Page:Dierx - Œuvres complètes, Lemerre, I.djvu/131

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Rouliez, tels que dans l'ombre opaque, sous l'azur !
Membres de la déesse unique et sans apôtre,
Avez-vous tressailli d'un hémisphère à l'autre ?
Ô nature ! Miracle à toi-même caché,
As-tu senti le bas de ton manteau touché
Par quelque avant-coureur d'un dieu qui va paraître,
À la fois ton amant, ton chantre et ton vrai maître ?
Et quand l'homme apparut, plein d'extase, emplissant
Avec ses yeux son âme et son crâne puissant,
Ô fille du mystère où le mystère émerge !
N'as-tu pas tout entière alors, sublime vierge !
Frémi profondément d'angoisse et de fierté,
Sentant tomber ton voile et briller ta beauté ?
Non ! L'éternelle horreur d'être sans but ni causes
Fait seule tes frissons dans tes métempsycoses !
Tes images, tes bruits, tes parfums, tes saveurs,
Tout cet enchantement de nos esprits rêveurs,
Production des sens, n'est qu'un songe qui passe,
Et qui mourra comme eux, emportant dans l'espace
Ou rendant à te sourds, noirs et muets travaux
La chimère des cœurs et l'effort des cerveaux !
Non ! Ton voile est tombé, tu restas l'insensible,
L'inerte fiancée, et la vierge invincible
Que le profanateur s'épuise à violer !
Non ! Non ! Tu resplendis, sans lui rien révéler
Que la stérilité de ta force infinie
Et le néant d'ouvrir même en toi son génie !