Que dire sur les causes de l’état actuel du globe, si l’on ne peut
répondre à ces questions, si l’on n’a pas encore de motifs suffisans
pour choisir entre l’affirmative ou la négative ? Or il n’est que trop
vrai que pendant long-temps aucun de ces points n’a été mis absolument
hors de doute, qu’à peine même semblait-on avoir songé
qu’il fût bon de les éclaircir avant de faire un système.
Raison pour laquelle les conditions ont été négligées.On trouvera la raison de cette singularité, si l’on réfléchit que les géologistes ont tous été, ou des naturalistes de cabinet, qui avaient peu examiné par eux-mêmes la structure des montagnes ; ou des
minéralogistes, qui n’avaient pas étudié avec assez de détail les innombrables
variétés des animaux, et la complication infinie de leurs
diverses parties. Les premiers n’ont fait que des systèmes ; les derniers
ont donné d’excellentes observations ; ils ont véritablement
posé les bases de la science : mais ils n’ont pu en achever l’édifice.
Progrès de la géologie minérale.En effet, la partie purement minérale du grand problème de la théorie de la terre a été étudiée avec un soin admirable par de Saussure, et portée depuis à un développement étonnant par Werner,
et par les nombreux et savans élèves qu’il a formés.
Le premier de ces hommes célèbres, parcourant péniblement pendant vingt années les cantons les plus inaccessibles, attaquant en quelque sorte les Alpes par toutes leurs faces, par tous leurs défilés, nous a dévoilé tout le désordre des terrains primitifs, et a tracé plus nettement la limite qui les distingue des terrains secondaires. Le second, profitant des nombreuses excavations faites dans le pays qui possède les plus anciennes mines, a fixé les lois de successions des couches ; il a montré leur ancienneté respective, et poursuivi chacune d’elles dans toutes ses métamorphoses. C’est de lui, et de lui seulement, que datera la géologie positive, en ce qui concerne la nature minérale des couches ; mais ni Werner ni de Saussure n’ont donné à la détermination des espèces organisées fossiles, dans chaque genre de couche, la rigueur devenue nécessaire, depuis que les animaux connus s’élèvent à un nombre si prodigieux.