Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/148

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aventure, mais je l’avais toujours prise pour une légende. Ma foi, tant mieux que le fait soit vrai !

— Vrai ! Certainement qu’il est vrai, répondit vivement Lambert, je vous l’ai raconté tout juste comme ma mère me l’a dit il y a bien des années. Il n’est pas un enfant en Hollande qui l’ignore. Et d’ailleurs, Ben, il est moins étonnant que vous ne le pensez. Ce petit garçon est la personnification de l’esprit public en Hollande. Il est impossible qu’il se produise chez nous une fissure dans une question intéressant soit l’honneur de la nation, soit sa sûreté, sans qu’un million de doigts ne soient prêts à la boucher, n’importe à quel prix.

— Oui dà ! s’écria maître Ben, c’est beaucoup dire, un million !

— C’est dire la simple vérité, reprit Lambert si tranquillement que Ben se serait fait scrupule de montrer à son ami le moindre doute.

— Heureux le pays dont tous les habitants sont de sincères patriotes ! » reprit-il pour désintéresser tout à fait son ami Lambert de l’exclamation qui lui était échappée.

« Sans aller bien loin, dit Peter intervenant dans la conversation, vous avez vu il n’y a pas longtemps le jeune garçon qui nous a rapporté notre bourse, eh bien, celui-là est taillé dans le même bois que l’enfant dont Lambert vient de nous raconter l’histoire. Je mettrais ma main au feu qu’à la place du petit éclusier, Hans eût fait absolument la même chose.

— Il a une bonne figure que j’ai remarquée, dit Ben, et qui témoignerait, en effet, en faveur de votre affirmation. »

Karl fit une grimace de dédain qu’heureusement pour lui Peter ne vit pas. Karl n’aimait pas le pauvre Hans, on a pu le voir déjà. Après cela, qui aime-t-on, quand on s’aime trop soi-même ?