Page:Dollier de Casson - Histoire du Montréal, 1640-1672, 1871.djvu/37

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où l’on faisait tout venir de France ; ce qui fait voir leur extrême ingratitude qui les portait à vouloir livrer leurs hôtes entre les mains de leurs ennemis, afin d’être par eux brûlés tout vifs, ce qu’ils tâchaient de faire réussir en cette manière ; tantôt l’un, tantôt l’autre allaient à la chasse et venaient accompagnés d’Iroquois vers la maison de son hôte, il l’appelait comme s’il eût besoin de quelque chose voulant l’attirer dans une embuscade d’ennemis, un pauvre homme sortait bonnement à une telle voix, et souvent il se trouvait dans la gueule du loup. Cela aurait réussi à ces malheureux et ils auraient fait mourir quantité de leurs charitables bienfaiteurs, si Dieu qui ne voulait pas payer leurs bonnes œuvres de cette méchante monnaie ne les eut préservés. Enfin plusieurs ayant été repoussé jusque dans leurs propres foyers, on commença à se donner de garde et on laissa désormais crier ces basiliques avec moins de compassion sans aller s’enquérir de ce qu’ils souhaitaient. On demandera d’où vient que l’on recevait ces gens, qu’on ne les faisait pas mourir ; mais il faut considérer que l’envie que l’on avait de les gagner à Dieu faisait qu’on se laissait aisément tromper par eux dans toutes leurs protestations, et que d’ailleurs, il était de la politique de ne les pas punir, crainte d’animer toute leur nation dans un temps où nous n’étions pas en état de nous soutenir contre tant de monde ; ainsi le temps se passa en trahisons et alarmes jusqu’à ce que l’été étant venu, après que nos pauvres Montréalistes se furent longtemps entretenus de leur cher gouverneur, ils surent qu’il était arrivé, ce qui combla ce lien de joie. Aussitôt qu’il fut venu, il avertit M. d’Ailleboutz qu’en France on voulait rappeler M.le chevalier de Montmagny dont la mémoire est encore en grande vénération ; de plus, il lui dit qu’il serait nommé au gouvernement du Canada et qu’il fallait qu’il s’en allât en France, et que l’année suivante il reviendrait pourvu de sa commission ; ce bon gentilhomme avertit bien M. d’Ailleboutz de ces deux choses, mais il était trop humble pour lui dire qu’on lui avait offert à lui-même d’être gouverneur du pays, et qu’il l’avait refusé par une sagesse qui sera mieux reconnue en l’autre monde qu’en celui-ci.


de l’automne 1647, jusqu’à l’automne 1648, au départ des navires du Canada


Comme dans cette année et la suivante les guerres des Iroquois furent plus furieuses que jamais, ces barbares devenant de jours en jours plus audacieux et superbes par les continuelles victoires