Page:Discours sur les révolutions de la surface du globe, et sur les changemens qu'elles ont produits dans le règne animal.djvu/19

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bientôt que cette ancienne mer n'a pas déposé constamment des pierres semblables entre elles, ni des restes d'animaux de mêmes espèces, et que chacun de ces dépôts ne s'est pas étendu sur toute la surface qu'elle recouvrait. Il s'y est établi des variations successives, dont les premières seules ont été à peu près générales, et dont les autres paraissent l'avoir été beaucoup moins. Plus les couches sont anciennes, plus chacune d'elles est uniforme dans une grande étendue; plus elles sont nouvelles, plus elles sont limitées , plus elles sont sujettes à varier à de petites distances. Ainsi les déplacemens des couches étaient accompagnés et suivis de changemens dans la nature du liquide et des matières qu'il tenait en dissolution; et lorsque certaines couches, en se montrant au-dessus des eaux, eurent divisé la surface des mers par des îles, par des chaînes saillantes, il put y avoir des changemens différens dans plusieurs des bassins particuliers.

On comprend qu'au milieu de telles variations dans la nature du liquide, les animaux qu'il nourrissait ne pouvaient demeurer les mêmes. Leurs espèces, leurs genres même, changeaient avec les couches; et, quoiqu'il y ait quelques retours d'espèces à de petites distances, il est vrai de dire, en général, que les coquilles des couches anciennes ont des formes qui leur sont propres; qu'elles disparaissent graduellement, pour ne plus se montrer dans les couches récentes, encore moins dans les mers actuelles, où l'on ne découvre jamais leurs analogues d'espèces, où plusieurs de leurs genres eux-mêmes ne se retrouvent pas; que les coquilles des couches récentes au contraire ressemblent, pour le genre, à celles qui vivent dans nos mers, et que dans les dernières et les plus meubles de ces couches, et dans certains dépôts récens et limités, il y a quelques espèces que l’œil le plus exercé ne pourrait distinguer de celles que nourrissent les côtes voisines.

Il y a donc eu dans la nature animale une succession de variations qui ont été occasionées par celles du liquide dans lequel les animaux vivaient ou qui du moins leur ont correspondu; et ces variations ont conduit par degrés les classes des animaux aquatiques à