Oubliez des balcons ces muets entretiens ;
Vos regards sont distraits, ils détournent les miens.
Mais vous qui, dans nos chœurs prétendus harmoniques,
Venez nous étaler vos masses organiques,
Et circulairement rangés en espalier,
Detonnez de concert pour mieux nous ennuyer ;
Vous verrai-je toujours, l’esprit et le cœur vuides,
Hurlant, les bras croisés, vos refrains insipides ?
Vous est-il défendu de peindre dans vos yeux,
Ou la tristesse sombre, ou les folâtres jeux ?
Pour célébrer Vénus, Cérès, Flore et Pomone,
Lorsque le tambourin autour de vous résonne,
Sous des berceaux de fleurs lorsque d’heureux amans
Entrelacent leur chiffre, et gravent leurs sermens,
Ou que l’ardent vainqueur de l’Indus et du Gange,
Une coupe à la main, préside à la vendange ;
Quand tout est rayonnant du feu de la gaîté,
De quel œil soutenir votre immobilité ?
Vous gâtez le tableau qui par vous se partage ;
De grace, criez moins, et sentez davantage ;
Et que l’on puisse enfin, sur vos fronts animés,
Trouver le sens des vers, par la voix exprimés…
La scene s’embellit : sur des bords solitaires,
Je vois se réunir des grouppes de bergeres.
Des bergers amoureux ont volé sur leurs pas ;
Apollon les appelle à d’aimables combats.
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