Page:Dierx - Œuvres complètes, Lemerre, I.djvu/104

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Loin des villes, d'ailleurs, hérissant ses trois tours,
Le manoir de Hemrick, ancien nid de vautours,
Avait le vieux renom de se fermer aux fêtes ;
Et tous deux, le front ceint de rayons, coutumiers
De solitude et d'ombre, et de paix, vous aimiez,
Couple heureux, à sentir vos âmes satisfaites,
Au murmure tranquille et sacré des forêts,
Se confondre au réveil des calices plus frais.

Mais non, Hemrick ! Ton âme ardente était de celles
Où le même foyer fait deux parts d'étincelles,
Qui brûlantes d'amour, sont chaudes d'amitié ;
Ton âme était le champ dont le sillon immense
Pour les doubles moissons se trace et s'ensemence ;
Et chaque jour ainsi tu donnais la moitié
De toi-même à l'ami loyal, au frère d'armes,
Mort aussi, pour rouvrir la source de tes larmes !

Ô morts ! Couchés là-bas sous le plomb bien scellé,
Dans votre lit bien clos, sans serrure t sans clé,
Dormez l'un après l'autre à la garde des anges,
Complices embaumés d'un fraternel regret !
Car avec vous descend dans la fosse un secret
Dont les vers vont nourrir leurs discrètes phalanges ;
Et celui qui là-haut n'en avait rien compris
N'en connaîtra jamais l'inexigible prix.

Lui, survit, foudroyé par deux fois, solitaire,
Inerte, inconsolable ; et toujours vers la terre,