feignit de prendre un amiral pour un cuisinier. Cela faillit très mal tourner.
Enfin j’étais officiellement un poète du Chat Noir, étiquette qui m’est longtemps restée, car les étiquettes restent sur les personnes comme sur les malles qui ont beaucoup voyagé et qui gardent, multicolores et indécollables, les adresses des hôtels où elles sont descendues, hôtels d’Écosse ou d’Engadine, d’Espagne ou d’Italie.
De mon séjour au Chat Noir j’ai conservé les meilleurs souvenirs. Là j’ai connu des amitiés sincères, des camaraderies charmantes. Au banquet de la vie, ces bohèmes, gentils convives, n’empêchaient pas le nouveau venu de s’asseoir ; ils rapprochaient leurs chaises pour lui faire de la place, ils le mettaient tout de suite à l’aise, à leur aise, à son aise. Par les beaux jours d’été, nous déjeunions devant la grande baie ouverte sur la rue Victor-Massé. Chaque mer-