Page:Domela Nieuwenhuis - Le Militarisme.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tion, sont les seuls qui tuent pour tuer. Et ils le font avec un tel raffinement, avec une telle cruauté que le chat qui joue avec la souris, avant de la dévorer, est un enfantillage en comparaison avec eux. Dans le monde des animaux il y a un oiseau, le Cariama, qu’on trouve dans certains jardins zoologiques, qui a un dégoût pour les oiseaux querelleurs. On peut le dompter facilement et on lui a donné une place dans le poulailler, où il a la fonction d’agent de police et de juge. Quand deux coqs sont en compétition pour la même poule et vont se battre jusqu’à la mort, le détenteur de la paix fait son devoir sans considération de personne, et donne à tous les deux quelques piqûres avec son bec. Si quelque être semblable à cet oiseau faisait son devoir parmi les hommes, il aurait les mains pleines de travail.

Novicow dit : « Il y a d’abord les 3.300.000 hommes qui sont sous les drapeaux. S’ils n’étaient pas soldats et se livraient à des besognes lucratives, en gagnant seulement mille francs par tête, ils pourraient produire 3 milliards 800 millions de francs. Les 4.500 millions absorbés aujourd’hui par les dépenses militaires rapporteraient bien 5 %, s’ils étaient placés en entreprises agricoles et industrielles. Cela fait encore 225 millions. Les vingt-huit jours des réservistes peuvent bien s’évaluer à 200 millions, au plus bas mot. Voilà donc 4.225.000.000 absolument palpables. Mais combien de pertes colossales échappent à toute évaluation ! Les capitaux produisent des capitaux. Si ces milliards étaient économisés tous les ans sur les dépenses militaires et versés dans les entreprises nouvelles, ils produiraient des bénéfices qu’il est absolument impossible d’évaluer.

Le travail est donc pour produire, la guerre pour détruire : quelle peut être la relation entre ces deux antipodes ? Les travailleurs sont conduits à la guerre comme du bétail, ne sachant même pourquoi ils se battent. Vous connaissez le dessin de Hermann-Paul dans le Cri de Paris ? Sur le bateau qui les mène en Chine, deux soldats sont assis : un Français et un Allemand. Ils causent amicalement dans l’oisiveté de