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PORPHYRE.




VIE DE PLOTIN[1].


I.

Plotin le philosophe, notre contemporain, paraissait rougir d’avoir un corps, et, par suite de cette disposition d’esprit, il ne voulut jamais parler ni de sa naissance, ni de ses parents, ni de sa patrie[2]. Jamais il ne consentit non plus à poser devant un peintre ou un sculpteur ; pressé par Amélius de laisser faire son portrait, il lui dit : « Ce n’est pas assez, sans doute, de ce vain fantôme dont la nature a enveloppé notre âme ; tu voudrais que je consentisse à laisser de cette ombre une autre ombre, plus durable que la première. Ce serait, en effet, une chose bien digne d’être donnée en spectacle à la postérité ! » Amélius n’ayant pu l’amener à poser, et désespérant de vaincre ses refus, pria un de ses amis, Cartérius, le meilleur peintre d’alors, de l’accompagner aux leçons de Plotin, où il était loisible à chacun de se présenter. Cartérius s’habitua, par une étude et une attention soutenues, à retenir les traits de Plotin. Il peignit ensuite de mémoire l’image qu’il avait en quelque sorte gravée dans sa pensée, et parvint ainsi, grâce à son génie et aux corrections d’Amélius, à reproduire, tout

  1. J’ai suivi pour le texte l’édition de Creuzer. Oxford, 1835.
  2. Il était de Lycopolis, en Égypte.