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LETTRES


À MADEMOISELLE VOLLAND


(FIN)




L


Paris, le 3 novembre 1760.


Ce lundi matin, Mme d’Aine a renvoyé dans son équipage, à Paris, un de ses parents, avec un homme d’affaires qui lui est attaché. J’ai profité de l’occasion pour m’en revenir, le Baron m’ayant assuré qu’il ne ferait ici aucun voyage dans le courant de la semaine. Mme d’Aine, que j’ai trouvée seule au bas de l’escalier, m’a dit : « J’avais compté sur vous pour jusque après la Saint-Martin ; mais je vois ce que c’est. » Je n’en suis pas convenu, quoique cela fût vrai.

Nous nous sommes bien embrassés, Mme d’Aine et moi ; je l’ai remerciée de mon mieux. Elle m’a dit que la chambre que j’occupais serait dorénavant appelée la mienne, et que je ne pourrais jamais m’installer ni trop tôt, ni pour trop longtemps. Nous avons eu, le Baron et moi, deux moments fort doux : l’un en nous retrouvant quand j’arrivai au Grandval, l’autre en nous séparant aujourd’hui. Il avait, ces deux jours-là, l’air touché : la première fois de plaisir, la seconde fois de peine. J’ai gagné de l’intimité avec Mme d’Holbach. J’ai eu quelque occasion de m’apercevoir qu’elle avait conçu beaucoup d’estime pour moi.