Page:Dieu, par Victor Hugo, 1891.djvu/134

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De l’antre, que blanchit l’aube et qu’ombre le soir,
On voit passer, forgeant la lumière ou la brume
Sur l’Heure, étincelante et ténébreuse enclume,
Le Jour, la Nuit, géants, cyclopes à l’œil rond,
Ayant, l’un le soleil, l’autre la lune, au front.

La Matière est au centre, au fond des sombres voûtes,
Hydre, divinité, la plus noire de toutes !
Tout cherche tout, sans but ; sans trêve, sans repos.
Ces femmes qu’un dieu pousse et dont les blanches peaux
En touchant l’arbre ému, font frémir les écorces,
Ces démons composés d’ivresses et de forces,
Les Ménades aux seins de Sirène, aux yeux fous,
Passent levant leur robe au-dessus des genoux,
Mêlant les voix, le luth, la timbale et le cistre.
Ô monde ténébreux, éblouissant, sinistre !
La fange se soulève et veut lécher les cieux.
Les cieux n’abhorrent pas cet hymen monstrueux.
Omphale aux blonds cheveux étreint le vaste Hercule.
Tout frémit. Dans le vague et trouble crépuscule
Les temples entrevus dressent leurs noirs piliers ;
Les flamboiements des yeux errent dans les halliers :
Le pâtre attend Phœbé ; l’ombre qui se déchire
Laisse voir le dragon, l’elfe, l’hécatonchyre,
Tâchant de s’enlacer, de s’unir, de sentir ;
La blanche vision des nymphes fait sortir