Page:Domela Nieuwenhuis - Le Militarisme.djvu/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

forts de la bourgeoisie. L’armée défend les richesses des banquiers. La classe possédante a si bien arrangé les choses qu’elle ne défend pas elle-même ses propriétés — elle est trop lâche, trop couarde pour cela ! — mais qu’elle les fait garder par les non-possesseurs. À leur point de vue, c’est logique. Mais comment signaler la bêtise, la moutonnerie de ces non-possesseurs, de ceux qui n’ont rien à perdre et qui se laissent employer comme chair à canon au service des autres, de leurs ennemis, les possesseurs ! Que les brebis soient tondues puisqu’elles sont les plus faibles, à cela il n’y a rien d’étonnant, mais que dire des brebis qui choisissent elles-mêmes leurs écorcheurs ! C’est là le comble de la bêtise et l’envie nous prend de crier à ces gens : Tu l’as voulu, George Dandin, tu ne mérites pas d’autre sort !

Les guerres sont rendues possibles par l’esprit militariste, artificiellement entretenu dans le peuple. Croyez-vous qu’un Chamberlain, qu’un Cecil Rhodes pourraient faire la guerre s’ils n’avaient pas eu soin d’avoir derrière eux un parti puissant ? La presse n’a-t-elle pas pendant des mois excité méthodiquement le peuple anglais contre les Boers ? Oh ! cette presse ! On l’appelle un bienfait et pourtant elle est dans les mains des capitalistes le moyen d’empoisonner toutes sources d’une vie populaire saine. Il y a des ligues contre la falsification des denrées pour la protection des animaux, mais où trouver la ligue qui protège le peuple contre l’empoisonnement de l’opinion publique par la presse qui, tous les jours, verse son venin goutte à goutte et paralyse les cerveaux de milliers d’hommes ?

On veut prétendre que l’esprit militariste diminue beaucoup.

Où sont les preuves pour cela ? Ce ne sont que des mots en flagrante opposition avec la réalité. Toute la vie humaine subit dès la plus tendre jeunesse l’influence du militarisme, influence incroyablement forte et qui la pénètre entièrement, bien plus que ne le pensent la plupart des hommes qui ne réfléchissent guère.