Page:Dollier de Casson - Histoire du Montréal, 1640-1672, 1871.djvu/87

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justice qui était due aux traîtres Hurons, parce qu’ils ne leur tinrent aucunement parole et en firent de furieuses grillades. On a appris ces choses de quelques Hurons qui se sauvèrent des mains de l’ennemi, la première nouvelle qu’on en eut fut par un de ces quarante Hurons, nommé Louis, bon chrétien et peu soldat, qui arriva ici le troisième juin tout effaré et dit que nos 17 Français étaient morts, mais qu’ils avaient tant tué et détruit de gens que les ennemis se servaient de leurs corps pour monter et passer par dessus les palissades du fort où ils étaient ; qu’au reste, les Iroquois étaient tant de monde qu’ils allaient prendre tout le pays. Ensuite il dit tout leur dessein à Mr. de Maison-Neufve comme ils l’avaient entendu de leur propre bouche. Mr. de Maison-Neufve profitant de cet avis mit son lieu en état de recevoir les ennemis aussitôt qu’ils viendraient ; il fit garder les meilleurs postes qu’il avait donné à Messieurs du Séminaire ; Mr. de Belestre pour aller commander dans leur maison de Ste. Marie à tout le monde qui y était, ce bâtiment étant le plus fort et le mieux en état de se défendre qu’il y eut. Après que Mr. notre Gouverneur eut ainsi sagement réglé et ordonné toutes choses, il envoya sans tarder les nouvelles qu’il avait aux Trois-Rivières et à Québec, partout on eut une telle frayeur lorsqu’on entendit ces choses, que même dans Québec on renferma tout le monde jusqu’aux religieuses dans le château et chez les Révérends Pères Jésuites. Mais enfin grâce à Dieu et au sang de nos chers Montréalistes qui méritent bien nos vœux et nos prières pour reconnaissance, les Iroquois ne parurent point et on n’en eut que la peur d’autant que après ce conflit, où ils eurent un si grand nombre de morts et de blessés, ils firent réflexion sur eux-mêmes se disant les uns aux autres : “ Si 17 Français nous ont traités de la sorte étant dans un si chétif endroit, comment serons-nous traités lorsqu’il faudra attaquer une bonne maison où plusieurs de tels gens se seront ramassés, il ne faut pas être assez fou pour y aller, ce serait pour nous faire tous périr ; retirons-nous Voilà comme on a su qu’ils se dirent après ce grand combat, qu’on peut dire avoir sauvé le pays qui sans cela était rafflé et perdu, suivant la créance commune, ce qui me fait dire que quand, l’établissement, du Montréal n’aurait eu que cet avantage d’avoir sauvé le pays en cette occasion et de lui avoir servi de victime publique en la personne de ces 17 enfants qui y ont perdu la vie, il doit à toute la postérité être tenu pour considérable, si jamais le Canada est quelque chose puisqu’il l’a ainsi sauvé dans cette occasion, sans compter les autres ; Mais passons outre et venons au premier juin qui fut celui auquel on fit ici les obsèques de feu Mr. d’Aillebout qui était venu ici l’an 1643 comme un des associés de la compagnie du Montréal pour y