jourd'hui. Elle a laissé encore, dans les pays du Nord, des cadavres de grands quadrupèdes que la glace a saisis, et qui se sont
conservés jusqu'à nos jours avec leur peau, leur poil, et leur chair.
S'ils n'eussent été gelés aussitôt que tués, la putréfaction les aurait
décomposés. Et d'un autre côté, cette gelée éternelle n'occupait
pas auparavant les lieux où ils ont été saisis; car ils n'auraient pas
pu vivre sous une pareille température. C'est donc le même instant
qui a fait périr les animaux, et qui a rendu glacial le pays qu'ils
habitaient. Cet événement a été subit, instantané, sans aucune gradation, et ce qui est si clairement démontré pour cette dernière catastrophe ne l'est guère moins pour celles qui l'ont précédée. Les
déchiremens, les redressemens, les renversemens des couches plus
anciennes ne laissent pas douter que des causes subites et violentes
ne les aient mises en l'état où nous les voyons; et même la force des
mouvemens qu'éprouva la masse des eaux est encore attestée par les
amas de débris et de cailloux roulés qui s'interposent en beaucoup
d'endroits entre les couches solides. La vie a donc souvent été troublée sur cette terre par des événemens effroyables. Des êtres vivans
sans nombre ont été victimes de ces catastrophes; les uns habitans
de la terre sèche se sont vus engloutis par des déluges; les autres,
qui peuplaient le sein des eaux, ont été mis à sec avec le fond des
mers subitement relevé; leurs races mêmes ont fini pour jamais, et
ne laissent dans le monde que quelques débris à peine reconnaissables pour le naturaliste.
Telles sont les conséquences où conduisent nécessairement les
objets que nous rencontrons à chaque pas, que nous pouvons vérifier à chaque instant dans presque tous les pays. Ces grands et
terribles événemens sont clairement empreints partout pour l'œil
qui sait en lire l'histoire dans leurs monumens.
Mais ce qui étonne davantage encore, et ce qui n'est pas moins certain, c'est que la vie n'a pas toujours existé sur le globe, et qu'il est facile à l'observateur de reconnaître le point où elle a commencé à déposer ses produits.