f. [Qram.), opération de l'esprit qui s'ap- plique fortement à quelque objet. Dans la méditation profon--de, l'exercice des sens extérieurs est suspendu, et il y a peu de